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Perché sur un éperon rocheux dominant la vallée de la Grosne, au cœur de la Bourgogne méridionale, le château de Brancion constitue l’un des ensembles castraux les plus évocateurs du Moyen-âge français. Sa silhouette austère et ses murailles escarpées racontent une histoire complexe, entre pouvoir seigneurial, conflits féodaux et intégration dans les États princiers puis royaux.
La tour et le logis de Beaufort
Le logis de Beaufort
Le logis de Beaufort
Le château de Brancion occupe un éperon rocheux à 408 m d’altitude, à la charnière du Mâconnais et du Clunisois, dominant la vallée de la Grosne. Il commande le passage entre Tournus et Cluny, sur un axe secondaire reliant la vallée de la Saône à la vallée de la Grosne. Le site se compose de deux monticules juxtaposés formant un éperon barré. Le premier monticule, le plus large, le plus bas et s’avançant vers l'ouest, est occupé par le village. Sur ces trois côtés, les pentes sont abruptes. Le deuxième, plus escarpé et plus haut, est occupé par le château. Il assure la liaison avec les collines adjacentes dont il est séparé par le fossé du château.
La tour de Beaufort
La tour de Beaufort
L'entrée du cellier
Le site fut occupé dès le VIe ou le VIIe siècle par un village et une nécropole mérovingienne. La grotte du Four de la Baume à proximité a même livré des traces d'occupation humaine remontant au paléolithique. La première mention connue du site date de 944, dans un acte relatif à des biens donnés à l’abbaye de Cluny sous le nom de Castellum Brancionis. Le château n'était alors probablement qu'une motte féodale avec une structure en bois. Les fouilles archéologiques et les vestiges muraux du logis montrent cependant une transformation en pierre très précoce (fin Xe - début XIe). Aux alentours de 927, Guillaume d'Aquitaine et comte de Mâcon (fondateur de l'abbaye de Cluny) donna à un de ses fidèles des terres entre La Roche-Vineuse et Brancion. Entre 927 et 960 apparaissent donc dans le secteur deux seigneurs (père et fils) du nom de Warnulphe Garoux. La fille de Warnulphe II épousa Génébaud de Neublans qui devint le propriétaire de Brancion au cours de la deuxième moitié du Xe siècle. Entre la fin du Xe siècle et 1096, quatre seigneurs de Neublans se succédèrent à Brancion. Lors de son départ pour la croisade en 1096, Hugues de Neublans confia le château à Bernard Gros d'Uxelles le seigneur voisin.
Le donjon
La tour de la Chaul
La tour de Longchamps
Au cours de la deuxième moitié du XIIe siècle l'accès au site fut considérablement renforcé par la construction des tours du Portier et de Beaufort de part et d'autre du passage existant entre le logis de Beaufort, au pied du château, et l'enceinte du village. Le logis de Beaufort fut érigé en 1150. À cette période, les seigneurs de Brancion qui rançonnaient les moines voyageurs et les pèlerins connurent de nombreux conflits avec les moines de Cluny au point qu'en 1172 le roi Louis VII dut intervenir. Il en fut de même en 1180 où le roi Philippe Auguste intervint dans le conflit avec Cluny. En 1200, l'accès au site fut muni d'une porte tandis que les conflits avec l'abbaye de Cluny persistèrent. Ce n'est qu'en 1237 que Josserand le Grand conclut une paix avec les moines. En 1248, il participa à la 7e croisade aux côtés du roi Saint-Louis. Josserand mourut en 1250 lors de la bataille de La Mansourah (Égypte). Son fils Henri III Gros de Brancion, pour payer les dépenses de son père, engagea les terres de Brancion comprenant pas moins de 25 villages dans le duché et le comté de Bourgogne auprès du duc Hugues IV de Bourgogne. En 1259, Hugues IV acquit la totalité du domaine pour la somme de 9000 livres. Brancion devient un château ducal, intégré dans l'appareil militaire des États bourguignons.
Le logis de Beaufort
L'Aula ou logis de l'an Mil
Vu en direction du puits
En 1300, l'entrée du site fut munie d'un avant-corps et une herse fut installée devant la porte. En 1370, Perrenot Saley employa 3000 grandes tuiles et 12 chars de laves pour couvrir les toits des tours, du logis de Beaujeu et du donjon. Entre 1396 et 1397, on procéda à la réfection du toit du donjon. En 1477, à la mort de Charles le Téméraire, dernier duc valois de Bourgogne, la majeure partie du duché de Bourgogne passa dans le domaine royal. Brancion devint une châtellenie royale que le roi Louis XI donna à Philibert de la Baume. En 1548, Jean III de Lugny devint seigneur "engagiste" de Brancion moyennant la somme de 6155 livres. Sa fille, Françoise de Lugny, épousa en 1558 François Chabot. Le château de Brancion servit de refuge en 1562 aux moines de Tournus fuyant les huguenots. À partir de 1680, Jean de Saulx-Tavannes, mari de Catherine Chabot, fille de François Chabot, fit de Brancion un point de résistance de la ligue catholique au cours des guerres de religion. En 1592, les troupes protestantes du comte Alphonse d'Ornano, lieutenant du roi Henri IV, s’emparèrent du village, mais échouèrent devant la résistance du château. Ce ne fut qu'en 1594 qu'une nouvelle attaque des protestants eut raison de la défense de Jean de Saulx-Tavannes. Le château connut alors la première prise de son histoire.
