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Le monastère royal de Brou

Marguerite d'Autriche fit de ce modeste prieuré un témoignage de son éternel amour qu'elle vouait à son jeune époux Philibert II le Beau, duc de Savoie. Elle en fit le Taj Mahal bourguignon.

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L'origine du lieu se situe en 927. Saint Gérard, évêque de Mâcon de 886 à 926, y fonda un ermitage pour se retirer du monde. Il y mourut en 958. Ses disciples l’enterrèrent sur place. En 1084, Hugues, archevêque de Lyon, fixa les limites de la dimerie pour le prieuré et fit ériger une église dédiée à saint Pierre sur le tombeau de saint Gérard. En 1319, le prieuré, délaissé, fut remis par Jean de Clermont au comte Amédée V de Savoie à la condition d'y entretenir un religieux pour le desservir.

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Le 10 septembre 1504, Philibert II le Beau, duc de Savoie, mourut à 24 ans après avoir bu l'eau glacée d'une fontaine au cours d'une partie de chasse effectué sous un soleil de plomb. Il était le mari de Marguerite (1480-1530), fille de l'empereur Maximilien 1er de Habsbourg et de Marie de Bourgogne. Marguerite décida de reconstruire le prieuré et l'église St-Pierre de Brou situés près du lieu de l'accident pour en faire le tombeau de son bien-aimé. Marguerite de bourbon, mère de Philibert, avait, vingt ans plus tôt, également fait vœu de reconstruire le prieuré afin d'obtenir la guérison de son mari.

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Le passage entre le transept sud et le 1er cloitre

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La nef de l'église

Le 10 août 1506, Marguerite d'Autriche obtint du Pape Jules II l'autorisation de fonder en ce lieu une église dédiée à saint Nicolas de Tolentin (fêté le jour de la mort de Philibert) et un monastère pour 12 religieux augustins de la congrégation de Lombardie. Le 28 août 1506, sous une pluie battante, Marguerite posa la première pierre. Le monastère fut terminé en 1512. L'église fut consacrée le 22 mars 1532 par l'évêque Jean Joly de Fleury.

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En 1509, le roi des Pays-Bas Philippe, frère de Marguerite, mourut. Son fils ainé, le futur Charles Quint, n'ayant que 6 ans, Maximilien 1er nomma Marguerite régente des Pays-Bas. Elle exercera son pouvoir durant 25 ans. Elle s'installa à Malines, mais maintint le projet de Brou qu'elle surveilla à distance. Elle en fit également le lieu de sa sépulture. Marguerite nomma Louis Van Boghem, maître maçon (il dirigeait la construction) et Guillaume de Maxin, maître de l'œuvre (il fournissait les matériaux). En 1516, elle passa commande des dessins des tombeaux à Jean Van Roome, dit Jean de Bruxelles. Ils furent réalisés par l'atelier de sculpteurs du Brabant. L'architecture et les décors furent terminés en 1522. Les gisants et les angelots furent réalisés entre 1526 et 1531 par Conrad Meyt. Marguerite mourut en 1530, deux ans avant la fin des travaux.

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Le tombeau de Phillibert

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Le tombeau de Marguerite d'Autriche

En 1557, une bande armée, au service du Roi de France, pilla le monastère et arracha le plomb de la toiture de l'église pour fabriquer des munitions lors du siège de Bourg-en-Bresse. Des difficultés financières conduisirent le 4 mars 1658 au remplacement des augustins de la congrégation de Lombardie par les augustins de la congrégation de France qui était plus riche. Le dôme et la lanterne qui coiffaient le clocher menaçant de s'effondrer furent remplacés en 1759 par une flèche. La Révolution française supprima le monastère et la vingtaine de moines augustins furent chassés en 1791. Le député conventionnel Thomas Riboud obtint cependant de l'assemblée constituante que l'église soit classée monument national. Le cloître abrita durant l'hiver 1793/1794 le 1er régiment de Hussard. Le 31 janvier 1794, la municipalité de Bourg-en-Bresse y enferma les prêtres abdicataires.

