Suivez les Lieux-Insolites en France sur INSTAGRAM
L'église de Saint Dizier l'Évêque
Depuis le VIIIe siècle, l'église de St Dizier l'Évêque fait l'objet d'un pèlerinage. Les fidèles viennent demander à St Dizier la guérison des maux affectant la tête.
Parti de Rennes (ou de Rouen ?), l'évêque Desiderius (Dizier), son diacre Regnifridum (Reinfroy) et son serviteur Willibert, après un pèlerinage à Rome, étaient allés convertir à la vraie foi les hérétiques Alamans. Ayant accompli leur mission au pays de Bade (outre Rhin), nos trois compagnons retournèrent chez eux chargés de nombreux objets de culte fort précieux. Ils arrivèrent sur ces plateaux arides qu'on appelle le Haut Pays et qui forment les confins du Territoire de Belfort. Ces plateaux, sans rivières et sans puits (à l'époque), dominent un étroit ravin au fond duquel murmurent de fraiches sources. Au bord du ravin, quelques habitations s'étaient regroupées autour d'une modeste église dédiée à St Martin.
Si perdue que fût cette contrée, le diable fut fort courroucé par l'arrivée de ces saints hommes. Bien décidé à les chasser de son territoire, il bondit de rocher en rocher à leur rencontre. Mais, miracle, un des rochers s'amollit comme de la cire au contact des sabots fourchus chauffés par les flammes de l'enfer. Les pieds du diable s'enfoncèrent dans la roche, le retenant prisonnier tandis que Dizier s'éloigna en laissant dans la pierre une légère empreinte de sandales. En allant du Val de St Dizier au village de Villars le sec, les empreintes du diable et ceux de Saint Dizier sont toujours visibles au bord du chemin à l'ombre d'une croix en bois.
Le Pas du Diable
L'empreinte de St Dizier
L'empreinte du Diable
L'arrivée de Dizier à l'oratoire St Martin se répandit très vite et les habitants du Haut Pays accoururent de fort loin pour entendre les paroles de ce saint homme. Dizier célébra la messe et prêcha la bonne parole. Il s'adressa ensuite à la gardienne des lieux, qui se nomma Pomponia, pour lui demander de quoi étancher sa soif. Le pays étant fort aride et cette année, la sècheresse fort cruelle, il ne restait à la pauvre femme qu'un peu d'eau, à peine de quoi remplir une coupe. Elle offrit cependant sa précieuse réserve à son hôte. Dizier fit sur le vase qu'elle lui tendait, le signe de la croix puis se désaltéra longuement. Il ordonna ensuite de faire boire l'assistance tant qu'ils le désireraient. Le précieux liquide ne diminua pas dans le vase, mais finit même de déborder et de se répandre dans la pauvre demeure. Après ce miracle, Dizier et ses compagnons reprirent la route.
Parmi la foule ayant assisté au miracle, se trouvaient également quelques mécréants. Ceux-ci ne furent intéressés que par les riches vêtements et par les vases sacrés dont s'était servi Dizier lors de la célébration de la messe. Ils suivirent donc les trois hommes avec l'intention de les dépouiller. Dizier sachant qu'il allait mourir fit une halte. Il disposa une baguette en forme de croix et se mit à prier. La baguette se mit aussitôt à pousser et se métamorphosa en grand arbre gardant une forme de croix. Des hommes virent plus tard s'établir à cet endroit et fondirent le village de Croix.
Le trésor conservé dans la sacristie
Les mécréants les attaquèrent à cet endroit. Ils tuèrent le diacre Regnifridum et fendirent d'un coup d'épée le crâne de Willibert. Puis ils criblèrent Dizier de coup et le dépouillèrent en le laissant pour mort. La légende nous informe que les mécréants, au moment de partager leur butin, se disputèrent et s'entre-tuèrent jusqu'au dernier.
Avant de mourir, Dizier ordonna à son serviteur de s'entourer la tête d'une couronne de ronce et d'aller dire à Pomponia de venir avec un prêtre chercher leur corps pour les ensevelir dans l'oratoire de St Martin. Willibert obéit, s'entoura la tête de ronce et fut instantanément guéri de sa terrible blessure.
Le chef du pays, apprenant les faits, envoya des hommes chercher les corps des hommes de Dieu. Mais malgré leur effort, ils ne purent enlever les corps du lieu du méfait. Willibert de retour avec Pomponia et le prêtre, soulevèrent les corps sans nulle peine et les ramenèrent à l'oratoire où ils furent enterrés.
Durant la construction de la crypte destinée au sarcophage du saint, Pomponia alla à la source du Val de St Dizier chercher de l'eau pour les ouvriers. Malheureusement, elle ne trouva pour seul récipient qu'un vieux crible laissé devant une grange. Sûre de sa foi, elle le prit et le remplit à la source sans perdre la moindre goutte. Durant toute la durée des travaux, cet étrange récipient servit à désaltérer les ouvriers.
Willibert vécut encore de nombreuses années à veiller sur le tombeau du saint. Il garda toujours sa couronne de ronce en souvenir du miracle qui le guérit. Les miracles se multipliant, de nombreux pèlerins ne tardèrent pas d'accourir à St Dizier.
