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L'abbatiale Saint-Philibert
de Tournus

L’abbatiale Saint-Philibert de Tournus, située en Saône-et-Loire, est l’un des plus remarquables édifices romans de Bourgogne et un témoin exceptionnel de l’architecture monastique du début du XIsiècle.

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L'histoire du site débuta en l'an 175 par l'implantation d'un camp romain. En 177 débuta à Lyon la persécution des chrétiens amenant certains d'entre eux à fuir vers le nord. Parmi eux se trouvait Valérien qui entreprit l’évangélisation de la région de Tournus. Sa présence arriva aux oreilles de Priscus, gouverneur de Chalon-sur-Saône, qui donna l'ordre de l'arrêter et de le torturer jusqu'à ce qu'il cessât de louer son Dieu. Comme Valérien refusait, il fut décapité en 178. Inhumé à l'emplacement de la crypte actuelle, son tombeau fit rapidement l'objet d'un pèlerinage. Un oratoire fut probablement construit sur sa tombe dès le IVsiècle. Au VIsiècle, Grégoire de Tours mentionna la présence d'un sanctuaire au castrum romain de Tournus.

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Fuyant les raids des Normands (Vikings), les moines de Saint-Philibert de Noirmoutier quittèrent leur monastère en 836 en emportant le sarcophage et les reliques de Saint-Philibert pour une longue errance à travers le royaume franc. Le territoire de Tournus fut donné par le roi Charles II le Chauve à l’évêque de Mâcon en 854. L'évêque y fonda une abbaye augustinienne qu'il confia à l'abbé Radon et qui fut dédiée à Saint-Valérien. Le 18 mars 875, le même roi donna cette abbaye, ses dépendances et la ville de Tournus aux moines bénédictins de Saint-Philibert de Noirmoutier. L'évêque de Mâcon aurait été dédommagé. En mai 875, les moines de Saint-Philibert s’installèrent, non sans certains conflits, aux côtés des moines de Saint-Valérien. Le roi leur accorda un certain nombre de privilèges que le pape Jean VIII confirma en 876. À la suite d'un raid des Normands en 889, l'abbé Blitgaire restaura les remparts du castrum romain au sein duquel se trouvaient les bâtiments de l'abbaye. Il obtient également à cette époque du roi le droit de battre sa propre monnaie. Droit qui sera révoqué en 1316.

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Aux alentours de 936 ou 967, l'abbaye fut pillée par les Hongrois. Une nouvelle crise frappa l'abbaye en 945 lorsque le comte de Bourgogne imposa Gui comme abbé. Une partie des moines quitta alors l'abbaye en emportant les reliques de Saint-Philibert pour Saint-Pourçain-sur-Sioulle. En 949, un concile permit le retour à Tournus de ces moines qui ramenèrent les reliques de Saint-Philibert et ceux de Saint-Pourçain. En 960 fut élu l'abbé Étienne dont la tradition fait le constructeur de la première abbatiale. Les reliques de Saint-Valérien furent translatées avec son sarcophage au niveau de l'autel situé au fond de la crypte en 979 tandis que les reliques de Saint-Philibert furent déposées dans le chœur. Un incendie détruisit, en 1006, une partie des bâtiments de l'abbaye et le chevet de l'abbatiale. L'abbé Bernier, élu en 1008, entreprit la reconstruction du transept et du chevet qu'il entoura de cinq chapelles rayonnantes. Le nouveau chœur de l'abbatiale fut consacré par les évêques de Chalon-sur-Saône et de Mâcon le 29 août 1019.

