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Les gratte-ciels médiévaux de San Gimignano

Cette petite ville de la campagne toscane connut au XIII^e siècle une profusion de maisons-tours. En 1250, il y en avait soixante-douze. On peut donc la considérer comme l'équivalent moyenâgeux de l'actuelle Manhattan.

Les torri Salvucci (à gauche), Chigni (au centre) et Rognosa (à droite)

San Gimignano fut fondé au III^e siècle av. J.-C. par les Étrusques. Elle traversa les vicissitudes de l'histoire jusqu'au X^e siècle où elle prit le nom du saint évêque de Modène, Saint-Gimignano, dont l'invocation aurait mis en déroute les hordes barbares lors des invasions de l'Italie par les Goths. Gimignano (Geminien) vécut à Modène au IV^e siècle. En 1199, la ville se soustrayait de la puissance de l'évêque de Volterra et devint une ville libre. Elle connut alors un grand développement grâce à la via Francigena, qu'empruntaient les pèlerins se rendant à Rome. Elle s'enrichit également avec le commerce du vin, de l'huile d'olive, du blé et du safran cultivé dans ses champs. Parmi les puissantes familles habitant la ville se trouvaient les Ardinghelli et les Salvucci. Les deux familles s'opposèrent pas uniquement de manière commerciale, mais également en soutenant les factions guelfes et gibelins. Les guelfes, dont faisaient partie les Ardinghelli, soutenaient le Saint-Siège alors que les gibelins soutenaient le Saint Empire romain germanique lors du conflit pour le trône du Saint Empire.

Pour affirmer leurs puissances, les familles de San Gimignano firent élever des maisons-tours. Ces tours, aux murs très épais (jusqu’à 2 m), n'offraient, à chaque étage, que peu de surface habitable. Ces murs épais garantissaient à ces maisons, très exposées aux vents dominants, de la chaleur en hiver et de la fraicheur en été. Le rez-de-chaussée, à l'abri des températures les plus extrêmes qui pouvaient sévir dans les étages, servait d'entrepôt. Dans les étages intermédiaires se trouvaient les chambres alors que la cuisine, seule pièce où l'on faisait du feu, se trouvait en haut de la tour. Le passage d'un étage à l'autre se faisait par un escalier extérieur. En 1250, la ville comptait 72 tours. La démesure régnait au point, qu'en 1252, le conseil municipal adopta une loi interdisant aux propriétaires privées de posséder une tour plus haute que la Torre Rognasa (52 m de hauteur) appartenant au palais de la municipalité. Les tours jumelles des Ardinghelli durent être raccourcies à 51 m de hauteur.

La prospérité de la vile produisit, au XIII^e et XIV^e siècle, une profusion de chefs-d'œuvre artistiques. Bâti en 1288, le palais communal fut orné sur sa façade des blasons des 130 magistrats qui s'étaient succédé de 6 mois en 6 mois à la tête de la ville. Ces blasons furent détruits en 1789. Parmi les chefs d'œuvre artistique, Lippo Menni et son frère Frederico couvrirent, en 1340, les murs du Duomo de fresques inspirées du cycle de la vie et de la passion du Christ. Ces fresques furent complétées vers 1370 par Bartolo di Fredi avec une trentaine de scènes tirées de l'Ancien Testament. À la fin du XIV^e siècle, Taddeo di Bartolo peignit, à l'entrée de la nef du Duomo, le Jugement dernier. À la même époque, Memmo di Filippuccio orna la chambre des Podestats de fresques sur le thème des effets de l'amour conjugal. Au XIV^e siècle, la prospérité des familles fut telle que la municipalité dut réguler certains excès. Une loi fut promulguée pour limiter la traine des robes des femmes à 1,70 m.

En 1289, la ville accueillit la visite du roi Charles II d'Anjou. Cette visite fut commémorée par une frise sur les murs de la salle du conseil du palais communal. Cette frise fut reprise et complétée par Lippo Memmi en 1317. Un autre visiteur de marque, le poète Dante Alighieri, vint à San Gimignano, le 8 mai 1300. Mais le déclin n'est plus loin. En 1348, la peste décima la population. Les frères Ardinghelli, accusée à tort de complot par leurs rivaux, la famille Salvucci, furent décapités en 1352 et leurs familles furent expulsé de la ville. En représailles, les Ardinghelli pillèrent la campagne avoisinante. Le conflit prit une telle ampleur que la ville de Florence intervint et annexa la ville en 1353. Pour garder la main mise sur la ville, les Florentins construisirent la forteresse de la Rocca di Montestaffoli qui domine le bourg. La forteresse est entourée d'un rempart pentagonal de 280 m de circonférence. Chaque angle du rempart est occupé par une tour et l'accès se fait par une porte unique munie d'un pont-levis. La forteresse fut démantelée entre 1555 et 1558 sur ordre du duc Cosimo de Médicis.

Des 72 maisons-tours (Torri) n'en subsistent, actuellement, que 14. Les tours jumelles de la famille Ardinghelli, les "Torri degli Ardinghelli" sont situés "piazza della citerna". Elles n'ont actuellement plus que la moitié de leur hauteur d'avant 1252. Les tours jumelles de leurs rivaux, la famille Salvucci, les "Torri dei Salvucci", durent également être coupées en 1252 pour ramener leur hauteur à 51 m. Elles n'ont actuellement plus que la moitié de cette hauteur.

La tour la plus haute est la "Torre Grossa" construite entre 1300 et 1311. Adjacente au Palazzo Comunale, elle a une hauteur de 54 m. Elle est suivie par la Torre Rognasa avec une hauteur de 52 m. Elle fut construite par la famille Gregori en 1200. Passé aux mains de la famille Oti, elle servit un temps de prison à la ville.

La "Torre dei Becci" fut érigé au XIII^e siècle par la famille Becci. La famille Useppi érigea la "Torre Ghigi" en 1280. Les "Torre di Palazzo Pellari" et "Torre dei Cugnanesi" furent construites au XIII^e siècle. La "Torre dei Cugnanesi" fut construite au-dessus d'une des portes de la vieille ville. La maison-tour la plus ancienne est certainement la "Torre Campatelli" dont les 28 m de hauteur furent érigés au XII^e siècle. Elle fut rachetée au début du XIX^e siècle par la famille florentine des Campatelli.

La plus mystérieuse est la "Torre del diavolo". Son propriétaire, au retour d'un voyage, remarqua que la tour était plus haute qu'à son départ. Il attribua ce phénomène au travail du Diable.

Ces photographies ont été réalisées en juin 2019.

Y ACCÉDER:

Pour voir les maisons-tours, il suffit de parcourir à pied les rues et ruelles de San Gimignano.

Les parkings, situés obligatoirement à l'extérieur de la vieille ville, sont payants.

Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 9 septembre 2019

Cette page a été mise à jour le 9 septembre 2019