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Le Creu du Van

Entre le lac de Neuchâtel et la frontière française se situe le plus majestueux cirque glacière du massif du Jura. Creusé dans les couches calcaires et marneuses du massif, il présente des falaises d'une hauteur de 160 m.

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L’amphithéâtre naturel du Creux du Van a une longueur de 2 km pour une largeur de 1 km. Le dénivelé entre le plateau supérieur et le fond du vallon est de 500 m. Il est creusé dans le calcaire du Kimméridgien (partie supérieure) et dans les marnes du Séquanien (partie inférieure). Sa formation est la conséquence de l'érosion pluviale et glacière au cours de la dernière période glaciaire. Période qui y perdure, car à certains endroits subsistent des pergélisols (sol gelé en permanence). Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le nom du cirque n'a rien à voir avec le vent qui peut y être violent. Le terme Van dérive du terme celtique vanne qui signifie falaise.

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Il y a 150 millions d'années (Ma) au jurassique, la région était recouverte d'une mer tropicale peu profonde (moins de 200 m) parsemée de récifs coralliens dont les débris formèrent le calcaire du Kimméridgien. À partir de 130 Ma, la mer devint épicontinentale. Durant les périodes du jurassique et du crétacé, une large part de l'Europe était recouverte par une mer peu profonde où la sédimentation forma les bancs de calcaire et de marne. Le calcaire est formé par l'accumulation au fond de la mer de coquilles, de squelettes d'animaux et d'algues. Les marnes, constituées de calcaire et d'argile, sont formées par les résidus de l'érosion continentale des roches cristallines (d'origine volcanique). Dans cette mer du jurassique émergeait le Massif central, les Vosges, la Forêt-Noire et le massif de Bohème. Au sud de l'Europe se trouvait l'océan Téthys. À partir de 100 Ma la plaque africaine remonta vers le nord et entra en collision avec la plaque eurasienne provoquant l'émersion et le plissement d'une partie du fond marin de l'océan Téthys. Une des cicatrices de ce colossal affrontement des continents est visible au niveau des roches vertes (ophiolites) de la région de Zermatt. Cet affrontement provoqua, il y a 35 Ma, l’émergence de la chaîne alpine. Cette chaîne, large de 150 km et longue de plus de 1000 km, émergea de l'océan Téthys qui se réduisit à une largeur de 600 km et fut repoussé vers l'est. Vers 10 Ma, sous la poussée des Alpes, se produisit le plissement du Jura. Les couches sédimentaires du Jura se détachèrent du substratum au niveau des couches plastiques de sel et de gypse datant du trias et leur plissement formèrent les séries d'anticlinaux et de synclinaux caractéristiques de la région.

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Dès leur ébauche, ces plissements furent soumis à l'érosion (action de l'eau et du gel et corrosion par l'acide carbonique). Cette érosion dégagea sur les anticlinaux des couches de plus en plus anciennes et profondes. Le calcaire, plus résistant que les marnes, forme les voûtes et les crêtes tandis qu'au niveau des assises marneuses se développèrent les combes où circulent les cours d'eau.

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La formation du Creux du Van est due à une faille transversale à l'anticlinal qui favorise le drainage des eaux en direction de l'Areuse. Le réseau hydrographique de surface était cependant insuffisant pour évacuer les éboulis accumulés au pied des falaises. Ce qui forma un écran protecteur ralentissant l'érosion. Au cours de l’ère glaciaire du Würm, une branche latérale du glacier du Rhône qui recouvrait la région s'est avancée dans le Val de Travers. De nombreuses constructions du village de Noiraigue utilisent le granit provenant des blocs erratiques des dépôts morainiques de ce glacier. En même temps, un glacier de cirque occupait la dépression du Creux du Van. Ce glacier s'écoulait vers les gorges de l'Areuse pour rejoindre le glacier du Rhône. Ce glacier éroda les falaises de manière circulaire et évacua les déblais vers la vallée. À la fin de l’ère glaciaire, il y a plus de 10 000 ans av. J.-C., lors de la fonte des glaciers, le glacier du Creux du Van forma un barrage dans le Val de Travers. En amont de ce barrage de glace se forma un lac allant de Noiraigue à Saint-Sulpice. Le glacier et sa moraine ont retenu les eaux de l'Areuse permettant au lac d'atteindre l'altitude de 800 m. Un deuxième lac recouvrait le fond de la vallée du Champ du Moulin. Ces lacs et une partie du glacier ont subsisté jusque vers 3700 av. J.-C.. Actuellement, certaines zones d'éboulis restent toujours gelées en permanence avec pour conséquence l'eau très froide (4 °C) de la Fontaine Froide jaillissant dans le cirque.

