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L'amphithéâtre de Lillebonne

Après la conquête de la Gaule par les Romains, le peuple celte des Calètes implanta sa capitale sur un nœud de communication à proximité de la Seine. À cet endroit passait le commerce circulant entre les iles britanniques, le centre de la Gaule et les peuples du Sud. Le lieu fut dénommé Juliobona en honneur de Jules César. L'amphithéâtre, qui y fut construit au 1er siècle, reste le plus étendu et le mieux conservé du nord de la France.

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L'endroit, abandonné après le IIIe siècle, tomba dans l'oubli jusqu'au VIIIe siècle où les "Chroniques de l'abbaye de Saint-Wandrille" relatent la récupération de pierres sur le castrum de Lillebonne pour la construction de l'abbaye. Le site réapparait au Moyen-âge sous le nom de "La Roque" ou "La Roquette". Il fut, à l'époque, transformé en place forte pour la défense de la ville. Le comte de Caylus identifia en 1763 le site que lui avait signalée l'ingénieur des Ponts et Chaussés Duchesne comme une construction romaine. Le site, propriété de la famille d'Harcourt, fut vendu comme bien national en 1793 à Pierre Caron, cafetier à Lillebonne. Il fit aplanir le terrain pour y planter un verger et vendit les matériaux apparents. François Rever, curé puis député de l'Eure, fut alerté, en 1812, par la découverte, à cet endroit, d'un trésor monétaire. Il fit le rapprochement avec le site identifié par le comte Caylus. Il suivit par la suite les travaux de Pierre Caron qui conduisirent au démantèlement et à la vente de l'escalier nord-est, du dégagement de la galerie périphérique et au déblaiement d'un vomitorium dont les marches furent démontées et vendues. François Rever, convaincu d'avoir affaire à un théâtre antique, essaya d'attirer l'attention de l'académie de Rouen et du Conseil général de la Seine-Inférieure. Il acheta à Pierre Caron le droit d'effectuer une tranchée à l'emplacement supposé de l'arène.

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En 1818, le site fut acquis par le Conseil général de la Seine-Inférieure qui finança des fouilles officielles supervisé par François Rever. Il n'était présent que rarement sur place laissant à Michel Lechaptois, juge à Lillebonne, le soin de surveiller les travaux effectués par des ouvriers non qualifiés. Charles Basile Éloi Pigné, pharmacien à Lillebonne, ayant suivi les fouilles, publia, en 1831, "Panorama de Lillebonne" dans lequel il décrit le théâtre. À partir de 1827, François Rever fut remplacé par Emmanuel Gaillard. Il mena à bien le déblaiement presque complet des structures comme la galerie périphérique et la structure de la cavea et de l'arène. À la mort de Gaillard en 1836, Achille Deville poursuivit les travaux jusqu'en 1841. Le site, bien que classé Monument historique en 1840, fut ensuite laissé à l'abandon.

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L'établissement thermal

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Le 10 décembre 1880, le vicomte d'Estaintot rapporta devant la commission des Antiquités de la Seine-Inférieure, les mentions au site du théâtre qu'il avait relevé dans les archives. Il est fait mention au théâtre dans les comptes de la seigneurie de Lillebonne en 1359, en 1374, en 1384, en 1388, en 1395, etc. En 1553, le bornage du terrain fut précisé. Il semblerait qu'au XVIe siècle une porte d'entrée du théâtre était encore en élévation. Celle-ci fut citée en 1701 par l'abbé Cochet, par contre Dom Toussaint Duplessis, dans sa description de Lillebonne faite en 1740, ne la mentionne pas. À la fin du XIXe siècle, l'amphithéâtre avait beaucoup souffert de l'abandon. Un mur de clôture métallique destinée à l'isoler et à le protéger des dépôts de détritus fut alors construit. De nouvelles fouilles réalisées par le gardien André Guyot sous la surveillance de Léon de Verly, nouveau directeur du Musée des Antiquités de Seine-Inférieure, eurent lieu entre 1908 et 1915. Une campagne de sondages archéologiques fut effectuée entre 1935 et 1938 par l'entreprise Lanfry sous les ordres de l'architecte en chef des Monuments historiques Paul Franchette.