La tour de la Chaul et le logis de Beaufort
Le logis de Beaufort et la tour de la Chaul
Le château, devenu obsolète, fut par la suite déclassé. Il fut partiellement démantelé au XVIIe siècle et ses pierres réutilisées dans le village. En 1701 à la mort de Claire-Françoise de Saulx-Tavannes, le château passa aux mains de la famille de La Baume-Montrevel. À l'extinction de cette famille en 1759, le château fut concédé à René Molineau, avocat au Parlement de Dijon. Au XVIIIe siècle, les archives évoquent un "château ruiné". Le 11 septembre 1793, il fut vendu comme bien national au Sieur Forest qui le légua à sa fille en 1829. Celle-ci le vendit en 1844 au commandant de La Roque de Chanfray. Le comte Victor de Murard de Saint-Romain en fit l'acquisition en 1860. Classée Monument historique en 1977, la gestion du château fut confiée en 2005 par la famille de Murard à l'association "La mémoire médiévale" par un bail de 50 ans. En 1979, l’Association entama un vaste programme de restauration et de mise en valeur du site, aujourd’hui ouvert au public.
La tour du Préau
Le logis ducal
La tour de la Chaul
L'escalier accolée au logis de Beaufort
Le château de Brancion s’étend sur un site allongé, protégé par trois enceintes successives et dominé par un donjon rectangulaire imposant. Il est séparé des collines adjacentes par un imposant fossé de 10 à 15 m de largeur et profond de 6 m (dimensions actuelles). Au niveau de la défense, nous trouvons l'enceinte basse accessible par la poterne et assurant une défense passive par talus. L'enceinte médiane comprend des tours semi-circulaires (XIIIe), le puits central et les courtines. L'enceinte haute comprend les tours de guet (Tour Gaîte), le donjon roman et le logis noble. Ce dispositif dit "à enceintes concentriques" permettait un repli défensif par étapes, principe typique des forteresses bourguignonnes du XIIIe siècle.
Le fossé
La poterne
La poterne
La poterne
Le logis de l’An Mil est sans doute l’un des rares logis civils du Xe siècle encore debout en Bourgogne. Ce bâtiment en pierre de 22 m sur 11 m, avec son mur en opus spicatum (appareil en arêtes de poisson), servait de salle de réception, avec un foyer central et de petites ouvertures pour la lumière. Un deuxième niveau fut rajouté au XIIe siècle avant qu'il ne soit partiellement détruit au XIIIe siècle et incorporé au mur d'enceinte lors de la construction du logis de Beaujeu.
L'Aula ou logis de l'an Mil
L'Aula ou logis de l'an Mil
Le logis de Beaufort est un corps du XIIIe siècle flanqué de la tour de Beaufort et de la tour de la Chaul en demi-cercle (ouverte en gorge). Le corps du logis fut transformé en 1860 par l'ouverture de quatre grandes fenêtres et la mise en place d'une galerie. La tour de Beaufort d'un diamètre de 6,50 m possède des murs d'une épaisseur de 1,50 m.
Le logis de Beaufort
Le logis de Beaufort
Le logis de Beaufort
Le logis de Beaufort
Le donjon, construit vers 1150, est un ouvrage massif de près de 18 m de haut, aux murs d'une épaisseur de 2 m, sans ouvertures à la base. Il a une base carrée de 9,90 m de côté et comprend quatre niveaux. Un rez-de-chaussée aveugle servant de stockage pour les provisions, un premier étage, nommé salle de retrait, réservé au seigneur, un deuxième étage, dit salle des gardes, et une plateforme supérieure servant au guet. Le linteau de la cheminée de la salle de retrait est orné d'un texte racontant la mort à la croisade de Josseron. Dans cette salle se trouve également une peinture murale dont la légende indique "Monseigneur Josseron de Brancion avec ses chevaliers portant moult riches dons à Monseigneur Hugues VII de Courtenay, Abbé de Cluny". L'entrée initiale se faisait par une porte située à 6 m de hauteur, accessible par une échelle ou un escalier mobile. Aujourd’hui, on y accède par un escalier moderne. La plateforme supérieure offre une vue spectaculaire sur la vallée. La tour du Préau à des caractéristiques identiques au donjon.