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Le narthex

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La chapelle haute ou de Saint-Michel

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Dans la chapelle Saint-Michel

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Une chapelle

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Une chapelle

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L'abbé Ardain fit construire entre 1028 et 1056 l'avant-nef (narthex) et la chapelle supérieure dédiée à Saint-Michel. Son successeur, l'abbé Pierre 1er fit reconstruire entre 1066 et 1108 la voûte de la nef centrale. C'est sous son abbatiat, du moins avant 1087, que le moine Falcon rédigea la "Chronique de Tournus". Le pape Calixte II confirma en 1119 les nombreuses possessions de l'abbaye (270 étaient recensés à l'époque). Le 11 février 1120, ce même pape consacra l'abbatiale. En 1140, les reliques de Saint-Ardain furent translatées dans l'abbatiale.

plan abbaye
Plan de l'abbaye de Tournus

La salle capitulaire de l'abbaye fut reconstruite en 1239 pour devenir une salle longue de 16,20 m et large de 12 m. Geoffroy de Berzé fit construire en 1339 la chapelle du Saint-Sacrement dans le collatéral gauche. Alors que la ville de Tournus fut pillée par les Armagnacs en 1422, l'abbaye fut épargnée protégée par ces remparts. Ce pillage n’empêcha pas la construction l'année suivante de deux nouvelles chapelles dans le collatéral gauche et de la chapelle Saint-Vincent. Le roi Louis XI visita l'abbaye le 14 avril 1482. L'abbaye changea de statut en 1498 en passant sous le régime de la commende. Dorénavant, les abbés ne seront plus élus, mais seront nommés par le roi. L'abbaye entama alors son lent déclin. Au cours des guerres de religion, l'abbaye fut saccagée en 1562 par les huguenots qui détruisirent une partie des reliques des saints. Le cardinal François de La Rochefoucauld, abbé commendataire, supprima en 1627 l'abbaye en la sécularisant. Les moines bénédictins furent remplacés par dix chanoines et six demi-chanoines.

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La salle capitulaire

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La salle capitulaire

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Salle capitulaire

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Lors de la réfection du sol de l'abbatiale en 1722, on redécouvrit les mosaïques constituant le sol du déambulatoire du chœur et qui avait été recouvert d'un dallage. Peu avant la Révolution, en 1785, le collège de chanoines fut supprimé et l'abbatiale devint propriété communale en 1790. Entre décembre 1793 et mai 1794, l'abbatiale fut convertie en "Temple de la Raison", ce qui la sauva de la destruction. La statue de Notre-Dame la Brune fut sauvée des affres révolutionnaires par une paroissienne, madame Lassalle, qui la récupéra en prétextant la donner en jouet à ces enfants. Elle la restitua intacte lorsque l'abbatiale fut rendue au culte en 1802.

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Les mosaïques du déambulatoire

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Les mosaïques du déambulatoire

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Notre-Dame la Brune

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Notre-Dame la Brune

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Dans la crypte

Classée Monument historique en 1840, l'abbatiale connut une première campagne de restauration entre 1841 et 1851. À cette occasion, l'architecte Charles Auguste Questel reconstruisit le portail de la façade occidentale et l'escalier permettant l'accès à la chapelle Saint-Michel. Les services des Monuments historiques, avec l'architecte Ventre, procédèrent à un décapage des intérieurs entre 1908 et 1915. En 1927, la tour du Trésorier et les bâtiments claustraux furent classés Monuments historiques. L'ancienne enceinte de l'abbaye le fut l'année suivante. Le logis abbatial, la salle capitulaire et le réfectoire des moines furent classés en 1951.

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Le logis abbatial

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Le logis abbatial

gisant Simone de Berzé
Le gisant de Simone de Berzé
décédée en 1327

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Benitier

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Une des chapelles

L'abbatiale présente une apparence massive et fortifiée. Le plan adopte une structure basilicale classique à trois vaisseaux, avec transept non saillant, chœur à déambulatoire et chapelles rayonnantes. La façade occidentale est encadrée de deux hautes tours rectangulaires, percées de meurtrières, qui rappellent la vocation défensive du lieu à une époque troublée. Le portail est précédé par un narthex, ou avant-nef, vaste porche voûté sur trois travées, qui sert de transition monumentale entre l’extérieur et la nef. Il est surmonté de la chapelle Saint-Michel, accessible depuis l’intérieur par un escalier en colimaçon, et qui domine toute la partie occidentale de l’église. Ce porche monumental joue un double rôle : espace d’accueil liturgique et élément de défense, dans le contexte des incursions et instabilités du tournant de l’an Mil.

