L'abbatiale d'Ebersmunster

Le village d'Ebersmunster remonte à la période gallo-romaine. À l'époque, le lieu était dénommé Novientum et un temple dédié à Teutatès/Mercure, qui aurait été construit sur ordre de Jules César, s'y élevait. Le temple aurait été détruit par St Materne pour y ériger une église dédiée à St Pierre.

Novientum devint au fil du temps Evremoutier puis Ebrotheimmunster pour finir en Ebersmunster, la maison du sanglier peut-être en référence aux nombreuses chasses aux sangliers organisées à cet endroit. D'après la légende, Sigebert III (634-656), fils de Dagobert 1^er, 2^e roi d'Austrasie, aurait été mortellement blessé à cet endroit au cours d'une chasse puis ressuscité par St Arbogast, l'évêque de Strasbourg. En 661, une petite communauté occupait les lieux. Le duc d'Alsace Etichon (père de Ste Odile) et son épouse Bereswinde, la fille de Sigebert III, fondèrent, en 667, à Ebersmunster une abbaye en la dotant de nombreuses possessions.

Le moine irlandais Déodat, évêque de Nevers, s'installa dans la région en 675. Il fonda avec Bobolino un ermitage à Bois l'Abbesse dans le Val de Liepvre. Il se retrouva ensuite à Ebersmunster où il organisa la communauté selon la règle de St Colomban. Durant cette période, le monastère reçut en don une partie des biens du seigneur Hunon de Hunawhir et de sa femme Hunne la "Sainte Lavandière". Déodat mourut en 679 au monastère de St-Dié qu'il venait de fonder. Eharde, simple moine, lui succéda à la tête de la communauté d'Ebersmunster. Il n'est pas établi si cet Eharde est la même personne que l'évêque de Ratisbonne, St Eharde, qui baptisa Ste Odile d'après la légende. En 684 Thierry III, roi de France et d'Austrasie, vint à Ebersmunster. Il fut édifié par la simplicité et la bonté des moines et pour les remercier, leur fit don des villages de Hilsenheim, de Bindernheim et de Ehnweyer qu'il détacha du domaine royal.

En 770, Carloman 1^er renouvela les privilèges accordés à l'abbaye par son père Pépin le Bref et ses prédécesseurs. L'abbaye possédait des biens dans près de 80 villages entre Strasbourg et Mulhouse. Elle fut nommée abbaye impériale du Saint-Empire Romain Germanique par Louis le Pieux en 818. En même temps, il y instaura la règle bénédictine. En 1049, l'abbaye reçut la visite du pape alsacien Léon IX qui y consacra une chapelle dédiée à St Maurice. La chapelle fut démolie en 1813 par le propriétaire des lieux. Une nouvelle église de style roman fut consacrée en 1155.

L'évêque de Strasbourg, Berthold de Bucheck accorda au village d'Ebersmunster le rang de ville en 1331. En 1525, le village et l'abbaye furent pillés durant la guerre des Paysans. Les reliques de Ste Hunne, conservé dans l'abbaye, furent dispersées. Les habitants de Hunawihr passés à la Réforme (protestant) profanèrent le sanctuaire en 1549. Après s'être relevée de ces malheurs, l'abbaye fut affiliée à la congrégation de Bursfeld, près de Hanovre, en 1607 puis en 1624 à celle de Strasbourg. La guerre de Trente Ans fit ici comme ailleurs en Alsace de gros dégâts. L'abbaye et l'église furent ravagées par les flammes d'un incendie allumé lors de la bataille du 5 octobre 1632 entre les troupes impériales et les troupes suédoises. Il faudra attendre 1717 pour que l'église soit de nouveau apte à recevoir le culte. Mais pour une courte durée, car un nouvel incendie, dû à la foudre cette fois-ci, détruit à nouveau l'édifice.

En 1725 débuta la construction de l'église actuelle conçue dans le style baroque par l'architecte Peter Thumb (1681-1766). Le gros œuvre fut achevé en 1728 et l'église consacrée en 1730. La décoration intérieure ne fut cependant achevée qu'en 1759. Les peintures des voutes et des plafonds sont consacrées à St Maurice et à St Benoit. Le maitre autel, conçu en 1728, est une œuvre de Jean Leonard Meyer et l'orgue fut construit entre 1730 et 1732 par André Silbermann. Dans le chœur se trouvent des stalles réalisées par Mathieu Wurtzer. Elles sont décorées par des représentations des plus importants personnages ayant fait la renommée de l'abbaye.

La Révolution française conduisit à la dissolution de la communauté monastique, forte de 26 moines, en 1791. Les bâtiments conventuels furent vendus comme biens nationaux. La bibliothèque, riche de 9025 ouvrages, fut transférée à Strasbourg en péniche et brulée en place publique le 24 septembre 1792. Les Frères-marianistes rachèteront les bâtiments conventuels en 1845 pour y fonder une école privée qui existe toujours. L'église fut classée Monuments historiques en 1898. Le curé Charles Wetterwald (1872-1910) restaura les stalles du chœur avec l'aide du sculpteur tyrolien Stuflesser. L'église fut entièrement restaurée entre 1972 et 2010.

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