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La Fontaine froide

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La présence humaine dans la région est attestée dès la préhistoire. Dans la grotte de Cotencher furent retrouvés des outils en pierre taillée datée de 4000 av. J.-C., des outils en pierre polie (3500 av. J.-C.), des vestiges de l'Âge du Bronze (1300 av. J.-C.) et des vestiges gallo-romains. La grotte de la Baume du Four livra des outils en pierre polie et des vestiges de l'Âge du Bronze, du Fer et gallo-romains. Dans le cirque du Creux du Van fut retrouvée une hache en bronze datée de 1200 av. J.-C. (civilisation de Cortaillod).

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Le territoire du Creux du Van apparaît dans les chroniques en 998 où il est mentionné comme une propriété du prieuré de Bevaux. En 1350, un arbitrage décida que la limite entre les territoires de Grandson et le Vautravers serait en "haut de la Roche de la Fauconnière sur Lareuse". L'endroit était également dénommé "Fauconnière sur l'Arouse" et dès le XVIIIe siècle, "Crou", "Creue" ou "Roche de la Fauconnière". À partir de 1694 apparaît le terme de "Cul" ou "Ku du Vent". En 1535, Lancelot, seigneur de Vaumarcus et de Gorgie, entreprit la vente du "Crou de la Fauconnière" à la paroisse de Saint-Aubin en interdisant une exploitation abusive des forêts qui étaient mises en réserve pour d'éventuelles reconstructions des villages de la Berock, sujets à de nombreux incendies. Le non-respect de cette clause entraîna de nombreux procès.

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La liberté de la chasse au XVIIIe siècle et l'élimination des prédateurs menés dès le XVIIe siècle, conduisit à l'extermination des loups, des ours, des cerfs, des chevreuils, des chamois, des lapins, des sangliers, des blaireaux, des loutres, des hiboux, des faucons, des coqs de bruyère, etc., et, au début du XXe siècle, des chats sauvages. La forêt, exploitée pour la fabrication de charbons de bois notamment à la Fontaine Froide et à la ferme Robert jusqu'en 1880, fut également rasée. En 1882, le Club Jurassien procéda à l'achat d'une partie de la zone d'éboulis au pied des falaises pour y créer une zone protégée. L'année suivante, l'état de Neuchâtel adopta une législation réglementant l'exploitation forestière.

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Le mémorial du dernier ours tué dans le cirque

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Entre 1884 et 1933, l'état fédéral acquit le Creux du Van (300ha) pour assainir le sol et la forêt. La ville de Neuchâtel reçut la propriété de la "Grand Vy" et acheta une partie des "Côtes du Champ du Moulin" qu'elle mit en valeur. En 1890 eut lieu un essai de réintroduction de tétras-lyre. En 1893 fut créé un vaste parc naturel du Creux du Van à proximité de la ferme Robert. Le chevreuil fut mis sous protection en 1899 et un décret de protection de toute une série d’espèces florales fut pris en 1913. En 1929, 19 ha d'éboulis au sud du "Dos d’âne" furent déclarés réserve botanique gérée par le Club Jurassien. Les chamois furent déclarés espèce protégée en 1945 et un lâcher de chamois dans le cirque eut lieu en 1950. Le cirque devint une réserve de chasse en 1956. En 1972 fut créée la réserve du Creux du Van et des Gorges de l'Areuse, d'une superficie de 15,5 km². Dans cette réserve fut réintroduit, en 1974, le lynx.

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Ces photographies ont été réalisées en mai 2019.

 

Y ACCÉDER:

Pour contempler le cirque du haut, il faut, depuis Gorgier / Saint-Aubin, prendre la direction de Montalchez, puis de Provence. Suivre ensuite le fléchage jusqu'à l'auberge du Soliat puis poursuivre à pied.

Attention, les bords du cirque ne sont pas sécurisés. Il est dangereux de s'approcher de trop près surtout en hiver ou par grand vent.

Pour accéder au pied du cirque, il faut se rendre à Noiraigue et y suivre le fléchage pour la ferme Robert. De là, 30 minutes de marche permettent d'atteindre la Fontaine Froide et en 1 h 30 d'atteindre le sommet du cirque.

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.

 

 

Cette page a été mise en ligne le 9 septembre 2019

Cette page a été mise à jour le 9 septembre 2019