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L'abbaye de Saint-Antoine-l'abbaye

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L'abbatiale de Saint-Antoine-l'Abbaye est certainement une des plus importantes réalisations gothiques du Dauphiné. De plan basilical, elle est longue de 72 m et large de 34,25 m. Sa façade, de style gothique flamboyant, possède trois portails surmontés d'une balustrade. Une immense verrière éclaire la nef. La nef, de sept travées hautes de 22 m, est voutée d'ogives et flanquée de deux larges bas-côtés sur lesquels s'ouvrent dix-sept chapelles de plan carré. Un transept relié aux bâtiments conventuels la sépare du chœur constitué de deux travées droites et d'un chevet en forme d'hémicycle en partie inférieure et à cinq pans surmontés d'un triforium en partie supérieure. Le chœur est également vouté d'ogives.

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Le début de la construction de l'abbatiale est daté de la fin du XIIIe siècle. La construction a débuté par le chœur qui, après une interruption de 47 ans, fut achevé en 1342. Les deux premières travées de la nef furent érigées entre 1343 et 1362 et les deux suivantes entre 1389 et 1417. La plus ancienne mention de travaux de décoration peinte de l'abbatiale fut faite en 1383. En 1400 furent entrepris les travaux de voûtement de la nef et la construction de la deuxième chapelle au nord du chœur à l'initiative de l'abbé Gerenton de Châteauneuf. Entre 1405 et 1410 fut érigé le grand mur de soutènement devant le parvis et le grand escalier. L'ensemble fut repris en 1604, prolongé en 1710 et réparé en 1711. Les travaux furent dirigés à partir de 1419 par l'architecte Jean Robert qui érigea également le château de Tarascon. Le clocher et la toiture furent érigés à partir de 1422. La construction des dernières travées de la nef et de la façade fut débutée en 1438 sous l'abbé Humbert de Brion. Le sculpteur avignonnais Antoine le Moiturier travailla à la décoration des portails de la façade entre 1461 et 1464. La dernière chapelle latérale fut achevée en 1484. En 1490 fut posé le dallage en pierre dure et les tuiles vernissées du toit furent posées entre 1482 et 1490. À la même période furent mis en place les vitraux. En 1623, les moines commandèrent à Léonard de Vialeys, tapissier à Aubusson, dix tentures racontant l'histoire de Saint-Joseph. Les 87 stalles installées dans le chœur furent réalisées en 1630 par le menuisier François Hanard. Jean du Vache, baron de Châteauneuf, offrit, en 1648, à l'abbatiale une nouvelle châsse en argent pour les reliques de Saint-Antoine. Le maitre-autel en marbre noir fut réalisé par Jean Mimerel en 1667. L'orgue de Jérémie Carlin fut posé en 1680. Cet orgue fut transféré en 1806 dans l'église Saint-Louis de Grenoble avant de revenir dans l'abbatiale en 1990. Le chapitre commanda, en 1690, des tableaux au peintre Marc Chabry pour décorer les différentes chapelles.

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L'origine de l'abbaye se trouve au XIe siècle lorsque le chevalier Jocelin de Châteauneuf, fils du seigneur de la Motte-Saint-Didier, fut guéri par Saint-Antoine qui lui apparut en rêve. Pour sa guérison Saint-Antoine lui demanda d'accomplir un pèlerinage en Terre Sainte pour ramener ses reliques de Thébaïde dans le désert égyptien où, ermite, il vaincu les feux de la tentation. Jocelin partit, accompagné de son beau-frère, Guigues-Didier, en 1074. À son retour, il entreprit la construction d'une église, mais mourut avant la fin des travaux. Guigues-Didier poursuivit les travaux puis appela les moines de l'abbaye de Montmajour pour s'en occuper en 1083. L'évêque de Valence, Gontard, autorisa les bénédictins de Montmajour à établir un prieuré à Saint-Antoine. La construction du prieuré et d'une nouvelle église romane débuta en 1088. Le pape Urbain II autorisa le dépôt des reliques de Saint-Antoine dans cette nouvelle église. Il avait estimé l'ancienne église pas digne de recueillir les reliques. En 1089, le jeune noble Guérin de Valloire, atteint du mal des ardents ou feu de Saint-Antoine ou encore feu sacré, fit le vœu de se consacrer aux malades en cas de guérison et se mit sous la protection de Saint-Antoine qui avait vaincu le feu de la tentation. Le mal des ardents est provoqué par l'ingestion d'ergots de seigle. Les symptômes sont soit une forme convulsive avec spasmes douloureux, diarrhées, vomissements et hallucinations, soit une forme gangreneuse débutant par des démangeaisons et sensations de chaleurs puis apparitions d'ulcères, de membres douloureux avec nécrose et gangrène sèche (noircissement des membres faisant croire à des brulures). Ayant été guéri, Guérin de Valloire créa, en 1095, avec son père Gaston, un hospice et une maison de l'Aumône près du prieuré pour soigner les maladies contagieuses comme la lèpre, la peste ou le mal des ardents.

