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Dressé sur un éperon volcanique battu par les vents du Massif du Sancy, le château de Murol semble jaillir de la roche noire comme une excroissance minérale façonnée par la main de l’homme. Perché à plus de 900 mètres d’altitude, il domine les forêts profondes, les pâturages et les lacs d’Auvergne d’une silhouette à la fois austère et majestueuse. Le site, choisi pour son inaccessibilité, épouse une avancée de basalte dont les parois plongent à pic, offrant à la forteresse une assise naturelle aussi redoutable que spectaculaire.
Au VIe siècle Grégoire de Tours parle de la présence d'un castrum romain (Meriocalum castrum) à cet emplacement. Castrum qui aurait été assiégé et conquis par Théodoric le Grand (455 – 526). À cet emplacement fut érigé, au cours du XIe siècle, un château destiné à contrôler un croisement de trois routes régionales importantes. Ce château aurait appartenu à Amblard Comptor d'Apchon qui le transmit à son fils, Armand. Le fils d'Armand, Bertrand, prit, vers 1100, le nom de seigneur de Chambe. La première mention du château apparaît dans les textes en 1254. Le château est alors aux mains de Jean Chamba, vassal de l’évêque de Clermont-Ferrand. Jean Chamba ayant perdu ses trois fils, le château passa aux mains de Guillaume San lors de son mariage, en 1284, avec Surianne, la fille de Jean. Guillaume San prit alors le nom de Murol. En 1384, Guillaume II de Murol (1350 - 1440) épousa Odine de Saint-Nectaire. Sa dot fit de lui un des seigneurs les plus riches d'Auvergne. Il chargea Pierre Celeyrol de la restauration du château, ruiné par les guerres contre les Anglais. Guillaume II épousa en 1392 Guyote de Tournon, la fille de Guillaume III de Tournon et d'Alix d'Uzès. En 1415, il fit adjoindre à la chapelle du château, une chapelle funéraire destinée à sa famille. À sa mort, en 1440, le château passa à son fils Jehan, échanson et chambellan du duc Jean de Berry.
Le château haut
L'entrée de l'enceinte de la basse-cour
Enceinte de la basse-cour
Le château haut
Sa fille, Jehanne de Murol, apporta le château en dot lors de son mariage à Gaspard d'Estaing, sénéchal et gouverneur du Rouergue. Celui-ci fit reconstruire les logis du château. François 1er d'Estaing (1519 – 1585) modifia profondément la défense du château pour l'adapter aux armes à feu. Vers 1574, il fit ériger une vaste enceinte bastionnée avec des tours en amande et fit construire les logis renaissance sur la façade est. Son fils, Jean III d'Estaing (1540 – 1621), fut un des principaux représentants de la ligue en Auvergne. Durant les guerres de religion, il participa à la bataille de Cros-Rolland, en 1590, puis s'empara de plusieurs places en Auvergne. Le château, refortifié, repoussa en 1592 un assaut des royalistes. Jean III se rallia en 1594 au roi Henri IV. Un nouveau siège du château eut lieu en 1632. En 1635, le château échappa aux démantèlements des forteresses ordonnés par Richelieu du fait du prestige de la famille d'Estaing.
Le château haut
Les anciennes écuries
Le château fut vendu à l’évêque de Clermont-Ferrand en 1770. Le château fut alors laissé à l'abandon. Épargné par la Révolution en 1789, il servit un temps de prison puis de repaire de brigands avant de devenir une carrière de pierre. En 1830, le dernier propriétaire, le comte Henri-Guillaume de Chabrol, céda la ruine au département du Puy-de-Dôme. Bien que classé Monument historique en 1889, le château, abandonné, fut pillé et ruiné par vandalisme. La commune de Murol en devint propriétaire en 1953. Une importante campagne de restauration entre 1998 et 2002 en permit l'ouverture au public. En 2008, des ossements furent retrouvés dans une crypte du château. Il s'agit très certainement des restes de Guillaume de Murol.
