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Les falaises d'Etretat

Les falaises de craie entourant la petite ville balnéaire d'Etretat sont mondialement connues. Elles ont inspiré de nombreux peintres dont Claude Monet, qui en fit le sujet de 80 de ses toiles. Parmi les points remarquables de la côte, nous avons, du nord au sud, l'aiguille de Belval, le roc Vaudieu, la Porte d'Amont, la Porte d'Aval, l'Aiguille Creuse et la Manneporte.

La Porte d'Aval et l'Aiguille Creuse

Les falaises du pays de Caux sont constituées de couches de craie entrecoupée de lit de silex. Les couches de craie peuvent atteindre jusqu'à 500 m d'épaisseur. Elles se sont formées au cours du crétacé supérieur durant les ères du turonien et du coniacien, il y a 93,6 à 85,8 millions d'années. La craie s'est formée à partir de boues carbonatées à coccolites qui se sont déposées au fond d'une mer épicontinentale d'environ 300 m de profondeur. Les coccolites sont des plaquettes calcaires de forme sphérique d'un diamètre compris entre 5 et 35 micromètres qui entourent des algues unicellulaires nommées coccolithophoridés. L'analyse isotopique de ces coccolites indique que la température était à l'époque plus élevée qu'aujourd'hui. La craie ne contient que de très rares fossiles visibles à l'œil nu. Les couches de craie reposent sur des strates carbonées et sont surmontées de couches plus argileuses. Les lits de silex sont constitués d'amas de roche dure siliceuse (calcédoine, quartz, opale) d'origine biochimique formé par la précipitation de gel de silice lorsque les conditions d'oxydoréduction et d'acidité ont brutalement changé.

Les falaises sont constituées d'une face verticale précédée d'un estran rocheux nommé platier en partie découvert à marée basse. L'érosion les fait reculer d'une trentaine de mètres par siècle. Les falaises sont sapées à leur base par l'action des vagues, mais c'est surtout l'infiltration de l'eau de pluie par le haut qui altère la masse de craie. La falaise finit par s'écrouler et les débris sont déblayés par la mer qui dissout le calcaire ce qui lui donne une couleur laiteuse d'où le nom de côte d'opale donné à la région. Les silex sont brassés par les vagues et les courants et prennent en quelques mois une forme ovoïde créant les galets des plages. Ces galets de silex forment un rempart naturel de protection du littoral en jouant un rôle d'amortisseur de vagues. À Etretat les courants les déplacent vers le large et vers le nord. Ils peuvent avancer de plus d'un kilomètre par an. Une forte mer peut les déplacer de 10 à 15 m par jour. Les galets de silex furent durant de nombreuses années ramassées par les habitants des villages côtiers pour alimenter l'industrie de la porcelaine et de la faïence.

Les recherches géologiques ont démontré que les arches de la Porte d'Amont, de la Porte d'Aval et de la Manneporte n'étaient pas dues à l'érosion marine, mais étaient les vestiges d'une galerie karstique creusée par une rivière souterraine dont le cours était plus ou moins parallèle au trait de côte actuel. Une deuxième rivière souterraine a été à l'origine d'une deuxième rangée d'arches situées un peu plus au large et dont ne subsistent plus que les socles des arches au fond de l'eau. Les piliers des arches et les différents caps sont constitués d'un calcaire un peu plus dur retardant leur dissolution par l'eau. De nombreuses galeries karstiques sont recensées autour d'Etretat. La Porte d'Aval en concentre la plupart avec douze cavités et 510 m de galeries topographies. La plus grande grotte de Seine-Maritime, qui peut être visitée certains jours de l'année, se trouve d'ailleurs près d'ici sur la commune de Petite Dalle.

En nous promenant le long des falaises du nord au sud, nous pouvons donc admirer les différentes merveilles que la nature a sculptées. L'aiguille de Belval, d'une hauteur de 40 m, se situe à 150 m au large de la falaise. Elle est toujours entourée d'eau. Le roc Vaudieu, haut de 26 m, est le vestige d'un ancien cap. À la Porte d'Amont, la falaise culmine à 80 m de hauteur. La Porte d'Amont est percée par la plus petite des arches du site. Maupassant la compara à un éléphant plongeant sa trompe dans l'eau. Au sommet de la falaise de la Porte d'Amont se situe la chapelle Notre-Dame de la Garde, protectrice des pécheurs. Cette chapelle du XIX^e siècle en brique et pierre, de style néogothique, fut détruite en 1942 par l'armée allemande, car elle pouvait servir de repère aux alliés. À côté de la chapelle se trouve le monument des aviateurs Nungesser et Coli.