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Le tombeau de Marguerite de Bourbon

Classée Monument historique en 1887, la ville de Bourg-en-Bresse transforma les lieux en musée en 1922. Le toit de l'église, modifié au cours du XVIIIe siècle en toiture à double pente, retrouva son aspect d'origine, toiture flamande à simple pente très haute, lors de sa restauration en 1990.

L'église est construite dans un style gothique flamboyant avec une profusion décorative. La nef, dépouillée, est baignée de lumière par de larges baies munies de verrières incolores. Elle est flanquée de bas côtés et de chapelles. Le transept sud est orné d'un vitrail contant l'histoire de Sainte Suzanne. À côté se situe la chapelle d'Antoine de Montecuto, l'aumônier de Marguerite d'Autriche. Dans le transept nord se trouve la chapelle de Gorrevod, gouverneur de Bresse, chevalier de la Toison d'Or. Cette chapelle est ornée du vitrail contant l'incrédulité de saint Thomas.

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Le transept sud

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Un sarcophage dans la chapelle de Gorrevod

Un jubé orné d'une exubérante végétation de pierre sépare le dépouillement de la nef du majestueux chœur. Celui-ci contient, en son centre, le tombeau de Philibert flanqué, à droite, de celui de sa mère, Marguerite de Bourbon, et à sa gauche, de celui de sa femme, Marguerite d'Autriche. Le tombeau de Philibert constitue le point de convergence du chœur nimbé de lumière multicolore en provenance des majestueux vitraux. À l'origine, le chœur était pavé de faïences polychromes dont il subsiste quelques vestiges au pied des tombeaux. Le sceau du mariage idéal, les initiales du couple "P" et "M" nouées par des lacis d'amour, alternant avec la devise de Marguerite "Fortune infortune fort une" (la fortune et l'infortune me renforcent ou la fortune importune fort une femme) y sont inscrit dans la pierre.

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Le jubé

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Le chœur de l'église

Le tombeau de Philibert porte deux gisants en marbre de carrare superposé. Celui du haut le représente "au vif" en costume de cour et celui du bas le représente en transi, image de la mort idéalisée, nu drapé d'un mince linceul. Il a les yeux entrouverts tournés vers le tombeau de Marguerite. Comme pour son époux, le tombeau de Marguerite porte deux gisants. Celui du haut la représente vivante sur un majestueux lit de parade serrant sur son cœur une médaille avec le profil de Philibert et celui du bas, en transi. La position de la sépulture fait que tous les matins les premiers rayons du soleil mettent en valeur la douceur de son visage. Le tombeau de Marguerite de Bourbon, la mère de Philibert, est installé en enfeu dans le mur sud du chœur. Son gisant la représente en habit de cour. Le tombeau est entouré de petits pleurants.

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Le tombeau de Phillibert

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L'iconographie des lieux reflète la piété de Marguerite qui se battit contre l'hérésie protestante naissante. Durant sa vie, elle commanda un grand nombre d'œuvres d'art religieuses. Le thème principal des vitraux est la croyance en la vie éternelle. Les vitraux du chœur ont été réalisés entre 1525 et 1531. Au centre sont représentées deux apparitions du Christ ressuscité, l'une à sa mère, l'autre à Marie Madeleine. Elles sont inspirées de gravure de Dürer. Sur la gauche se trouve Philibert représenté par saint Philibert de Tournus. Il est entouré des blasons et de la généalogie des maisons de Savoie et de Bourbon. À droite est représentée Marguerite sous les traits de sainte Marguerite. Elle est entourée des blasons des maisons de Habsbourg et de Bourgogne.