Le logis Renaissance
Le logis Renaissance
Le logis Renaissance
Les anciennes écuries
Le château édifié sur un piton basaltique inspira de nombreux artistes. Guy de Maupassant évoqua la ruine dans son ouvrage "Humble drame" en 1883. L'abbé Boudal, archéologue, lettré et peintre, rassembla autour de lui à Murol, entre 1910 et 1930, divers artistes. Il forma avec une cinquantaine de peintres (Boudal, Charreton, Terlikowski, Bargoin, etc) ce qui fut appelé l’école de Murol. Jean Fernand Trochain représenta le château sur sa toile "Le château de Murol en hiver". Le château servit en 1955 de décor pour le film "Gas-Oil" avec Jean Gabin (dialogue d'Audiard). En mars 2019, des scènes de "Kaamelott : premier volet" y furent tournées par Alexandre Astier.
Le chemin de ronde
Le chemin de ronde
Le chemin de ronde
La haute-cour
Le château de Murol est édifié sur un piton basaltique formant une plate-forme sommitale escarpée sur ses versants est, sud et ouest et présentant une pente plus accessible au nord-est. C'est à cet endroit que furent implantées la porte principale et la rampe d’accès. Le bâti s’enroule autour de l’échine du rocher, suivant ses contours irréguliers dans une logique d’adaptation plus que de domination. L’enceinte extérieure, ajoutée au XVe siècle, forme un premier rempart polygonal percé de canonnières et flanqué de bastions semi-circulaires, conçue avec leurs embrasures basses, taillées dans l’épaisseur du mur, pour accueillir les premières pièces d’artillerie. De forme polygonale irrégulière, cette enceinte possède des courtines épaisses (1,50 à 2 m), maçonnées en moellons de basalte reliant entre eux les bastions semi-circulaires, ouverts à la gorge.
Le logis Renaissance
Le logis Renaissance
Le logis Renaissance
Cette ceinture défensive conduit, par une rampe savamment tracée dans la pente nord-est, à la porte d'honneur du château. Protégée autrefois par un châtelet, un assommoir et sans doute un pont mobile, elle ouvrait l’accès à la cour haute, cœur vivant de la forteresse. De là s’élève l’enceinte intérieure, aux murs puissamment maçonnés, ponctués de mâchicoulis sur consoles et surmontés d’un chemin de ronde crénelé. Cette enceinte épouse la ligne de crête du rocher avec une rigueur organique. On accède par un escalier de pierre à flanc de paroi à la porte d'entrée de la cour haute. Cette porte est ornée des armes des seigneurs du château. L’écu des Murol, à gauche, et l'écu des d'Estaing, à droite, entourent les armes des époux Jehanne de Murol et Gaspard d'Estaing surmontés d'un heaume soutenu par deux griffons.
Le grand escalier
La poterne
La poterne
La porte du baron d'Estaing
La porte du baron d'Estaing
La porte du baron d'Estaing
La haute-cour
La cour haute concentre les bâtiments les plus anciens et les plus nobles : le donjon, les logis seigneuriaux, la cuisine, le cellier et tout ce qui faisait d’un château non seulement une forteresse, mais un lieu de vie et de pouvoir. La pièce maîtresse est la tour de Chautignat, tour circulaire de 10 m de diamètre extérieur et d'environ 25 m de haut. Sa base, large et aveugle, semble faire corps avec la roche. L’entrée ne se trouvait pas au sol, mais à l’étage, accessible autrefois par une échelle ou une passerelle escamotable. Construit en basalte brut, percé de rares ouvertures, le donjon servait à la fois de tour de guet, de dernier réduit défensif et d’appartement seigneurial. À l’intérieur, un escalier à vis permet le passage d'un étage à l'autre. Pour faciliter son usage résidentiel, les fenêtres étroites furent élargies au XVe siècle. C'est au premier étage de cette tour que Guillaume de Murol installa son "étude" d'où il administrait son domaine. Cette pièce rectangulaire possède une cheminée monumentale, une baie bordée de coussièges, des armoires fermées par des vantaux en bois ainsi que des latrines disposées en encorbellement et dissimulées derrière une porte. Le deuxième étage était occupé par la "salle des gardes" également munies d'une cheminée et de latrines. De cette salle, on pouvait rejoindre le chemin de ronde protégé derrière un parapet crénelé. Le chemin de ronde fait le tour de la cour haute.
