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L'église fortifiée de Hunawihr

Le petit village de Hunawihr se niche au sein d'un petit vallon dont les flancs sont couverts de vignes. À l'est du village, sur une petite butte, se dresse une église entourée d'un cimetière fortifié. C'est un des plus beaux ensembles de ce type visible en Alsace et dans les pays limitrophes.

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À l'origine du village se trouve un seigneur du nom de Hunon et sa femme Huna. Ils s'établirent au cours du VIIe siècle sur une ancienne villa gallo-romaine. À proximité de ce domaine vint s'établir en ermite, saint Déodat, l'ancien évêque de Nevers. Hunon et Huna, suivant son enseignement, lui firent baptiser leurs fils sous le nom de Dieudonné. Huna, appliquant les préceptes de saint Déodat, se mit au service des pauvres. Elle les logeait, les nourrissait, soignait les malades et lavait elle-même leurs vêtements. Les habitants de la région la surnommèrent la "Sainte Lavandière". Huna mourut en 679 et fut canonisé en 1520 par le Pape Léon X à la demande du Duc Ulrich de Wurtemberg.

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En 1114, l'empereur du Saint-Empire germanique, Henri V, rattacha le village à l'abbaye de St-Dié et leur accorda sa protection. Le village réapparait dans une bulle du Pape Calixte II en 1123 puis dans un parchemin rédigé par l'empereur Fréderic 1er Barberousse, en 1157, confirmant un accord entre le chapitre de St-Dié et l'évêque de Bâle sur la répartition de la dime due par les habitants. Les archives de Colmar nous apprennent également que les Colmariens détruisirent le village pour une raison inconnue en 1291.

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La cérémonie de canonisation de Hune, le 15 avril 1520, fut suivie, d'après Ulrich de Ribeaupierre, seigneur voisin, par 20000 personnes. À cette occasion, le Pape accorda aux assistants faisant des dons pour la réparation de l'église une indulgence plénière. Les dons furent si nombreux que l'on put entamer la construction d'une nouvelle église de pèlerinage. De l'église initiale, que les fouilles de 1985 datèrent du XIe siècle, ne fut gardé que le clocher. Celui-ci est daté du XIVe siècle. Le chœur fut achevé en 1524, et la sacristie le fut début 1525. Cette même année, les paysans, écrasés d'impôts et privés de toutes libertés, se révoltèrent un peu partout en Europe. En Alsace, cette révolte fut réprimée dans le sang par le Duc de Lorraine. La bataille de Lupstein fit 5000 morts, celle de Saverne en fit 18000 morts. La bataille finale eut lieu à Scherwiller, le 20 mai 1525. Les survivants à cette répression se rallièrent par la suite peu à peu aux thèses de la Reforme. En 1534, le duc Georges de Wurtemberg l'introduisit officiellement sur ses terres. Il adhéra aux thèses du Suisse Zwingli. Son successeur imposa, en 1559, les thèses de l'allemand Luther, ce qui créa quelques difficultés avec le curé Koenig officiant à Hunawihr. Le curé Koenig dû se réfugier au château des Ribeaupierre resté fidèle aux thèses de Zwingli. Les protestants reprirent la construction de l'église, mais dispersèrent les reliques de Ste-Hune en 1540 mettant fin au pèlerinage qui s'était instauré.

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En 1610, la peste tua 306 habitants du village. Elle précéda de peu la guerre de Trente Ans (1618-1648) qui ravagea le village et laissa les habitants en manque de tout. Le traité de Westphalie mettant fin à la guerre en 1648 amena un peu de tranquillité. Il garantissait aux Alsaciens la liberté religieuse. La paix durera jusqu'en 1672 où, Louis XIV reprendra la guerre contre les hollandais. L'Alsace passa alors sous la coupe de Louvois, le ministre de la guerre. Celui-ci, favorisant la religion du roi, décida que dans toutes les villes où vivaient sept familles catholiques celle-ci aurait accès aux lieux de culte des protestants. À Hunawihr vivaient deux familles catholiques et deux femmes catholiques épouses de protestant. Le quota n'étant pas atteint, trois personnes (un aveugle, un paralysé et un sourd-muet) furent achetées pour se déclarer catholiques. En 1687, les catholiques reprirent possession du chœur de l'église qui fut déclaré Simultaneum. La cohabitation provoqua quelques heurts. En 1753, des bagarres entre communautés conduisirent le Conseil Souverain d'Alsace de Colmar à interdire l'église aux protestants pour six mois. Le pasteur Simon Resh, jugé responsable, fut mis en prison et remplacé par le pasteur André Brauer. En 1772, le curé Favre décida de déplacer l'autel protestant. Ceux-ci entamèrent une action juridique auprès du Conseil Souverain d'Alsace qui prit la défense des catholiques. Les protestants portèrent l'affaire, soutenue par le Duc de Wurtemberg, devant le Conseil d'État à Paris. Louis XIV, tenant à la paix religieuse, trancha en faveur des protestants.