La plage de galets d'Etretat est séparée du village par une longue digue dénommée le 'Perrey" ou "Perré", terme du dialecte local signifiant l'empierré. L'ancien front de mer avec le casino art nouveau fut, comme la chapelle Notre-Dame de la Garde, détruit par l'armée allemande en 1942 afin de pouvoir assurer la défense du littoral contre un débarquement allié. Au large de la plage, au pied de la Porte d'Aval, subsistent les vestiges de parcs à huitres du XVIII^e siècle. À cet endroit furent cultivées et affinées les huitres destinées à la reine Marie-Antoinette. Les bourriches étaient livrées en une nuit à la cour de Versailles.

Dans la falaise d'Aval, haute de 74 m, s'ouvre la grotte du Trou à l'Homme. D'après la légende, elle doit son nom à un marin suédois, unique rescapé d'un naufrage lors d'une tempête qui dura 24 heures. Il aurait été projeté dans la cavité par une vague, ce qui l'a protégé des flots déchainés. D'origine karstique, la cavité, dont le porche a été agrandi par la mer, a une profondeur de 52 m. Sur le côté de la cavité, une galerie naturelle a été surcreusée par l'homme pour offrir un passage aboutissant sur l'autre face du cap. Le Trou à l'Homme serait habité par des fées qui interdissent qu'on explore le fond de la grotte. Nul ne s'est risqué jusqu'à présent dans les profondeurs des galeries qui s'enfoncent très loin dans la roche.

Après l'arche de la falaise d'Aval, dénommée la Porte d'Aval, se trouve l'Aiguille Creuse. Ce vestige d'une arche, haut de 51 m, n'est nullement creux. La dénomination a été rendue populaire par le romancier Maurice Leblanc qui publia en 1909 son roman "L'aiguille creuse" où son héros Arsène Lupin découvre à l'intérieur de cette aiguille le trésor des rois de France.

En poursuivant vers le sud, nous trouvons la valleuse de Jombourg où la hauteur de la falaise varie entre 72 et 85 m pour arriver à la Manneporte. La Manneporte est de l'ancien français qui signifie "grande porte". Les falaises de ce cap sont hautes de 82 à 85 m. L'arche qui perce le cap est haute de 50 m et large de 40 m. Un petit tunnel karstique de 2 m de section traverse les 19 m de l'épaisseur du jambage de l'arche.

Au-delà de la Manneporte, le paysage se poursuit par la baie du Petit Port, le cap de Valaine, la baie de Valaine, la pointe de la Courtine pour aboutir à la baie et au cap d'Antifer.

La ville d'Etretat connut son essor touristique à partir de 1860 lorsque le chemin de fer la relia à Paris. Les paysages grandioses y attirèrent de nombreux artistes. Parmi les peintres, il y a eu Claude Monet, Gustave Courbet, Eugène Boudin, Eugène Delacroix, Henri Matisse ou Jean Baptiste Corot. Monet fut particulièrement prolifique en peignant, entre 1868 et 1916, 80 toiles à différents moments de la journée pour y saisir la luminosité changeante au fil des heures. Parmi les écrivains, nous pouvons citer Gustave Flaubert, Guy de Maupassant, qui y passa une partie de son enfance, et Maurice Leblanc, le père d'Arsène Lupin. Les musiciens Jules Massenet, Jacques Offenbach et Charles Lamoureux y firent également des séjours. Le lieu était également très prisé par les femmes et les hommes politiques tels que Félix Faure, Léon Blum, René Coty, le général de Gaulle ou les reines Marie-Christine et Marie-Louise Isabelle d'Espagne.

Ces beaux paysages connurent malheureusement aussi les affres de la guerre. Durant la 1^re Guerre mondiale, les armées britanniques y implantèrent leur hôpital général N° 1 et les troupes américaines la Base Hospital Unit N° 2. Au cours de la 2^e Guerre mondiale, deux batailles navales eurent lieu au large de la plage. Le 27 août 1943, à 23 h 55, la vedette allemande UJ1433, longue de 58 m, fut attaquée et coulée par le torpilleur "La combattante" des forces navales françaises libres. Son épave dite "le patrouilleur de Benouville" repose par 20 m de fond au large du village de Benouville. Le 27 septembre 1943 à 3 h 55, la vedette allemande UP1501, longue de 46 m, fut coulée par deux torpilles anglaises. Elle repose par 24 m de fond. La ville fut libérée de l'occupant allemand en septembre 1944 par la 51^e Division des Highlanders commandés par le général Dwight David Eisenhower.

Ces photographies ont été réalisées en juillet 2018.

Y ACCÉDER:

Les différents sites sont accessibles par les sentiers côtiers ou par la plage (attention à la marée) depuis la plage d'Etretat. Attention, tous les parkings à Etretat sont payants.

Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 12 octobre 2018

Cette page a été mise à jour le 12 octobre 2018