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Les fresques de Sillegny

Dans ce petit village lorrain se cache une merveille de l'art religieux. La petite église du XVe siècle est recouverte de fresques peintes au cours du XVIe siècle. Certains auteurs n'ont pas hésité à parler de la chapelle Sixtine lorraine.

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L'origine de Sillegny remonte à un domaine rural romain établi à proximité de la voie romaine reliant Dieulouard à Metz. Au XIe siècle, le domaine fait partie des biens de l'abbaye St Pierre de Metz et reviens au XIIe siècle à l'évêché de Metz. En 1226, le domaine porte le nom de Sulineium. L'évêque Jacques de Metz le donne, en 1246, en fief à l'abbaye Ste Marie aux Nonnains qui le gardera jusqu'à la Révolution. En 1307, le village devient le siège d'un archiprêtré regroupant plusieurs paroisses environnantes. La tour clocher fortifiée aurait été construite aux alentours de 1329 (date gravée dans le cintre d'une fenêtre détruite en 1944). Cette église fortifiée fut cependant de peu de secours contre les ravages de la peste et de la famine qui sévirent en 1348.

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L'église de Sillegny fut construite au cours du XVe siècle dans le style gothique. Elle se compose d'une nef à deux travées prolongeant la tour clocher, d'un transept décentré vers le sud et d'un chœur en abside polygonal. La voute du chœur est composée d'un remarquable réseau d'ogives. Au début du XVIe siècle, les nonnes de Ste Marie aux Nonnains envoyèrent des peintres (d'origine italienne selon certaines sources) pour peintre les murs de l'église. C'était une pratique assez courante à l'époque de représenter des scènes de la Bible sur les murs des églises sous la forme de peinture ou de sculptures. Cela permettait aux prêtres d'instruire les fidèles qui étaient, pour la majorité, totalement illettrés. Le travail dura de longs mois et s'arrêta à la mort du curé. Il ne reprit qu'après la fin des guerres de religion et des troubles liés à la succession des Ducs de Lorraine et que le cardinal Jean IV de Lorraine-Vaudemont, évêque de Metz, eut nommée un nouveau curé. En 1635, l'église échappa à la destruction lorsque les Suédois ravagèrent la région durant la guerre de Trente Ans.

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À une date indéterminée, les fresques furent recouvertes par un badigeon blanc. La mode des fresques était révolue et la sobriété des murs d'église était de mise. En 1826, une nouvelle couche de badigeon fut appliquée. En 1845, les travaux préparatoires à la mise en peinture de l'abside du chœur permettent la redécouverte des fresques. L'abbé Schnabel, en charge de la paroisse, alerta les archéologues qui décidèrent de restaurer les peintures. L'artiste peintre messin Malardot fut chargé du travail qui dura 20 ans. Après l'annexion de l'Alsace et de la Moselle, les autorités allemandes procédèrent à l'inventaire de tous les biens culturels. Ils classèrent l'église Monument historique en 1881. Le comte Zeppelin finança, en 1911, les travaux d'assainissement de l'édifice où l'humidité menaçait les fresques. Il fit également poser des chenaux en cuivre qui furent récupérées cinq ans plus tard par l'armée pour en faire des obus. La même année, l'entreprise Bardenhewer de Cologne reprit la restauration des peintures. Durant ces travaux, le Belge Lynom et l'irlandais Francis Lynch retrouvent de nouveaux dessins.

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Le Christ crucifié

Un nouvel épisode dramatique de l'histoire vint frapper les fresques en 1944. Les combats de la libération du joug nazi que livrèrent les Américains en Lorraine détruisirent Sillegny à 95%. L'église échappa de peu aux bombardements, seul le haut du clocher fut détruit. Les fresques ont cependant souffert. Les travaux de réparation dureront de 1946 à 1963. Une nouvelle campagne de restauration de 1993 à 2004 redonna un nouvel éclat aux peintures.

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Le mur au-dessus de l'entrée porte la fresque la plus remarquable et la plus grande de l'église. Elle couvre 42 m2 et fut sévèrement endommagée par les bombardements de 1944. Elle représente le jugement dernier tel que le décrit l'évangile de St Mathieu. Au centre du tableau trône, sur un arc en ciel, le Christ. Il rappelle à la vie les défunts à l'aide de quatre anges sonnant la trompette. La banderole reliant sa main droite à la tourelle du château du Paradis rappelle sa parole "Venez les bénis de mon Père" alors que celle reliant sa main gauche à la lance de Lucifer proclame "Allez maudit jusqu'aux enfers". Sur les marches du château, St Pierre, tenant la clé du Paradis, attend les âmes pures. Sur la droite du tableau attend Lucifer, enchainé à une colonne. Au pied du Christ se trouvent Marie et Jean-Baptiste, tous deux en prière pour sauver les âmes. En bas, à gauche, se tient l'archange St Michel, tenant la balance pour départager le bien du mal. Il brandit son épée pour frapper le diable qui essaie de fausser le jugement de la balance. À côté de lui est représenté le Purgatoire où les âmes sont purifiées. Un peu partout, les morts sortent des tombeaux et des anges les conduisent vers le Purgatoire d'où d'autres anges les emmènent vers le Paradis. Sur le côté droit de la fresque sont représentés l'enfer et ses tourments. Un damné est montré, embroché sur un gril, alors qu'un diable l'arrose d'eau avec une louche pour faire durer le supplice. À côté de Lucifer, un autre diable transperce la langue trop médisante d'un damné. En partie centrale, en bas, se trouve une deuxième représentation du Christ. Il s'agit d'un Christ "docteur" qui enseigne la foi. Visiblement, elle n'est pas en relation avec le tableau du Jugement dernier. Elle cache une porte, qui fut obstruée lors de travaux ultérieurs à la réalisation des fresques.