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L'église de Hunawihr est dédiée à St-Jacques le majeur, un des apôtres du Christ. Elle est construite sur une butte à l'est du village et est entourée d'une enceinte fortifiée octogonale. À chaque angle de cette enceinte se trouve un bastion demi-circulaire dont les archères évasées en trous circulaires sont adaptées aux bouches à feu (canon du XVe siècle). L'enceinte fut construite au cours du XIVe et du XVe siècle et restaurée au XVIe siècle. Le porche d'entrée était surmonté d'une tour dont il ne subsiste actuellement qu'une petite partie. À l'intérieur de l'enceinte s'est implanté le cimetière catholique. Le cimetière protestant se blottit à l'extérieur de l'enceinte du côté nord et est. L'église est constituée d'une nef du XVIe siècle, précédant le chœur de 1524. La nef, de forme presque carrée, est formée de trois travées voutées. Sur les clefs de voûte sont représentés l'aigle bicéphale du Saint-Empire germanique, le blason des possessions espagnoles des Habsbourg, les armes du duché de Wurtemberg-Montbéliard et le blason de Hunawihr (d'azur à bande d'argent avec trois chapeaux de fer de gueule). Au sud du chœur est située la sacristie de 1525 sous laquelle se trouve une crypte avec une petite chapelle carrée. C'est dans cette crypte qu'étaient abritées les reliques de Ste-Hune. Au nord du chœur se trouve le clocher à deux étages. Son toit de forme octogonale a été reconstruit en 1806. Plusieurs campagnes de restauration ont eu lieu depuis le XIXe siècle. La première campagne concerna, en 1826, la réfection de l'enceinte. Entre 1856 et 1867 furent réfectionnés les voûtes et le dallage de la nef, fut supprimée la porte sud de la nef et furent mis en place les vitraux du chœur. Le vitrail du centre représente St-Jacques le majeur et Ste-Hune.

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En 1878, des travaux dans le clocher mettent à jour des fresques datées de 1493. Il s'agit de quinze tableaux couvrant sur deux niveaux les murs ouest, nord et est. Les tableaux supérieurs montrent St-Nicolas apportant son soutien financier à trois jeunes filles que leur père voulait prostituer, St-Nicolas intronisé de force évêque de Mire, St-Nicolas apportant son secours à un navire dans la tempête, St-Nicolas libérant trois innocents, St-Nicolas qui fait abattre l'arbre du culte idolâtre de Diane, St-Nicolas déjouant la vengeance du Diable voulant incendier son église, la mort de St-Nicolas et le transfert de son corps dans la cathédrale de Bari. Les fresques inférieures représentent les miracles de St-Nicolas. Le premier tableau montre la résurrection des trois enfants du saloir, dont la légende nous conte qu'ils furent tués et découpés par un boucher. Cette légende reposerait sur une interprétation erronée de l'image. Les traits verticaux et horizontaux qui découpent les enfants seraient en réalité les barreaux de la prison. St-Nicolas appartenant à une famille aisée aurait payé la rançon pour leur libération comme il donna de l'argent aux trois jeunes filles pour qu'elles n'aient pas à se prostituer. Nous voyons ensuite le miracle du chevalier-brigand qui, poursuivi, saute sans dommage le Danube grâce à l'intervention de St-Nicolas, celui de l'enfant qui, enlevé par les infidèles, est libéré par St-Nicolas et l'histoire du chrétien arnaquant un juif auquel il avait emprunté de l'argent. Le chrétien est puni par St-Nicolas qui le fait s'endormir sur un chemin où un chariot l'écrase. Cette action, complétée par la résurrection du chrétien, amène la conversion du juif. La dernière fresque, qui s'étend sur les deux niveaux, montre le couronnement de la Vierge par la Trinité à moins qu'il ne s'agisse de la canonisation de Ste-Hune par le Pape et les évêques.

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Entre 1985 et 1988, une nouvelle réfection concernant la charpente, la couverture et l'intérieur fut réalisée. Les fouilles entreprises à cette occasion permirent la découverte des fondations de l'édifice du XIe siècle, du niveau initial du dallage de la nef (identique à celui du clocher) et de la sépulture dans le chœur du curé Michel Haerter, inhumé en 1750. Dans la nef se trouve également un orgue qui fut construit en 1765 par Louis Dubois et Jacques Besançon, facteurs d'orgues alsaciens. En 1803, il fut reconstruit par Joseph Rabing et François Callinet après le vol des tuyaux. Une nouvelle restauration fut effectuée en 1859 par Claude Callinet puis, en 1990, par Gaston Kern. La cloche, reposant sous le clocher, date de 1700. Elle a été descendue du clocher en 1970 après s'être fêlée.

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Ces photographies ont été réalisées en août 2013.

 

Y ACCÉDER:

L'église fortifiée de Hunawihr est accessible à pied depuis le parking situé à l'entrée du village. Celui-ci est situé sur la route des vins d'Alsace entre Riquewihr et Ribeauvillé.

 



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Cette page a été mise en ligne le 2 mars 2014

Cette page a été mise à jour le 23 février 2015