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Dans la chapelle attenante au tombeau de Marguerite se trouve le plus grand vitrail de Brou représentant l'Assomption de la Vierge à laquelle Marguerite voua un attachement particulier. Il est également inspiré des œuvres de Dürer. Dans cette chapelle se trouve un magistral retable en albâtre dédié aux "Sept joies de la Vierge". Œuvre d'un atelier flamand, il retrace les épisodes heureux de la vie de la Vierge Marie. Un deuxième retable, malheureusement disparu, était dédié aux "Sept douleurs de la Vierge". À côté du tombeau de Marguerite, nous pouvons admirer une frise inspirée du Titien qui narre le triomphe de la Foi.

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Le vitrail de l'Assomption de la Vierge

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Le retable dédié aux Sept joies des la Vierge

Les stalles du chœur ont été réalisées en chêne clair entre 1530 et 1532. Le bâti de la charpente, les sièges et leurs miséricordes ainsi qu'une partie du décor flamboyant sont l'œuvre d'un atelier local dirigé par Pierre Berchod, dit Terrasson. Les parties qui surmontent et encadrent les sièges et la statuaire furent réalisé par un atelier flamand. La statuaire des stalles sud-est inspirée de l'Ancien Testament alors que celle du nord est inspirée du Nouveau Testament.

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Les stalles

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Le monastère attenant à l'église est très vaste compte tenu du nombre de moines (12) prévu à l'origine. Il comprend 2700 m2 de salles et 2400 m2 de galeries. Le 1er cloître constitue le sas d'entrée entre le monde extérieur et la communauté des moines. Il est constitué de quatre galeries voûtées d'ogives de style gothique au rez-de-chaussée et de quatre galeries avec des plafonds cloisonnés au 1er étage. Du côté ouest se trouve le bâtiment des hôtes destiné au logement de Marguerite et de sa suite. Il abrite aujourd'hui l'accueil du site. Sur le côté est du 1er et du 2e cloître se trouve le bâtiment principal. Il abritait, au rez-de-chaussée, la sacristie, les salles capitulaires nord et sud, l'escalier du dortoir et le réfectoire. Le réfectoire est la plus vaste salle voûtée d'ogives du monastère. Au 1er étage se trouvaient un dortoir (long couloir) et vingt cellules individuelles.

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Le 1er cloitre

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Le 2e cloitre

Le 2e cloître situé au sud du 1er est le lieu de méditation et de promenade des moines. Constitué de quatre galeries hautes au rez-de-chaussée et de quatre galeries basses au 1er étage, il est le plus vaste et ne possède aucune ouverture sur le monde extérieur hormis le ciel. Le 3e cloître, dont la construction fut décidée au cours des travaux, est situé à l'est du bâtiment principal. Il est de style bressan et comprend trois galeries plafonnées hautes au rez-de-chaussée et basse au 1er étage. Il était réservé aux communs. Il est flanqué, côté sud, au rez-de-chaussée de la cuisine et du chauffoir (réfectoire d'hiver) et au 1er de la bibliothèque. Du côté est, se trouve la procure (office du procureur chargé des intérêts matériels des moines), une chambre pour les domestiques, une prison, une boulangerie avec deux fours et des latrines. La cour au centre de ce cloître est pavée de galets et comprend un puits couvert d'un toit en pavillon.

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Le dortoir

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Le 3e cloitre

Le bâtiment principal du monastère est un musée consacré aux œuvres d'art et à l'art décoratif du XIIe au XXe siècle. Y sont exposées une Vierge en majesté polychrome du XIIe, des peintures flamandes de l'époque de Marguerite, dont un de ses portraits en veuve réalisés par Bernard Van Orley, des peintures flamandes et hollandaises du XVIIe, des peintures françaises et italiennes du XIXe et des peintures abstraites et contemplatives contemporaines.

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La façade sud

Ces photographies ont été réalisées en mars 2015.

 

Y ACCÉDER:

Le monastère royal de Brou est situé au centre-ville de Brou. Son accès est fléché.

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 15 août 2015

Cette page a été mise à jour le 15 août 2015