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Face au Mont Blanc, se dévoile la beauté de cette étendue minérale. Quarante-deux kilomètres carrés où la roche calcaire ne laisse que peu de place au végétal.
Le
massif du Mont-Blanc
Entre 230 et 65 millions d'années (MA), se trouvait à la place des Alpes un immense océan nommé Téthys. Durant cette période, le jurassique et le crétacé se sont accumulés sur des centaines de mètres, les détritus provenant du monde animal et végétal et de l'érosion du minéral existant. Au jurassique inférieur (199 à 175 MA), la mer est chaude et profonde et les dépôts argileux dominent. Ces dépôts se transformeront en marnes. Au jurassique moyen (175 à 161 MA), les mouvements tectoniques font remonter le fond marin. Il s'installe donc une sédimentation calcaire constituée de débris de coquilles. Au jurassique supérieur (161 à 145 MA), la sédimentation est d'abord identique à celle du jurassique inférieur puis est remplacée par une prédominance de dépôts calcaires dans de vastes lagunes périodiquement asséchées.
Le désert du Platé
Les étendues pierreuses du Platé
Au crétacé inférieur (145 à 99 MA), les dépôts se font de nouveau dans une mer profonde formant ainsi une épaisse couche de schiste et de marnes. À la fin de cette période se situe l'urgonien (aux alentours de 110 MA). Nous passons d'une mer profonde à une mer de type récif très peu profonde. Les récifs de cette période sont constitués de colonies de bivalves, cousins des huitres, les rudistes. Les calcaires de cette période atteignent couramment des épaisseurs de 400 à 500 m. Durant le crétacé supérieur (99 à 65 MA), le bassin alpin se comble progressivement. Le crétacé se termine par la grande catastrophe qui provoqua la disparition des dinosaures.
Le désert du Platé
Lapiaz
sur le désert du Platé
Le tertiaire (65 à 1,8 MA) est marqué par les formidables bouleversements qui donneront naissance aux chaînes montagneuses actuelles. Le premier a lieu lorsque la plaque africaine entre en collision avec la plaque eurasienne. Sa remontée vers le nord comprime l'Espagne et donne naissance aux Pyrénées. L'océan Téthys disparait peu à peu. À partir de 50 MA, la poussée de la plaque africaine entame la surrection des Alpes. Leur formation va passer par différentes phases. La plus importante débute il y a 25 MA. Des roches qui étaient au fond de la Téthys se retrouveront à plus de 2000 m d'altitude. La surrection des Alpes a provoqué le relèvement des montagnes environnantes et notamment celle du Jura. Cette surrection est toujours en cours. En même temps, l'érosion continue sa lente action et rabote les couches de roche patiemment accumulée au cours des millions d'années.
Lapiaz
Les
crevasses du lapiaz du désert du Platé
Vers 2 MA, le climat se refroidit de manière cyclique. Au cours du quaternaire (notre période), les périodes froides et tempérées s'alternent avec un refroidissement progressif. Ce refroidissement provoque l'apparition de glaciers dans les Alpes et le Jura vers un million d'années. Les seules périodes glacières qui soient reconnues avec précision sont les deux dernières, la glaciation de Riss (650000 à 120000 ans) et la glaciation de Würm (60000 à 18000 ans). Le désert de Platé fut recouvert d'un glacier ayant comme axe d'écoulement le vallon de Sales situé au nord-est. Ce glacier était encore bien présent il y a 15000 ans. Il en subsiste des traces au fond des profondes crevasses et dans certaines galeries souterraines dont les parois sont tapissées de glaces. Il rabota les roches jusqu'au dépôt du crétacé supérieur qui forme le plateau de Platé. Les sommets environnant le plateau laissent apparaitre les dépôts successifs du tertiaire comme à la Tête de Pelouse.
Le versant nord ouest de la Tête de Pelouse
La Tête de Pelouse
Après la disparition du glacier, le calcaire a été attaqué par l'eau. Les fissures existantes dans la roche et dues au plissement qu'elle a subi sont peu à peu agrandies par l'écoulement de l'eau, le gel et le dégel. L'eau, surtout celle de fonte des neiges, très riche en CO2, va dissoudre le calcaire. Elle va y creuser des rigoles et s'enfoncer dans le sous-sol. En y circulant, elle creuse des galeries et des cavernes pour ensuite resurgir dans des résurgences parfois en plein milieu d'une paroi rocheuse comme la cascade de la Méridienne dans le cirque du Fer-à-Cheval.
Grande diaclase sur le désert du Platé
Lapiaz sur le désert du Platé
Le plateau de Platé forme une grande gouttière récoltant les eaux venant des Grandes Platières à l'ouest, ceux venant de la crête des Fiz à l'est et ceux du Dérochoir au sud. Ces eaux convergent en sous-sol vers la dépression de Sales pour réapparaitre à la résurgence en amont des gorges de Sales. Le vallon de Sales est le résultat d'une galerie souterraine dont l'action de l'eau a fini par provoquer l'effondrement de la voûte.