plan abbatiale

narthex 2
Le narthex

narthex 1
Le narthex

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La chapelle Saint-Michel

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La chapelle Saint-Michel

La nef constitue le cœur architectural de l’abbatiale. D’une hauteur de près de 18 m, elle se compose de cinq travées, chacune couverte d’une voûte en berceau transversal, une rareté dans l’architecture romane. Ces voûtes ne sont pas disposées longitudinalement comme c’est l’usage, mais transversalement, créant ainsi une succession rythmée de volumes. Elles reposent sur de puissants arcs diaphragmes retombant sur de massifs piliers cylindriques. Ce dispositif, à la fois novateur et ingénieux, permet une meilleure répartition des charges et autorise l’ouverture de fenêtres hautes dans les murs latéraux, apportant une luminosité remarquable pour une église romane. Le transept, peu saillant, s’ouvre sur un chœur surélevé entouré d’un déambulatoire voûté d’arêtes, qui dessert cinq chapelles rayonnantes, inscrites dans un plan en hémicycle. Cette disposition, inspirée des grandes abbayes carolingiennes, permettait de faire circuler les fidèles autour du sanctuaire sans troubler les offices. Se trouvant sous le chœur, la crypte en reprend le plan. Sombre, silencieuse, soutenue par de courts piliers et couverte de voûtes basses, elle abrite la tombe supposée de Saint-Philibert. Datée de la fin du Xsiècle, elle est la partie la plus ancienne de l’édifice. La longueur totale de l'abbatiale est de 76,80 m pour une largeur de la nef de 18,75 m (5,50 + 7,75 + 5,50). Le transept a une largeur de 26,77 m.

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La nef vue depuis la chapelle Saint-Michel

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La nef vue depuis la chapelle Saint-Michel

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Le choeur

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Le déambulatoire de la crypte

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La crypte

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La crypte

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Chapelle de la crypte

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Fresque dans la crypte

L’édifice présente un décor sculpté réduit à l’essentiel. Les chapiteaux sont très sobres, voire inexistants dans la nef. Le parement est en calcaire local, avec des éléments en grès rose pour les claveaux. L’harmonie des volumes, la robustesse des formes et la clarté des lignes confèrent à l’ensemble une solennité saisissante. Les bandes lombardes sur les élévations extérieures et les arcs aveugles du chevet renvoient à des influences méridionales (Italie du Nord), preuve d’un brassage culturel actif à cette époque dans l’espace bourguignon. Le sol du déambulatoire était orné d'une mosaïque exceptionnelle, datée du XIIsiècle, représentant les signes du zodiaque associés aux travaux des mois, dans une iconographie inspirée de l’Antiquité tardive. Des vestiges de fresques gothiques et romanes, et les mosaïques damier aux voûtes témoignent d’un décor liturgique et médiéval.

reliquaire de Saint-philibert
Le reliquaire de Saint-Philibert

chapiteau 2

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Fresque de la crypte

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Le chœur de l'abbatiale

Autour de l’église s’organisaient les bâtiments conventuels de l’ancienne abbaye bénédictine : cloître roman (aujourd’hui disparu en grande partie), réfectoire des moines, salle capitulaire, logis abbatial, etc.

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Le cloitre

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Le cloitre

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Le cloitre

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Le cloitre

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La salle annexe au narthex

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La salle annexe

Le réfectoire des moines est un large bâtiment rectangulaire de 42 m de longueur pour une largeur de 14 m. Cette grande salle sans séparation, construite au début du XIIsiècle, est couverte d'une voûte en berceau brisé. Utilisée au XVIIIsiècle comme chai, elle sert aujourd’hui de local pour des expositions ou des manifestations.

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Le réfectoire des moines

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Le réfectoire des moines

Ces photographies ont été réalisées en mai 2025.

 

Y ACCÉDER:

L'abbatiale est située au centre-ville de Tournus.

 



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Cette page a été mise en ligne le 11 juillet 2025

Cette page a été mise à jour le 11 juillet 2025