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Le prieuré de Grammont

C'est dans la forêt de Chassay que fut fondé en 1197 le prieuré de Grammont. Il s'agit d'une des nombreuses maisons filles de l'ordre de Grandmont dans le Limousin. Cet ordre religieux fut fondé par Étienne de Muret. Originaire de Thiers en Auvergne, il fut confié, très jeune, à Milon, archevêque de Bénévent en Italie. Il y découvre la vie des ermites calabrais et à son retour en 1075, il s'installe dans le bois de Muret à Ambazac. Il y est rejoint par quelques disciples, dont Hugues Lacerta. Étienne de Muret prône une vie en grand dépouillement dans la solitude des forêts ou du désert. Il meurt en 1125 et est inhumé à Grandmont. Il sera canonisé en 1189.

Étienne de Muret n'a pas laissé de règle de vie pour son ordre. Celle-ci sera rédigée par Étienne de Liciac, prieur à Grandmont de 1139 à 1163, avec l'aide d'Hugues Lacerta. Cette règle interdit la possession d'églises, troupeaux, revenus fixes et de tous biens hors de l'enclos. La possession d'un four et d'un moulin, évitant les contacts avec l'extérieur, est cependant autorisée. La consommation d'œufs, de fromages et de poissons en dehors des périodes de jeûne est autorisée, mais la viande et la graisse sont formellement interdites. Le silence est de règle, la communication indispensable (comme demander un plat durant le repas) doit se faire par signe. Trouver la paix intérieure et la solitude en étant séparé du monde est le principe essentiel de la règle. La règle interdit de quitter le monastère pour prêcher ou entendre des prédications. S'ils sortent, exceptionnellement, c'est toujours par deux et en récitant les " heures " pour les clercs et le " Pater Noster " pour les frères convers. Ils respectent les paroles du prophète Isaïe " la justice se développe dans le silence et la paix ". Les religieux (clercs) se consacrent exclusivement à la prière, les travaux sont confiés à des frères convers laïcs. Les frères doivent leurs subsistances à leur propre travail ou à la générosité de Dieu qui les dispense de tout retour dans le monde. La règle impose également une fraternité religieuse et une obéissance au prieur, assimilée à l'obéissance à Dieu. Le prieur est élu par les frères d'un commun accord et sans intervention de l'extérieur.

La rigueur de la règle et son application sans faille ont frappé leurs contemporains. De généreux donateurs comme Aliénor d'Aquitaine, Henri II Plantagenet ou Richard Cœur de Lion vont prendre d'affectation ce groupe d'ermites. L'ordre va croitre rapidement et bientôt cent cinquante maisons vont parsemer la France et l'Angleterre. Mais dès la fin du XII^e siècle, un malaise vient perturber les clercs qui regrettent les prérogatives habituelles dont bénéficient les religieux des autres ordres. De nombreuses tensions vont jalonner l'histoire de l'ordre au cours des siècles. En 1317, le Pape Jean XXII regroupe les maisons autour de 39 prieurés et la maison-mère érigée en abbaye. La maison de Chassay-Grammont est réunie avec celle du Bois d'Allone. La règle sera également assouplie en ce qui concerne la pauvreté collective. L'ordre contribua ainsi au succès des émailleurs de Limoges qui au XIII^e siècle conçurent de nombreux reliquaires destinés à la maison-mère. Après une ultime tentative de réforme au cours du XVII^e siècle, l'ordre disparait en 1772.

La maison des hôtes

Du prieuré de Grammont subsiste un petit ensemble de bâtiments formant un carré autour du cloitre. Celui-ci fut probablement détruit durant les guerres de religion. Il était constitué de quatre galeries couvertes dont la charpente prenait appui sur des corbeaux en pierre insérée dans la façade des bâtiments et sur des petites arcades s'appuyant sur des colonnettes jumelées. Un escalier (reconstruit en 1990) reliait le cloitre au dortoir des clercs situé au 1^er étage au-dessus de la salle capitulaire. Les murs du cloitre étaient recouverts d'enduits peints dont des traces sont toujours visibles.

À l'ouest se trouve la maison des hôtes où étaient reçus les visiteurs. Dans ce bâtiment, se trouvaient au rez-de-chaussée, le réfectoire des visiteurs et des frères convers. Le plafond du réfectoire était une voute en pierre qui fut détruite en 1951. Au 1^er étage se trouvait le dortoir des frères convers et des visiteurs. Ce bâtiment possède deux couloirs transversaux. Le premier, située à l'extrémité sud, était l'entrée des visiteurs. Le deuxième couloir, situé vers le milieu, donnait sur le cloitre et desservait la cuisine située à l'extrémité nord du bâtiment.

La cuisine forme l'angle nord entre la maison des hôtes et le réfectoire des clercs. Nous pouvons y voir une grande niche sur le mur sud servant de placard. La partie centrale de la cuisine était occupée par une monumentale cheminée aujourd'hui disparue. Le mur nord, effondré en 1859, comportait un accès au puits. Sur le mur est se remarque le passe-plat donnant sur le réfectoire. Celui-ci possède une ouverture côté cuisine et deux côté réfectoire.

Le passe plat côté cuisine

Le bâtiment nord est en grande partie occupé par le réfectoire des clercs. En 1295, ils étaient cinq. Le plafond de cette salle est constitué de six voutes d'ogives supportées par deux colonnes centrales et six colonnes adossées aux murs. L'éclairage de la salle est assuré par six fenêtres dans le mur extérieur. Les murs sud et nord sont doublés par une banquette en pierre. À remarquer la petite niche dans le mur opposé au passe-plat et destiné à recevoir le livre du frère lecteur. Celui-ci assurait la lecture des Évangiles durant les repas.

Le refectoire

Dans le bâtiment ouest se trouve la salle capitulaire. Celle-ci, de plan carré, est couverte de quatre voutes d'ogives prenant appui sur une colonne octogonale centrale et des piliers adossés. Les chapiteaux de ces colonnes sont ornés d'un décor végétal. La pièce est éclairée par deux fenêtres extérieures et de larges ouvertures donnent sur le cloitre. Une banquette en pierre court le long des murs. Les clercs se réunissaient tous les matins à 6h30 dans cette salle pour l'examen des affaires courantes. Toutes les décisions sont prises ici.

Le côté sud est occupé par la chapelle. Celle-ci est constituée d'une nef unique prolongée par un chœur en hémicycle. Le décor est austère. L'éclairage de la nef est assuré par une lancette dans le mur ouest et le chœur est baigné par le soleil matinal au travers de trois baies amplement ébrasées. La chapelle était couverte par une voute en berceau brisé sur la nef et par une voute à huit arêtes dans le chœur. Cette voute fut détruite, probablement durant les guerres de religion, et remplacée en 1637 (?) par la charpente actuelle.

Ces photographies ont été réalisées en juillet 2012.

Y ACCÉDER:

De Chantonnay, prendre la direction de Pouzauges par la D960B. L'accès au prieuré se trouve sur la gauche entre St-Germain de Prinçay et St-Prouant (panneau indicateur).

Le prieuré est ouvert du 1^er juin au 16 septembre de 10 h à 12 h 30 et de 13 h 30 à 19 h. La visite est payante (3 € en 2012).

Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 14 octobre 2012

Cette page a été mise à jour le 23 février 2015