Du sommet des Grandes Platières accessible en 15 mn par le téléphérique au départ de Flaine, la vue s'étend sur tout le massif du Mont Blanc au-delà de la Pointe de Platé et des pics du Dérochoir. Sur la droite, un sentier géologique vous permettra de découvrir les merveilles du lapiaz du désert de Platé. Sur la gauche débute le chemin qui en passant sous la Tête de Pelouse et la Tête de Balacha descend vers Flaine.
Le Mont-Blanc
Le
massif de Balacha
Le
Dérochoir
La pointe du Platé
Le sentier géologique est balisé par des petits cairns et par des petits poteaux jaunes dont certains sont numérotés. Le sentier est circulaire, mais la fin, située côté nord, peut être difficile à trouver, si le sentier est enfoui sous les névés neigeux.
Ce sentier vous fera parcourir de nombreuses zones fracturées nommées lapiaz à diaclase. Attention, certaines fissures et crevasses sont profondes de plusieurs mètres. D'autres sont remplis de terre recouverte d'un tapis d'herbes. Nous sommes dans une réserve naturelle et toute cueillette de fleurs ou de minéraux est proscrite.
Sur ces tapis herbeux croissent des fleurs parfaitement adaptées aux variations de température et à la sècheresse régnant en surface. Vous pouvez y observer des orchidées, des gentianes, des laiches, des anémones des glaciers, des silènes acaules, des renoncules alpestres, etc.
Aux alentours du poteau n° 3, de nombreux fossiles peuvent être observés. Ils démontrent que la roche s'est formée dans une mer peu profonde et chaude comme nous pouvons l'observer aujourd'hui aux Bahamas. Nous y trouvons des coraux solitaires en forme de disque avec une structure rayonnante et des nautiles qui sont des mollusques céphalopodes possédant une coquille divisée en loges par des cloisons. Nous pouvons aussi observer des fossiles d'oursins, de bivalves (cousin des huitres) et des tubes spiralés. Ceux-ci sont les restes de galeries creusées par des vers dans le sable des plages.
Fossile de bivalve (hauteur 4 cm)
Fossile de nautile (environ 15 cm)
Fossile de coraux solitaires (4 cm de diamètre)
Fossile
d'oursin (hauteur 10 cm)
Au poteau n° 4, les fossiles de cérithes nous indiquent la présence d'une lagune. Celle-ci est datée de 137 MA. Les cérithes sont des gastéropodes vivants dans des eaux saumâtres.
Fossiles de
nérinées (3 cm de diamètre)
Au poteau n° 5, nous sommes sur une roche détritique formée par une rivière. Nous y trouvons des galets roulés, cimentés par des sables fins. Cette roche s'est formée sur la terre ferme au bord d'un ancien fleuve. L'érosion élimine lentement les particules fines de la roche en laissant apparaitre les galets. Ceux-ci sont cependant bien collés à la roche. Ne jouez pas au foot avec ces galets, vous auriez une petite surprise douloureuse pour vos orteils.
Galets dégagés par l'érosion
Lit de rivière fossile
Les roches au poteau n° 6 contiennent quelques fossiles laissés par des poissons. Avec un peu de chances, vous trouverez des dents de requin. Elles mesurent entre deux et trois centimètres et sont noires. De nombreux fragments d'os y figurent également. Ils proviennent de mammifères et de reptiles vivant dans un estuaire.
Os fossilisé
(environ 10 cm de longueur)
Dent de
requin fossilisée (hauteur 3 cm)
Le chemin partant à gauche du sommet des Grandes Platières mène en trois à quatre heures jusqu'à Flaine, point de départ du téléphérique. Il vous fera voir un autre aspect du désert de Platé. Il passe par de grands champs de plaquettes calcaires que le gel et le dégel ont détachées du socle rocheux. À la Tête de Pelouse, les différentes strates de calcaire du crétacé supérieur sont surmontées par celle du début du tertiaire puis par les couches de schistes du tertiaire. Tout en haut subsiste une couche de grès, déposée lors du passage du tertiaire au quaternaire.
Sommet
des grandes Platières
Lapiaz
au désert du Platé
Le chemin après le passage au col de Pelouse descend le long des crêtes de Balacha. Vous pourrez peut-être y voir des chamois. Mais plus certainement des troupeaux de moutons. Ceux-ci ont le chic de s'aventurer sur des saillants rocheux justes assez larges pour leur passage puis de bêler pour appeler au secours lorsqu'ils ne peuvent plus avancer.
La descente vers Flaine
La Tête de Balacha
Ces photographies ont été réalisées en juillet 2010.
Y ACCÉDER:
L'accès au sommet des Grandes Platières se fait en empruntant le téléphérique à Flaine. La descente se fait par le même chemin ou à pied par le col de Pelouse. Compter trois à quatre heures en descente constante.
Le sentier géologique débute à droite de la station du téléphérique. Il est balisé par des cairns et des poteaux en bois jaune. Compter deux heures.
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.
Cette page a été mise en ligne le 19 septembre 2010
Cette page a été mise à jour le 23 février 2015