La chapelle de la tour Chautignat
La chambre de Guyote de Tournon
La chambre de Guyote de Tournon
La chambre de Guyote de Tournon
Dans "l'étude" de Guillaume de Murol
La salle de banquet
La table du seigneur dans la salle de banquet
La haute-cour
Tour d'escalier du logis
La tour nord-est de l'enceinte de la basse-cour
Adossés à la paroi sud et au donjon, les logis seigneuriaux (corps de bâtiment en L) furent bâtis au tournant des XIVe et XVe siècles. Élevés sur deux niveaux, ils accueillaient les cuisines voûtées et les réserves et, à l’étage, les appartements du seigneur et de sa famille. Au rez-de-chaussée, à proximité de la tour de Chautignat, se trouve la salle d’apparat ou salle du banquet où le seigneur recevait ces invités. Dans les chambres à l'étage, le décor est plus raffiné avec des fenêtres à meneaux, des coussièges de pierre et des cheminées monumentales. Dans le logis, la plupart des voûtes sont effondrées, mais parfaitement identifiable. Certains murs étaient enduits et peints. Des escaliers à vis sans noyau reliaient les étages. La chambre de Guyote de Tournon a été reconstituée avec du mobilier adapté aux déplacements fréquents auxquels s'adonnaient les nobles de l'époque. Ces meubles étaient transportés de château en château au gré des déplacements du seigneur.
La salle d'apparat
Tour d'escalier du logis
Reste de cheminée dans le logis
La salle d'apparat
La cuisine conserve ses plans de travail maçonnés, son évier creusé dans le mur et sa cheminée avec son conduit de fumée intégré aux murs. La boulangerie, attenante à la cuisine, conserve encore son vaste four à pain et un petit four à pâtisserie. Le pain était, au XVe siècle, l'aliment de base. On en consommait plus d'un kilo par jour et par personne. Dans la boulangerie se trouve également une petite pièce, nommée le charnier, servant à conserver le lard et autres jambons.
Les cuisines
Les cuisines
La boulangerie
La haute-cour
Les communs, écuries, celliers, greniers étaient adossés aux murs d’enceinte, tirant parti des décrochements du terrain. Le cellier et les réserves sont à demi enterrés dans le rocher. Utilisé pour conserver les biens issus des redevances en nature ou les productions du domaine, on y trouve une série de barriques de vin. À l'époque, on en consommait environ 2 litres par jour et par personne. On y conservait également dans des jarres l'huile, le sel et les viandes en saumure. Un puits (profondeur estimée entre 25 à 30 m) creusé dans le rocher, au centre de la cour, garantissait l’approvisionnement en eau en cas de siège.
Le cellier
Le cellier
Le cellier
Le puits
Le château possède deux chapelles jumelées situées à l’est du logis. La plus ancienne était l'église paroissiale. Elle est composée d'une nef unique de trois travées et d'un chœur semi-circulaire. Elle est voûtée d’ogives à clef sculptée, et est éclairée par des fenêtres gothiques à remplage trilobé. Guillaume de Murol fit ériger une seconde chapelle entre 1412 et 1418 dotée d'une crypte destinée à accueillir sa sépulture.
La chapelle
La chapelle
La chapelle
Dans la galerie voûtée ouverte sur la cour haute est exposée une couleuvrine découverte en 1984 dans les anciennes écuries du château situé dans la basse-cour. Classé Monument historique en 2008, il s'agit d'un canon en bronze portant les armes du seigneur de Murol et la date de 1574. Long de 2,18 m, il pèse 199 kg. Il porte également l'inscription "je suis à NOBLE FRANCOIS DESTAIN" et "JEHAN JOLI / FONDEUR / MAFAICT".
Le canon
La galerie voûtée
Ces photographies ont été réalisées en juin 2025.
Y ACCÉDER:
L'accès au château de Murol est fléché au village de Murol. Sa visite est payante.
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
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Cette page a été mise en ligne le 2 septembre 2025
Cette page a été mise à jour le 2 septembre 2025