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La grotte du Bel Affreux

Le petit village d'Antheuil se niche au fond d'une petite vallée qui se termine par un petit cirque rocheux où jaillit la fontaine de la Roche aux Vieilles. Cette fontaine donne naissance au ruisseau du Rhoin dont les eaux, très riches en calcite, ont transformé le lit en une succession de marches d'une blancheur éclatante.

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L'exsurgence qui donne naissance au Rhoin se trouve à la base d'une couche calcaire qui s'est déposée au jurassique moyen (bajocien, 172 à 168 millions d'années) qui surmonte une couche de marne formée au cours du lias (200 à 176 millions d'années). Le Rhoin se jette au bout de 3 km dans l'Ouche. Une bonne part de son eau se perd à quelques centaines de mètres après le village. Cette perte semble être récente, car des textes de 1890 et de 1894 n'en font pas mention. Ils parlent d'un "ruisseau qui passe au village et va, au bout de 3 km, tomber dans l'Ouche".

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La grotte qui s'ouvre environ 15 m à gauche et à 7 m au-dessus de la fontaine de la Roche aux Vieilles est connue depuis fort longtemps. La première mention en fut faite en 1772 par Courtépée dans sa "Description du duché de Bourgogne". Il y écrivit "une caverne profonde, qu'on nomme le Bel Affreux, au milieu de laquelle est un lac qui nourrit les belles fontaines de Bouilland et d'Antheuil". C'est lui qui mentionna également pour la première fois le nom de "Bel Affreux" pour l'endroit. Au Moyen-âge, bel affreux était une des désignations du Diable. Les habitants du village d'Antheuil sont surnommés les sorciers. Cette dénomination n'aurait rien à voir avec la sorcellerie, mais serait une déformation du nom de Soucelier, famille de noble de Saône-et-Loire, originaire d'Antheuil. Soucelier aurait donné Sorcelier puis sorcier. Terme renforcé par les descriptions du XVIIIe et du XIXe siècle de la région. En 1800, l'abbé Bredant parlait des habitants du village comme "sauvages, farouches, pauvres, mais bons bucherons".

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Dans sa "Description de la France, gouvernement de Bourgogne", Beguillet, en 1781, reprit la description scrupuleuse faite en 1765 par M. de Chevane "Les grottes d'Antheuil sont percées de différentes rues larges et élevées dont les murs et les voutes sont garnis de congélations représentant des plantes et des animaux de toute espèce. Il y a un abime dans lequel se précipite un torrent en forme de cascade et plusieurs réservoirs d'eau claire et limpide qui forment à ce qu'on croit les belles sources de Bouilland ; ce qui semble détruire l'assertion de M. de Buffon qu'on ne trouve jamais de veines d'eau souterraine un peu considérables". Depping dans son ouvrage "Merveilles et beautés de la nature en France" reprit également, en 1811, ce texte. En 1890, l'abbé Denizot dans son "Encyclopédie du département de la Côte d'Or" reprit les descriptions des ouvrages précédents. Il y écrivit "Au fond de la gorge, s'ouvre une caverne profonde qui s'étend sous la montagne. Elle est étroite, élevée et longue ; on lui donne aisément deux cents mètres d'étendue. À sa moitié, elle descend plus profondément encore et un lac la termine. On prétend que ce lac nourrit les fontaines de Bouilland et d'Antheuil". En 1892, Noël Garnier décrivit également la grotte dans son itinéraire touristique "La Côte-d'Or".

Dans "Excursions archéologiques", paru en 1894, Bigarne fit une description moins enthousiaste de la grotte "Cette caverne, dont la réputation est un peu surfaite, a été creusée naturellement par le ruisseau qui s'échappe des vastes réservoirs de la montagne, à la même attitude que la Grande Dore de Bouilland. Un étroit couloir s'élargit en formant plusieurs salles aux parois et au sol humides. On peut avancer d'une centaine de mètres jusqu'au réservoir commun aux deux ruisseaux. Il y a peu de stalactites sur ces grandes roches et l'on est surpris de ne trouver, dans ces souterrains, aucune trace de l'époque préhistorique". En 1897, Clément Brioton fournit dans son article "Les cavernes de la Côte-d'Or" une description de la cavité : "A une centaine de mètres derrière les dernières maisons d'Antheuil s'ouvre au milieu d'un petit cirque rocheux (bajocien) la grotte de Bel Affreux, longue de plus de 200 m et remplie de concrétions calcaires. Cette grotte, composée d'assez vastes salles, n'est que le trop-plein, aujourd'hui inutilisé, d'un courant souterrain qui vient au jour à une dizaine de mètres au-dessous de l'entrée de la grotte et forme la puissante source d'Antheuil. Au fond de la grotte, on retrouve le ruisseau souterrain, mais on ne peut le suivre que pendant quelques mètres, car l'eau mouille la voute même par les plus grandes sécheresses". Il publia cette description en 1911 dans les Actes du 40e congrès de l'AFAS.

