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L'abbaye de la Lucerne

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L'abbaye de la Très Sainte Trinité de la Lucerne fut fondée en 1143 par Hasculphe de Subligny, seigneur de Subligny, et son frère, Richard, évêque d'Avranches. L'abbaye fut implantée sur les terres d'Hasculphe au lieu nommé Coubefosse dans la vallée du Thar. La petite abbaye fut confiée à la charge du prieur Tancrède et à quelques chanoines. En 1144, à la mort de Tancrède, son successeur, le frère Tescelin, fit déplacer la communauté en aval sur un terrain donné par Guillaume de St-Jean, seigneur de St-Jean-le-Thomas. Le frère Tescelin décéda en 1157. En 1161, les chanoines de la Lucerne fondèrent l'abbaye d'Ardenne près de Caen. Guillaume de St-Jean donna la même année à l'abbaye, l'église de St-Jean-de-Thomas et les revenus qui y était rattachée. L'année suivante, Guillaume de St-Jean, sa femme Olive de Penthièvre (fille d'Étienne 1er comte de Penthièvre, comte de Suffolk et seigneur de Richmond), veuve d'Henri, baron de Fougères et Robert de St-Jean donnèrent à l'abbaye le terrain où fut définitivement bâti l'abbaye actuelle. Ils confirmèrent les donations faites par Hasculphe de Subligny. L'abbaye était alors dirigée par l'abbé Angot.

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En 1171 débuta la construction de l'abbatiale où fut inhumé l'évêque d'Avranches, le bienheureux Achard de Saint-Victor qui décéda cette année. L'église fut consacrée en 1178 par l'évêque Richard, successeur d'Achard. L'abbé Angot décéda en 1206 et fut inhumé dans la nef de l'abbatiale. Le XIIIe siècle fut l'âge d'or de l'abbaye. Elle reçut de nombreuses donations et privilèges des rois de France et d'Angleterre, des archevêques de Rouen, des évêques de Coutances et d'Avranches et des seigneurs voisins. À l'époque, les chanoines remplacèrent les baies du chevet de l'église par de grandes fenêtres et à la fin du XIIIe, les chapelles du transept furent agrandies. En 1300, les gisants des seigneurs de Beauchamp, bienfaiteurs de l'abbaye furent déposé dans la chapelle du transept. Au cours du XIVe siècle, la façade de l'abbatiale fut modifiée. La guerre de Cent Ans provoqua également son lot de destruction. Au cours de la 2e moitié du XVe siècle, la nef de l'abbatiale ruinée fut couverte d'une charpente en bois. Entre 1463 et 1493, l'abbé Richard 1er de Laval remplaça le cloitre en bois par un cloitre de pierre. En 1507 eut lieu l'élection de l'abbé François Caignon qui fit construire le 1er logis abbatial.

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Le cloitre

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Le refectoire

Au cours du XVIe siècle, l'abbaye tomba en commende (revenu perçu personnellement par un ecclésiastique ou un laïc nommé par le roi). En 1596, Henri IV nomma l'abbé Jean de la Beslière à la tête de l'abbaye. Vivant dans l'abbaye selon la règle de St-Norbert, il fit restaurer les voutes de l'abbatiale, les bâtiments conventuels et fit installer le maitre autel. À sa mort en 1630, son neveu François lui succéda et poursuivit la restauration jusqu'à sa mort en 1656. En 1672, les chanoines rachetèrent le droit de nomination de l'abbé au trésor royal. L'abbé Jean Etheart, élu en 1700, fit reconstruire le cloitre en granit bleu de Carolles. Son successeur, en 1712, l'abbé Hyacinthe des Noires-Terre fit construire le grand bâtiment reliant le réfectoire au bras sud du transept (disparu aujourd'hui), à l'emplacement de l'ancien dortoir médiéval et de la salle capitulaire. L'abbé Jean Baptiste Pellevé (1727-1747) fit reconstruire le logis abbatial et le parc en 1740.