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L'entrée ouest

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L'entrée ouest

En 1940, l'officier allemand commandant la place de Lillebonne fut inhumé dans le théâtre. Il sera exhumé en 1944 par les alliés. En 1960, après plus de 20 ans d'abandon, la végétation qui s'est développée sur le site et qui en menaça l'intégrité nécessita une intervention. La municipalité en profita pour installer des illuminations électriques. Maurive Yvart, pharmacien à Lillebonne et correspondant local de la commission des Antiquités, entama des restaurations en 1961 et 1962. Une nouvelle phase de restauration, supervisée par l'architecte en chef de Monuments historiques Georges Duval, eut lieu en 1974, suivi en 2001, 2007 et 2008 de nouvelles études et de fouilles.

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L'entrée est

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La galerie périphérique

Aujourd'hui subsiste de l'amphithéâtre la galerie périphérique qui gérait les accès et la distribution interne, l'hémicycle de la cavea et l'arène. Il faut y rajouter le bâtiment de scène enfoui sous la route et la place attenante et qui n'a jamais été fouillé. L'amphithéâtre fut construit au cours du 1er siècle apr. J.-C.. Il s'agissait d'un hémicycle de gradins, la cavea, s'appuyant en partie contre la pente naturelle de la colline et dont la partie supérieure fut construite avec des murs et des remblais sur le sommet de la colline. L'autre partie de la cavea et l'arène furent construites sur une zone plane avec des murs et des remblais. Le bâtiment de scène se situe du côté nord afin de bénéficier de conditions idéales d'éclairage solaire. Au cours du IIe siècle, l'amphithéâtre fut transformé en théâtre en remplaçant la partie nord de la cavea par une estrade ou un massif de scène. Les gradins étaient alors en bois. Au début du IIIe siècle, le théâtre fut agrandi par l'ajout de la galerie périphérique couverte par le sommet de la cavea rehaussé. À la fin du IIIe siècle, le site perdit sa fonction de lieu de spectacle. Toutes les issues furent alors fermées par des blocs calcaires en grand appareil. Le site fut transformé en forteresse de défense contre les incursions des barbares. L'installation d'un petit édifice thermal sur le côté nord de l'arène n'est, pour l'heure, pas datée.

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L'amphithéâtre avait une longueur de 106,50 m, soit 360 pieds romains, et sa largeur était de 94,70 m, soit 320 pieds romains. Sa hauteur actuelle est de 19 m. Les archéologues estiment qu'elle devait avoisiner les 30 m. Sa capacité était de 5000 spectateurs, mais certaines sources parlent de 10 000 spectateurs. L'arène est longue de 47,30 m (axe est-ouest) et large de 35,50 m (axe nord-sud). Le côté nord de l'arène a une forme elliptique alors que le côté sud est circulaire. À l'extrémité sud du petit axe se trouvait le sacellum, lieu de culte utilisé avant les spectacles pour invoquer les dieux. L'arène était cernée d'un mur destiné à protéger les spectateurs et séparé des gradins par deux podiums superposés, terrasses munies de sièges destinées aux notables. Les gradins de la cavea étaient divisés en sections (maeniana) séparées par sept passages (escaliers) convergeant vers l'arène. L'accès des spectateurs à ces passages se faisait au travers des vomitorium depuis la galerie périphérique. La cavea était constituée de l'Ima cavea, la partie inférieure réservée aux magistrats de la ville, de la media cavea, la partie intermédiaire réservée à la classe moyenne et de la Summa cavea, la partie supérieure destinée au peuple. Le mur de scène a été localisé à 13 m de la limite nord du site actuellement dégagé. L'amphithéâtre possédait deux entrées monumentales à l'est et à l'ouest donnant accès au 1er podium et à l'arène. Celle de l'est était prévue pour les accès piétonniers alors que celle de l'ouest pouvait être empruntée par des chars. Une autre entrée, située au sud, donnait accès à la galerie périphérique.

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L'entrée est

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Un vomitorium

Ces photographies ont été réalisées en juillet 2018.

 

Y ACCÉDER:

L'amphithéâtre est situé au centre-ville de Lillebonne. La visite est libre et gratuite, mais soumise à des horaires d'ouverture.

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 12 octobre 2018

Cette page a été mise à jour le 12 octobre 2018