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L'exploration scientifique de la cavité, qui est fermée au public, fut entreprise en 1964 par la faculté des sciences de Dijon en collaboration avec le spéléoclub de Dijon. Ils installèrent un laboratoire souterrain dans la grotte pour y étudier la faune cavernicole. Le laboratoire fut détruit le 1er octobre 1966 par une crue exceptionnelle qui vit l'eau jaillir par l'entrée de la grotte. La grotte présente un environnement très riche pour les animaux troglophiles et trogloxènes sur les parois et le sol de l'entrée (jusqu'à 50 m de profondeur) et pour les animaux troglobies dans sa partie profonde. Y furent dénombrées 47 espèces d'insectes, 3 espèces de chauves-souris, 3 espèces de mollusques et de crustacés, 9 espèces d'arachnides (araignées) et 3 espèces de myriapodes (millepattes).

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L'entrée de la grotte du Bel Affreux

En 1970, la société spéléologique de Bourgogne (SSB) avec Bernard De Loriol, après des travaux de désobstruction, découvrit la galerie du gypse et le réseau annexe 1. En 1974, après un passage dans un boyau de 107 m de longueur, la SSB déboucha dans le réseau principal. Ils découvrirent ensuite les réseaux annexes 2 et 3. Dans le réseau annexe 2, le terminus fut atteint en 1978 par le spéléoclub de Dijon. Ce même club franchit, en 1982, le siphon au bout du réseau annexe 1 pour y découvrir le terminus après une galerie très étroite de 20 m de longueur. En 1984, ils plongèrent le 10e siphon dans le réseau principal, actuel terminus de la grotte. Ils explorèrent le siphon de la source (-7 m et 35 m de longueur) en 1986 et débouchèrent dans le réseau inférieur.

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Le fond du ruisseau

La grotte, fermée par une grille, présente un développement de plus de 3500 m dont 3130 m sont typographiés. Elle est subdivisée en plusieurs réseaux. L'ancien réseau, d'une longueur d'environ 220 m, présente une galerie de 4 à 5 m de large et dont la hauteur varie de 1,6 m à 10 m. À 20 m du fond, un puits de 11,60 m donne accès au réseau inférieur, la partie active de la grotte qui débouche sur le siphon de la source. La galerie du gypse, longue d'environ 110 m, est accessible par un boyau de 7 m suivit d'une chatière. Elle comporte deux salles. Le réseau principal comprend une succession de salles et de galeries séparées par 10 siphons. La longueur de ce réseau, accessible par une zone d'éboulis et une cheminée de 6 m, dépasse les 1000 m. Les réseaux annexes 1, 2 et 3 se terminent chacun par un siphon.

Pour télécharger une description très détaillée avec la topographie cliquer ici

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Le grand rocher surplombant la grotte abrite quelques maigres ruines. Il s'agit des vestiges du "Château Mignon" dont Bigarne nous conte la légende : "les sorciers d'Antheuil voulurent un jour bâtir une forteresse sur la montagne, mais les travaux qu'ils faisaient le jour étaient détruits chaque nuit. L'obstination des ouvriers pensait avoir raison des mauvais esprits. "Château Mignon nous bâtirons, criait ils, que Dieu veuille que Dieu ne veuille pas, Château Mignon nous bâtirons !". Les blasphémateurs ne purent jamais mettre en œuvre les énormes matériaux qu'ils avaient préparés…". Dans une autre version de la légende, le château est construit par des fées. Une troisième version nous informe que le bâtisseur était un seigneur étranger et que c'est les sorciers (habitants d'Antheuil), qui refusaient la présence de ce seigneur, qui démolissaient la nuit l'ouvrage réalisé durant le jour. Pour finir une dernière croyance populaire, pour se protéger du tonnerre et de la foudre, les habitants plongeaient la statue de Saint-Antide dans la source

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Ces photographies ont été réalisées en décembre 2017.

 

Y ACCÉDER:

À Antheuil, garez-vous en face de l'église puis suivez le chemin qui longe le ruisseau en direction de la source.

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 23 janvier 2018

Cette page a été mise à jour le 23 janvier 2018