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Le cimetière espagnol

La guerre civile espagnole chassa de nombreuses familles qui virent se réfugier en France. En 1939, le gouvernement français décida de créer des camps d'internements pour ces réfugiés indésirables. Un de ces camps était situé à Septfonds.

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En juillet 1936, le général Franco organisa un soulèvement contre la république espagnole. Une association de Montauban organisa, peu après, une collecte destinée à venir en aide aux républicains espagnols. Les denrées alimentaires et les produits pharmaceutiques récoltés permirent de secourir la détresse des familles et soigner les blessés. En septembre 1936, les premiers réfugiés espagnols débarquèrent, sans ressources, à Montauban. Ils fuyaient la ville frontière d'Irún et l'avance des troupes nationalistes. Deux mille trois cents réfugiés furent répartis dans la région. En mai 1938, le gouvernement français assigna à résidence les étrangers jugés indésirables et en novembre 1938, ce même gouvernement décida l'internement administratif de ces étrangers. Le décret du 12 novembre 1938 donna naissance aux camps d'internements (mis en place en 1939) regroupant les étrangers indésirables (les Espagnols et les Allemands antinazis ayant fui l'Allemagne depuis 1933). Ces étrangers furent considérés comme suspects après la déclaration de guerre en septembre 1939.

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En janvier 1939, les troupes nationalistes envahirent Barcelone. Les civils fuirent en masse vers la France alors que l'armée républicaine se replia vers la frontière. Celle-ci, étant fermée depuis juin 1938, fut ouverte pour les civils. Cinq cent cinquante mille hommes, femmes, enfants et vieillards passèrent en France. Le 5 février 1939, ordre fut donné de laisser passer l'armée républicaine. Les républicains espagnols (républicains, antifasciste, anti-franquiste) furent regroupés dans des camps de concentration établis sur les plages du Roussillon. En février 1939, le préfet du Tarn-et-Garonne, sur ordre des autorités militaires, fit aménager des pâtures à moutons à Lalande et à Judes, lieudits de la commune de Septfonds, pour accueillir 15000 républicains espagnols. Trente baraques de 48 m sur 7 m furent construites par des entrepreneurs locaux. Orientées au sud-est, elles n'étaient fermées que sur trois côtés. Le côté sud restait ouvert. Elles étaient couvertes avec des tôles ondulées et pouvaient contenir 350 hommes serrés les uns contre les autres. Les dimensions avaient été déterminées avec des soldats sénégalais couchés au sol. Les camps étaient clôturés par une double rangée de fil barbelé au milieu desquels passait un chemin de ronde. Des miradors complétaient la clôture. Le premier camp (celui de Lalande) reçut 2500 républicains par jour à partir du 5 mars 1939. Après avoir subi des mesures d'hygiène, ils étaient transférés vers le camp de Judes. À partir d'août 1939, les plus âgés et les enfants étaient transférés vers le camp de Pomponne à Montauban.

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Les républicains étaient regroupés en compagnie de travailleurs étrangers de 250 à 400 hommes encadrés par des gradés espagnols et commandés par un militaire français. Ils participaient aux corvées du camp et à des travaux d'utilités publiques. Ce fut une main-d'œuvre agricole fournie aux propriétaires terriens qui en faisaient la demande. Ils seront par la suite transférés dans toute la France pour travailler dans les usines et les chantiers du mur de l'Atlantique sous la coupe de l'organisation Todt. Les indésirables, les propagandistes, les extrémistes et les suspects furent regroupés au camp du Vernet d'Ariège près de Pamiers qui était un camp répressif pour individus dangereux. De là, certains furent déportés à Mauthausen.

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Reconstitution d'une des baraques du camps (© Wikipédia)

Le 29 février 1940, le camp fut remis aux autorités militaires. Une partie servit de dépôts au régiment de marche des volontaires étrangers et une autre fut mise à disposition des 800 hommes de l'Armée Polonaise en France. Après la débâcle de juin 1940 et la proclamation de l'État de Vichy, le 11 juillet 1940, le camp de Judes devint un centre de démobilisation pour les volontaires étrangers (dont beaucoup de juifs). S'y côtoyèrent plusieurs milliers d'hommes d'au moins dix-huit nationalités. Les 3 et 4 octobre 1940, le régime de Vichy divulgua des lois stipulant que "les ressortissants étrangers de race juive pourront être internés dans des camps spéciaux sur décision du préfet". Le 1er novembre 1940, la tutelle des camps fut transférée du ministère de la Guerre à celui de l'Intérieur. En juillet 1941, des militants communistes (23 Français, 27 Espagnols et 1 Italien) furent arrêtés et furent interrogés au camp de Judes avant leur déportation à Dachau et Buchenwald. Le 4 août 1942, plusieurs milliers d'Israélites étrangers furent arrêtés juste avant la rafle du 26 août 1942. Quatre-vingt-quatre juifs internés à Septfonds furent alors livrés aux nazis. Le convoi n°30 du 9 septembre 1942 qui emmena 1000 juifs de Drancy à Auschwitz comptait 211 personnes en provenance de Septfonds.

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Après la libération, le gouvernement provisoire de la République en référence au décret-loi de 1938 et de la circulaire du 3 novembre 1944 condamnant les "faits de collaboration et les activités antinationaliste" maintenait l'internement administratif. Le camp de Judes devint un centre de séjour surveillé. Environ 500 hommes et femmes y furent internés. En mai 1945, les 133 derniers internés furent transférés au camp de Noé en Haute-Garonne. Le camp fut définitivement désaffecté le 10 juillet 1945 et toutes les archives du camp furent détruites. D'après Serge Klarsfeld, la destruction complète des archives est un fait rarissime.

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Le cimetière espagnol est situé à l'opposé du camp par rapport au village. Y sont inhumés 81 combattants républicains espagnols morts durant leur internement au camp de Judes ou à l'hôpital de Septfonds entre 1939 et 1940. Le cimetière fut réhabilité en 1978 sur l'initiative de Cesareo Bustos, réfugié espagnol et survivant de Mauthausen. Le monument, symbole de la solidarité franco-espagnole, fut financé par une souscription auprès de 1892 citoyens espagnols. Une cérémonie du souvenir y est organisée tous les 8 mai.

Ces photographies ont été réalisées en septembre 2014.

 

Y ACCÉDER:

De Septfonds, prendre la D76 en direction de St-Cirq. Après le début de la forêt, prendre le chemin à gauche vers Clavel. À Clavel, prendre à gauche et à la fourche suivante à droite.

 



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Cette page a été mise en ligne le 13 décembre 2014

Cette page a été mise à jour le 29 janvier 2017