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Le gisant du Bienheureux Achard

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Le gisant de Jean de la Mouche

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Le gisant d'Hasculphe de Subligny

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Le gisant de Guillaume de St-Jean

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Le gisant de Richard 1er de Subligny

L'abbaye fut fermée et les chanoines renvoyés en 1790. L'abbaye fut vendue comme bien national au seigneur voisin Léonor Claude de Carbonnet de Canisy et à sa femme, Henriette de Vassy, qui hérita, en 1795, de la terre et du château de Brécey. L'abbaye fut revendue en 1799 à Louis Gallien, négociant-armateur à Granville. Il la transforma en filature de coton. Pour cela, il fit construire un aqueduc dans le parc pour alimenter la roue à aubes entrainant les machines. Après la faillite de la filature, l'abbaye servit de carrière de pierre. Victor Bunel (1804-1869), receveur des finances, époux de Marie-Amélie Gallien, fille de Louis, hérita de l'abbaye. En 1834, Victor Bunel installa une marbrerie dans les bâtiments. Celle-ci fonctionna jusqu'en 1870. Sa fille Nelly épousa le peintre Paul Dubufe. Une de leur fille, Gabrielle Dubufe, épousa, en 1890, Émile Decauville, l'inventeur des trains à voie étroite Decauville. Les Decauvilles restèrent les propriétaires de l'abbaye jusqu'en 1959. L'abbatiale et le cloitre furent classés Monument historique en 1928. Les ruines furent rachetées en 1959 par l'abbé Marcel Lelégard (1925-1994) qui en entreprit la restauration. La même année, le bâtiment attenant au cloitre fut classé Monument historique. Le logis de l'abbé le fut en 1964 et les granges en 1986.

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L'entrée de l'abbaye

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La maison de l'abbé

L'abbatiale a une forme de croix latine avec un chœur profond de deux travées et un chevet plat. La nef de sept travées est flanquée de deux bas-côtés étroits voutés en demi-berceau. La nef possède des piliers massifs de forme carrée et est voutée par des croisées d'ogives. Elle est éclairée par des fenêtres disposées en partie hautes au-dessus des bas-côtés. Le transept possède des bras carrés flanqués, à l'est, chacun de deux chapelles agrandis au XIVe et au XVIIe siècle. Le bras nord est éclairé par une grande baie alors que celui du sud donne accès au bâtiment conventuel. Le clocher surmonte le croisement du transept. Il s'agit d'une tour massive caractéristique de l'architecture normande de l'époque gothique. La première pierre fut posée en 1164. Lors de sa consécration en 1171, le chœur, le transept, les deux premières travées de la nef et le niveau inférieur du clocher étaient achevés. La nef et la façade le furent en 1178. Il faudra attendre 1200 pour le clocher. La façade fut endommagée et la nef s'effondra durant la guerre de Cent Ans. Elle fut restaurée en 1400. La nef s'effondra à nouveau en 1837 et la voute du chœur le fit en 1947. Au cours du XIXe siècle, les deux travées du bas-côté sud, côté façade, furent transformées en forge. L'abbatiale fut reconstruite entre 1985 et 2003.

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La nef de l'abbatiale

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Le choeur de l'abbatiale

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L'orgue de l'abbatiale

Le cloitre de l'abbaye fut reconstruit à quatre reprises. Le premier, construis au XIIe siècle, fut détruit durant la guerre de Cent Ans. Il fut remplacé par un cloitre provisoire en bois. Celui-ci laissa la place au troisième cloitre construit en pierre à la fin du XVe siècle. Le quatrième fut construit au début du XVIIIe siècle en granit bleu de Carolles. Il fut détruit durant la période industrielle de l'abbaye. Il en subsiste des éléments dans l'angle nord-ouest.

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Vestige du cloitre

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Vestige du cloitre

Le bâtiment des hôtes était affecté aux frères convers qui étaient dispensés de l'assiduité aux offices. Il se composait d'un réfectoire, au rez-de-chaussée, et d'un dortoir au 1er étage. L'épidémie de peste de 1348 conduisit à la diminution du nombre de frères convers qui furent alors remplacés par des "Donnes", laïques au service de l'abbaye en échange du gite et du couvert, et par des domestiques salariés. Le bâtiment des hôtes fut détruit vers 1365/1370 lors de la guerre de Cent Ans. Restauré au XVe siècle, il servit de grange et de grenier. Au XVIIe siècle, un étage intermédiaire fut aménagé pour en faire des chambres pour les hôtes de marque de l'abbaye. Les combles furent divisés en cellules pour les novices et les domestiques.