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Le Jugement Dernier

À la droite du Jugement dernier se dresse, sur la tour d'escalier d'accès au clocher, la gigantesque représentation de St Christophe. Ses 5 m de hauteur témoignent de l'importance qu'avait, pour les peintres itinérants de l'époque, le protecteur des voyageurs. Il est représenté marchant dans une rivière en portant l'enfant Jésus sur son épaule. De nombreux symboles sont représentés sur cette fresque. Le sol de la rivière est parsemé de cailloux et de rochers rendant la marche difficile comme l'est la vie. La sirène, symbole de la luxure, se regarde dans la glace et ne se préoccupe pas de vous aider. De minuscules barques symbolisent la fragilité des projets humains. Le poisson couronné représente ceux qui sont avides de pouvoir devant lesquels d'autres viennent faire des courbettes en offrant en sacrifice un des leurs. En haut de la falaise, une église avec son prêtre tenant une lanterne montre la vraie lumière, celle qui permet d'éviter toutes les embuches.

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St Christophe

En suivant un sens horaire, nous trouvons les représentations des saints. Nous avons successivement St Philippe, St Antoine, St Martin (le patron de l'église), St Thomas, St Fiacre, St Mathieu, St Joseph, Ste Marguerite, Ste Barbe, St Martin, un mystérieux chevalier, St Jacques le Mineur, un évêque inconnu, Ste Anne, Notre Dame de Lorette et Notre Dame de Piété.

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St Martin au centre et St Fiacre sur la droite

En pénétrant dans le chœur, nous trouvons sur la gauche l'arbre de Jessé. Ce tableau fait 3,60 m de large et 7 m de hauteur. Il représente la généalogie de Jésus selon le prophète Isaïe. De la poitrine du roi Jessé pousse un arbre portant sur ses branches les 12 rois, ses descendants. Son fils David, puis Salomon, Roboam, Abias, Asa, Josaphat, Ozias, Joatham, Ezéchias, Manassé, Josias et Jéchonias. Ce sont les ancêtres de Joseph. En haut de l'arbre, dans un bourgeon, est représentée Marie, épouse de Joseph, portant dans ses bras l'enfant Jésus.

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L'arbre de Jessé

Suivent ensuite dans l'abside, les tableaux de l'agonie du Christ au Mont des Oliviers, St Pierre, St Paul et la Crucifixion du Christ. Ces tableaux, ainsi que la représentation de St François d' Assise, de Ste Geneviève et de St Jacques le Majeur sur le tableau "La tristesse du Christ", ont été peints par Malardot, les originaux étant trop dégradés pour être restaurés.

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L'agonie du Christ

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St Mathieu, St Joseph, Ste Marguerite, St Barbe, St Martin, un chevalier inconnu,
St Jacques le Mineur et St Evêque

Sur le mur du chœur, en face de l'arbre de Jessé, sont représenté St Didier, St Jean, St Augustin et St Jacques le Majeur. À côté de St Didier et de St Augustin se trouvent de petits personnages en habits du XVIe siècle. Ces personnages, représentés en prières, sont certainement des donateurs ayant payé les artistes qui les ont incorporés dans les fresques pour les remercier.

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St Jean, St Didier, les donateurs, St Augustin et St Jacques le Majeur

Dans la partie droite du transept se trouvent St Sébastien, St Barthelemy, St François, Ste Geneviève, St Simon et St Jude.

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Ste Geneviève, St François, St Barthélemy et St Simon

Dans la nef suivent ensuite St Césaire, St André, Ste Agathe, St Pierre, la "Tristesse du Christ", St Paul et St Hubert. Dans le tableau "la Tristesse du Christ", Jésus, debout, est soutenu par les apôtres Jean (à sa gauche) et Pierre. L'apôtre Jacques est un peu à l'écart. Un personnage, représenté à genoux et portant une soutane et la tonsure, semble être le curé de Sillegny. Il est plus petit que les autres personnages, mais tout de même plus grand que les représentations des donateurs figurant sur d'autres tableaux.

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La tristesse du Christ

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St Hubert

La voute centrale du transept porte les représentations des quatre évangélistes. Ces représentations s'inspirent de la vision du prophète Ezéchiel et du livre de l'Apocalypse de St Jean. Dans cette vision, Dieu remet à l'Agneau les destinées du monde. À côté de Dieu se tiennent quatre "vivants aillés", un lion, un taureau, un être à visage humain et un aigle. L'évangile de Marc débute avec Jean-Baptiste, la "voix qui crie dans le désert". Il est, de ce fait, symbolisé par un lion. Luc débute son évangile par le sacrifice des animaux dont est chargé dans le Temple Zacharie, le père de Jean-Baptiste. Son symbole est le taureau. Mathieu parle en premier de la généalogie du Christ, son symbole est donc l'homme. Jean, qui évoque immédiatement le "Verbe de Dieu", s'est vu attribuer l'aigle. Les autres voutes sont décorées de branchages représentant la parabole du grain de sénevé (moutarde).

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Les évangélistes

Ces photographies ont été réalisées en août 2013.

 

Y ACCÉDER:

De Metz, prendre la D5 vers Montigny-les-Metz et Marly. Poursuivre sur la D5 vers Augny puis Pournoy-la-Chétive puis Sillegny. L'église est au centre du village.

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 16 novembre 2013

Cette page a été mise à jour le 21 février 2015