L'église Santo Antonio

L'igreja de Santo Antonio serait édifié sur l'emplacement de la maison natale de Saint-Antoine de Lisbonne qui est également Saint-Antoine de Padoue. Saint-Antoine étant le protecteur des mariages et de la fertilité, la tradition veut que les jeunes gens qui ont l'intention de se marier visitent l'église et y déposent des fleurs.

Né à Lisbonne en 1195, Fernando Martins de Bulhões, issu d’une famille noble, entra jeune chez les chanoines réguliers de Saint-Augustin. En 1220, touché par le martyre de cinq franciscains revenus du Maroc, il rejoignit l’ordre de Saint-François et prit le nom d’Antoine. Son parcours l’amena en Italie, où son éloquence et sa profonde érudition lui valurent une réputation de prédicateur hors pair. Mort en 1231 à Padoue, il fut canonisé dès 1232 par le pape Grégoire IX. À Lisbonne, on le connaît comme Santo António de Lisboa, patron de la capitale et des amoureux, célébré chaque 13 juin. Peu après cette canonisation, une chapelle fut construite à côté de sa maison natale. Cette maison natale fut occupée à partir de 1326 par la municipalité de Lisbonne. À partir de 1493, la maison reçut le privilège de dépendre directement du Saint-Siège, ce qui l’exemptait de la juridiction ordinaire. Le roi Joao II ordonna en 1495 que la chapelle soit remplacée par une église plus importante. En 1730, sous le règne fastueux du roi João V, le sanctuaire est profondément remanié. On érigea une façade monumentale et on renforça la structure, en marquant la volonté d’en faire un centre spirituel majeur de la capitale.

Le tremblement de terre de Lisbonne de 1755 détruisit presque entièrement l’édifice, ne laissant que la chapelle mère (le chœur principal) intacte. La reconstruction commença en 1767 selon le plan de l’architecte Mateus Vicente de Oliveira, et dura jusqu'en 1812, adoptant un style baroque tardif pombalin. La reconstruction fut partiellement financée par les enfants de Lisbonne qui quêtèrent des pièces dans la rue pour un "tostãozinho", un petit sou pour Saint-Antoine. Le sol de la crypte est d'ailleurs recouvert de pièces de monnaie données par les fidèles à cette occasion. L'église fut classée Monument national en 1910.

L’église présente un plan en croix latine à nef unique, couverte d’une voûte en berceau à caissons de stuc. Le transept légèrement saillant ouvre sur un chœur profond, richement décoré. Les bas-côtés ont été remplacés par des chapelles latérales, logées dans l’épaisseur des murs. L’emploi de la pierre de lioz, marbre local clair, confère à l’ensemble une élégance discrète et une belle luminosité. La façade principale, d’un classicisme équilibré, s’organise sur deux registres, au rez-de-chaussée, un portail encadré de pilastres ioniques et surmontés d’un fronton brisé, à l’étage, une large fenêtre en plein cintre flanquée de volutes et surmontée d’un fronton triangulaire. Les deux clochers jumeaux latéraux, coiffés de dômes baroques, donnent à l’ensemble une silhouette équilibrée, typique du style post-pombalin. Un escalier en éventail précède la façade, soulignant la pente du terrain et créant un parvis scénique dominant la rue.

La nef, d’une grande clarté, est rythmée par des pilastres d’ordre corinthien. Les murs sont ornés de marbres polychromes (rose, vert, gris) et de stucs dorés. Les voûtes présentent un décor d’arabesques et de rosettes. Le maître-autel abrite la statue de Saint-Antoine en bois doré, œuvre du XVIII^e siècle, rescapée du séisme. Derrière, un retable monumental en marbre et bois sculpté encadre un tableau représentant la Vision de l’Enfant Jésus par le saint. Chaque chapelle latérale est dédiée à un thème antonien, Saint-Antoine prêche aux poissons, Saint-Antoine rend un enfant à sa mère, Saint-Antoine et le miracle du cœur de l’avare, etc. Ces scènes sont représentées par des toiles du peintre Pedro Alexandrino de Carvalho (1730-1810), l’un des principaux artistes de l’époque pombaline. La sacristie est décorée d’azulejos bleus et blancs de la Real Fábrica do Rato (fin XVIII^e siècle) illustrant des épisodes de la vie du saint et des vues idéalisées de Lisbonne avant le séisme. Sous le chœur se trouve une crypte voûtée correspondant au sous-sol de la maison présumée où Saint Antoine serait né. Un autel y fut installé dès le XV^e siècle et on y conserve une pierre ancienne marquée comme la "pierre du berceau". La crypte constitue aujourd’hui le cœur spirituel du sanctuaire, où les fidèles déposent des ex-voto, y prient pour les couples, et jettent encore des pièces en souvenir du "tostãozinho".