La tradition situe la mort de St Dizier un 17 septembre quelque part entre 663 et 721. La 1ere mention historique de la paroisse de St Dizier concerne la donation que fit le comte d'Eberhard, duc d'Alsace, en 736 à l'abbaye de Murbach dans la vallée de Guebwiller. Cette donation concerne une basilique située à Delle où repose le corps de St Dizier. Cette donation fut confirmée par Conrad 1er, roi de Germanie en 913. En 1274, l'abbé Rodolphe de Steinbrunn vendit le domaine de Delle au comte Thierry IV de Montbéliard pour la somme de 450 marcs d'argent. Vers 1300, le domaine fut vendu à Albert 1er de Habsbourg, duc d'Autriche. En 1320, le domaine de Delle fut donné en fief au comte de Ferrette avant de revenir en 1324 par mariage aux possessions autrichiennes. St Dizier fut comme les autres possessions autrichiennes d'Alsace, rattaché à la France par les traités de Westphalie en 1648. En 1658, le roi donna l'ensemble de ces domaines au Cardinal de Mazarin. Ils resteront dans cette famille jusqu'à la révolution. A la révolution, St Dizier devient une commune du canton de Delle et en 1937, elle adopta le nom de St Dizier l'Évêque.
L'intérieur de l'église
L'autel actuel
La tradition situait le tombeau du saint au milieu de l'avant-choeur de l'église. Les travaux de rénovation effectués en 1853 permirent de trouver à cet endroit à 1,50 m de profondeur le sarcophage. En l'ouvrant, on y découvrit un tibia, seule relique subsistant à St Dizier du saint. Les reliques de St Dizier furent éparpillées dans les différentes églises dépendantes de l'abbaye de Murbach. L'enlèvement des reliques a eu lieu probablement au début du Xe siècle lors des grandes invasions. Le sarcophage fut refermé et réenterré. En 1880, l'abbé Faivre fit redégager le sarcophage. En 1881 fut aménagée la crypte actuelle afin d'exposer le sarcophage et on y plaça une effigie en cire du saint.
Le sarcophage de Saint Dizier
L'effigie en cire de Saint Dizier
Au-dessus du sarcophage, dans l'avant-choeur était disposé un autre sarcophage ayant la forme d'une maison. En 1810, le curé Giraudeau voulant faciliter la circulation des fidèles, fit scier les deux extrémités du sarcophage. En 1853, l'abbé Marion qui le trouvait gênant le fit transférer dans la sacristie, où on peut l'admirer aujourd'hui. Le sarcophage, long de 1,32 m, large de 75 cm et haut de 1,17 m est évidé et est percé de deux ouvertures de 36 cm de largeur. Les sculptures dont il est orné se rapprochent de l'art roman du XIIe siècle, mais il est considéré comme bien plus ancien. Il pourrait avoir été exécuté dès la mort du saint, soit au VIIIe siècle. Ce monument est la "Pierre des Fous".
La Pierre des Fous
L'ancien sarcophage du saint devenu la Pierre des Fous
Dans la sacristie se trouve un sarcophage possédant deux compartiments longs chacun de 77 cm. Ce sarcophage fut réalisé au VIIIe siècle afin d'exposer à la dévotion du peuple les reliques de St Dizier et de St Reinfroy. Ce sarcophage était placé dans l'église entre deux piliers.
Le sarcophage double
St Dizier ayant guéri son serviteur Willibert dont les mécréants avaient fendu le crâne, les pèlerins invoquèrent son aide pour toutes les maladies de la tête. Au VIIIe siècle, on essayait de calmer les douleurs dentaires en y appliquant l'écritoire en corne du saint. Il se développa bientôt un pèlerinage destiné à guérir les personnes atteintes de folie. Peu à peu s'instaura une thérapie qui fut pratiquée jusqu'au milieu du XIXe siècle. A ce moment un médecin du voisinage menaça le curé de poursuite pour exercice illégal de la médecine. Il mit ainsi fin au traitement des fous. D'après une enquête de 1741, le traitement durait neuf jours. Durant ce temps, le malade couchait dans l'église dans un lit installé à l'endroit où se trouvent actuellement les fonds baptismaux. Chaque matin, le malade assistait à la messe et communiait. Le curé lui imposait son étole et récitait des prières puis il faisait sur lui trois signes de croix avec la "main de St Dizier". Cette "main de St Dizier" est un reliquaire en forme de main contenant un os d'un doigt du martyr. Le malade était confié à deux gardiens ou gardiennes s'il s'agissait d'une femme et le pain et le vin bénis étaient ces seuls aliments durant la cure. Après la messe, les gardiens faisaient passer le malade dans les ouvertures de la "pierre des fous" et lui plaçaient une couronne de fer sur la tête en souvenir de Willibert. Le malade était amené chaque jour, le matin et le midi, au Val St Dizier où il était plongé dans la source froide du lavoir. On procurait également au malade le calme de la campagne, des promenades au grand air et une atmosphère de cordiale gaieté. Toutes les maisons du village lui étaient ouvertes et il participait aux veillées. Tout St Dizier était en sorte un asile. La médecine moderne n'a pas beaucoup mieux à offrir pour traiter la folie.
Le passage des fous
L'ouverture opposée
Cette ouverture n'est pas très large!
Ces photographies ont été réalisées en janvier 2008.
Y ACCÉDER:
De Belfort, rendez-vous à Sevenans par l'autoroute puis prenez la RN19 vers Grandvillars et Delle. A Grandvillars, allez à Fêche - l'église puis à St Dizier l'Évêque pour visiter l'église.
De là vous pouvez descendre vers le Val de St Dizier et vous pouvez vous rendre au village de Croix ou l'on peut admirer deux superbes puits à balanciers.
Le lavoir du Val St Dizier où les fous étaient baignés
Les puits à balancier du village de Croix
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.
Cette page a été mise en ligne le 13 juin 2004
Cette page a été mise à jour le 24 février 2015