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La façade de l'abbatiale

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Le bâtiment des hôtes

Le réfectoire des chanoines est parallèle à l'abbatiale et comprend un cellier semi-enterré du XIIe siècle. Le cellier est une pièce à deux nefs voutées d'arêtes éclairées par de petites fenêtres jumelées. Il communiquait, du côté nord, avec le réfectoire des convers et le réfectoire des chanoines, et du côté sud, par un étroit couloir avec la cuisine médiévale situé du côté sud-est du bâtiment. Le réfectoire comporte sur le côté sud une chaire incluse dans l'embrasement de deux fenêtres où le frère-lecteur faisait la lecture pendant que les chanoines prenaient leur repas en silence. Au XVIIe siècle, le réfectoire fut divisé en deux par un mur et un escalier d'honneur, communiquant avec les chambres du bâtiment des hôtes, fut construit. Le réfectoire fut détruit au trois quarts en 1839.

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Le cellier

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Le refectoire

Le bâtiment conventuel était situé du côté est du cloitre. Il servait de lieu de réunion administrative, commémorative et disciplinaire (salle du chapitre) et de lieu d'étude (le chauffoir). Il contenait également le dortoir des chanoines, dont la chambre de l'abbé qui était située contre l'église au-dessus de la sacristie. Un logis spécifique pour l'abbé fut construit au XVIIe siècle. Ce bâtiment abrita la filature de 1802 à 1834 puis la marbrerie de 1834 à 1870. Il fut détruit à partir de 1836. Les fouilles effectuées de 1985 à 1990 relevèrent de nombreuses sépultures du XIVe siècle devant l'entrée du chapitre.

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Les vestiges de l'aquecduc

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Le cloitre et le refectoire

Le logis abbatial fut construit à l'écart de l'abbaye au début du XVIe siècle. Ce logis fut démoli à la fin du XVIIe siècle. En 1719, fut mis en chantier un nouveau pavillon à proximité. Ce pavillon fut occupé par les abbés jusqu'à la Révolution française. Au XIXe siècle, la famille Dubufe agrandit le pavillon central de deux petits pavillons carrés et de deux annexes. Celle du nord servit d'écurie et celle du sud d'orangerie. L'étang situé devant le logis fut aménagé en deux fois. Le premier bassin en forme de demi-lune orientée nord-sud fut conçu pour alimenter le premier moulin. Le bassin fut agrandi par un deuxième bassin orienté est-ouest creusé au XVIIIe siècle. En contrebas de l'étang se trouve le moulin à grain construit entre 1419 et 1445. Il fut agrandi vers le sud en 1866 pour abriter trois grandes roues à aubes. Le moulin servit jusqu'en 1947 où il fut transformé en ferme. Il abrite actuellement une résistance secondaire.

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La maison de l'abbé

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Le moulin

Le colombier, construit au XVe siècle, est une tour circulaire couvert par une voute en pierre avec un oculus central (la lucarne d'envol). Il contient 1500 trous en forme de "L", chacune étant une niche pour un couple de pigeons. Le colombier n'était jamais plein, car il faut 0,5 hectare de terre cultivée pour nourrir un couple de pigeon. Le parement et la voute furent détruits par des éclats d'obus en 1944. Il fut restauré en 1970. La porterie abritait la boulangerie et la salle de justice de l'abbaye.

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Le colombier

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L'intérieur du colombier

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L'entrée de l'abbaye

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La salle de justice

Ces photographies ont été réalisées en juin 2017.

 

Y ACCÉDER:

L'accès à l'abbaye est fléché depuis la D973 reliant Granville à Avranches.

L'entrée est payante.



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Cette page a été mise en ligne le 24 septembre 2017

Cette page a été mise à jour le 24 septembre 2017