Le donjon
Le donjon
Le donjon
La cheminée de la salle de retrait du donjon
La peinture murale du donjon
Les latrines de la tour des latrines
La tour du Préau
Le logis de Beaujeu fut édifié au XIVe siècle par les ducs de Bourgogne ou leurs lieutenants. Il s'agit d'un bâtiment de 25 m sur 11,80 m inséré entre le donjon et la tour du Préau. Ce logis résidentiel de deux niveaux illustre le raffinement bourguignon avec ses grandes cheminées, ses baies polylobées et ses fenêtres à coussièges. Il reflète la transition d’un château purement militaire vers une demeure noble plus confortable.
Le logis de Beaujeu
Le logis de Beaujeu
Le logis de Beaujeu
Le logis de Beaujeu
L’église Saint‑Pierre de Brancion
Une première mention de l’église dédiée à Saint‑Pierre apparaît dès 964 dans une charte de l’abbaye de Cluny. Son appartenance directe à l'abbaye de Cluny est confirmée en 1004 par Hugues de Semur. Ce statut est confirmé par une bulle du pape d’Alexandre III en 1180 qui mentionne une "Ecclesima de Branciduno". L’édifice actuel fut bâti au XIIᵉ siècle sur des vestiges mérovingiens, dont un cimetière et des murs mis au jour lors des fouilles de 2003. Elle fut classée monument historique en 1862. Une première campagne de restauration fut réalisée en 1889.
Construite en pierre de taille (calcaire ocre) selon un plan en croix latine, elle possède une nef à cinq travées flanquées de deux bas-côtés, un transept saillant, une abside et deux absidioles semi‑circulaires. La toiture est recouverte de lauzes, avec un clocher carré surmontant la croisée du transept. La façade ouest est sobre, s’ouvrant sur un portail encadré d’un arc brisé et surmonté d’un pignon agrémenté d’une croix, ainsi que de trois baies en plein cintre. La nef sombre, sans fenêtres hautes, est voûtée en berceau brisé reposant sur quatre arcs-doubleaux, soulignés par des dosserets et impostes. Les bas‑côtés présentent des voûtes variées : demi‑berceaux, berceaux sur doubleaux, témoignant d’évolutions techniques durant la construction. Le transept est voûté d’une coupole à trompes (coupole barlongue), supportant le clocher. Celui-ci est une tour carrée de deux étages disposés sur le flanc sud de la travée de chœur avec un accès par escalier intérieur. L'église a une longueur de 26,50 m pour une largeur de la nef de 6,50 m.
Le chœur et l’abside sont décorés de fresques datées de la troisième partie du XIIIe siècle et découverts en 1984 sous des enduits modernes. Dans l'abside principale est représenté un Christ en majesté entouré des Évangélistes. Dans la travée du chœur se trouve un jugement dernier avec la résurrection des morts. Dans l'absidiole nord nous pouvons distinguer la nativité, le couronnement de la Vierge, un agneau pascal dans un médaillon et la crucifixion. Les fresques de l’absidiole sud illustrent un groupe de pèlerins se dirigeant vers le Saint‑Sépulcre et une femme et des hommes écoutant un lecteur. Dans la dernière travée du bas-côté nord est représenté Abraham assis et dans la troisième travée se trouve une mise au tombeau d'une religieuse ou d'une sainte. Plusieurs campagnes de restauration en 1930, 1960, 1975 et 1999 ont permis de sauvegarder ces décors.
Le gisant de Josserand III de Brancion (mort en 1250 durant la 7ᵉ croisade en Égypte) repose dans la cinquième travée nord. Il est représenté allongé, mains jointes, avec un chien à ses pieds et deux anges à la tête.
Le gisant de Josserand III de Brancion
Dalle funéraire dans l'église
Dalle funéraire dans l'église
Halle des Marchands
Cette halle de 17 m de longueur et de 9,50 m de largeur possède une remarquable charpente soutenue par huit poteaux. Elle fut construite au cours du XVe siècle.
Les photographies ont été réalisées en mai 2025.
Sources consultées pour cet article :
Consulter la page "Bibliographie" de ce site
Site internet
Wikipédia
Brancion, castrum, village et château : une relecture de l’évolution du site (VIe-XVIIe siècle) à la lumière des données archéologiques récentes (commune de Martailly-lès-Brancion, Saône-et-Loire) par Benjamin Saint-Jean Vitus dans Archéologie du Midi Médiéval Année 2018 36
Archéologie en Bourgogne Brancion : Archéologie d'un site perché (Saône et Loire) par Benjamin Saint-Jean Vitus Publication de la DRAC Bourgogne – Service Régional de l’Archéologie.
Château de Brancion Dossier pédagogique enseignants La mémoire médiévale, Château de Brancion, 71700 Martailly-lès-Brancion.
L'église de
Brancion par Jean Virey dans Bulletin Monumental Année 1909
Site internet du château de Brancion
Y ACCÉDER:
Le village médiéval de Brancion se trouve sur la D14 reliant Tournus à Cormatin. Le village est entièrement piéton. Un parking est situé au niveau du chemin d’accès. La visite du château est payante.
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
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Cette page a été mise en ligne le 15 juillet 2025
Cette page a été mise à jour le 15 juillet 2025