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Un des bâtiments conventuels, l'actuel musée

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Fontaine à côté de la "cave des pestiférés" dans le village

En 1191 débuta un différend concernant le droit de quête entre les bénédictins et le grand maitre des Antonins, Pierre Soffred. Les Antonins souhaitaient également construire une chapelle auquel les bénédictins s'opposèrent. Le grand maitre des Antonins, Falque 1er, obtint en 1208 de l'archevêque de Vienne, Humbert II, cette autorisation. À cette époque, l'ordre des Antonins possédait neuf commanderies dans le Dauphiné et avait essaimé jusqu'en Hongrie. En 1218, le pape Honorius III autorisa les Antonins à prononcer les vœux monastiques. Ils deviendront un ordre monastique indépendant des Bénédictins en 1231. Le pape Innocent IV leur imposa la règle des chanoines de Saint-Augustin en 1247. Ils obtinrent, en 1256, du pape Alexandre IV l'autorisation de construire un hôpital aux portes du prieuré des bénédictins pour accueillir les malades du mal des ardents. Le conflit avec les bénédictins resurgit en 1273 où ceux-ci allèrent jusqu'à Rome pour contester les dons et les legs dont bénéficiaient les Antonins. La même année, les bénédictins débutèrent la construction de la grande abbatiale.

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Le grand escalier du parvis

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En 1289, Aymon de Montagne, grand maitre des Antonins, obtint de l'abbé de Montmajour, Étienne de Sola de Montarene, la libre et entière possession du prieuré jusqu'à la fin de sa vie. Aymon avait préalablement racheté la seigneurie de Châteauneuf. Aymon fit chasser par les armes les bénédictins du prieuré avec pour conséquence l'arrêt des travaux de l'abbatiale. En 1293, l'abbé de Montmajour demanda à l'archevêque de Vienne de rétablir son autorité sur le prieuré. Celui-ci fut érigé en abbaye confiée aux Antonins en 1297 par le pape Boniface VIII. Le pape obligera cependant les Antonins à dédommager l'abbé de Montmajour par paiement d'une rente annuelle de 1300 livres. Aymon de Montagne fut le 1er abbé de cette nouvelle abbaye. Ponce d'Alairac, nouvellement élu abbé en 1317, demanda aux habitants du bourg de participer au financement du mur d'enceinte de l'abbaye. L'abbé Guillaume Mitte reprit, en 1337, la construction de l'abbatiale grâce au legs de son frère Ponce Mitte. Toutes les maisons et commanderies de l'ordre participèrent au financement de la construction encouragé par le pape Urbain V. Ponce Mitte, neveu de Guillaume Mitte, fit construire, en 1370, le grand réfectoire. La construction de l'abbatiale prit fin en 1490.

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L'ancienne maison de l'abbé

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La cour de l'abbaye

L'historien de l'ordre des Antonins, Aymar Falco, nota, en 1534, juste avant les guerres de Religion, la présence au sein de l'abbatiale des reliques de 80 saints. En 1562, les bandes armées du baron des Adrets pillèrent l'abbaye en détruisant les statues des portails et la châsse de Saint-Antoine. En 1567, les protestants incendièrent la toiture et le clocher de l'abbatiale. Ils provoquèrent de nouvelles dégradations en 1580 et en 1586. Les travaux de restauration débutèrent en 1593. Le grand cloitre qui servait de lieu de sépulture pour les moines jusqu'au XVIe siècle fut remblayé en 1640 pour former une vaste cour. En 1657 fut construite la porterie qui servit de frontière entre le bourg et l'abbaye. Elle est constituée d'un corps central flanqué de deux pavillons.

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La porterie (côté interne)

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La porterie (côté externe)

L'abbé Nicolas Gasparini, en fonction de 1732 à 1747, constata, en 1746, l'absence de nouveau novice depuis plusieurs années. Ce constat le poussa à démissionner de sa fonction. Son successeur développa l'étude des sciences pour former des théologiens, des littérateurs, des antiquaires et des artistes. En 1766, le roi de France Louis XV créa la "commission des réguliers" chargés d'examiner les abus des ordres monastiques. La commission était dirigée par le cardinal Loménie de Brienne. Celui-ci signifia, en 1771, à l'abbé général de l'ordre des Antonins que leur ordre ne pouvait subsister en l'état. En 1774, l'ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem proposa à l'ordre des Antonins de se réunir. Réunion réalisée en 1777 après le consentement du roi et du pape. Les hospitaliers vendirent les bâtiments et les possessions qui ne leur étaient pas utiles et confièrent la gestion des hôpitaux à la ville. En 1787, les dames chanoinesses de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem s'installèrent à l'abbaye. Elles furent obligées de la quitter en 1792 après la Révolution française. Les bâtiments furent vendus comme bien national et le trésor, les objets d'art et les tableaux furent mis sous scellés à Grenoble puis oubliés par les révolutionnaires. L'abbaye fut classée en 1840 par Prosper Mérimée. Les restaurations pour réparer les dégâts de la Révolution, bien moindre que ceux des guerres de Religion, débutèrent en 1844. L'abbaye fut classée Monument historique en 1981, le parvis, le portail et le grand escalier le furent en 1993.

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Ces photographies ont été réalisées en octobre 2017.

 

Y ACCÉDER:

L'abbatiale est librement accessible dans le village de Saint-Antoine-l'Abbaye.

 



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Cette page a été mise en ligne le 22 janvier 2018

Cette page a été mise à jour le 22 janvier 2018