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Le pont qui relie le petit village de Crouzet-Migette à Ste-Anne fut construit en 1875. Il remplace un autre pont en bois qui enjambait le haut de la cascade du ruisseau de Château-Renaud. La voûte en pierre culmine à 70 m au-dessus du ruisseau qui entame ici une chute vertigineuse d'une trentaine de mètres. Le ruisseau dénommé également Lison du Haut va rejoindre la source du Lison en se jetant dans le Creux-Billard.
L'audace de ce pont, défiant les lois de l'équilibre, a engendré, à l'époque, auprès des gens peu instruits de ces campagnes reculées, une légende : celle du pont du Diable. La construction d'un tel ouvrage avait forcément une origine surnaturelle, un homme ne pouvait y parvenir sans aides.
Les habitants de Ste-Anne et de Crouzet chargèrent un entrepreneur de Salins du nom de Babey, de construire un pont permettant de relier les deux villages. Babey avait une excellente renommée. Il avait à son actif la construction d'une église et de nombreux bâtiments importants de la région. Celui-ci accepta les travaux et promit la livraison du pont au bout d'un an. De nombreux ouvriers se pressèrent bientôt sur le chantier. Babey ne ménageait pas sa peine pour coordonner tout ce monde. Après quelques mois de travaux acharnés, les culées du pont étaient en place et l'arche s'avançait dans le vide.
Une nuit, un bruit assourdissant fut entendu dans les deux villages pourtant éloignés de plus d'un kilomètre du chantier. À l'aube, Babey découvrit avec horreur que toute la construction gisait pêle-mêle au fond du ravin. N'étant pas homme à se lamenter, Babey remit tous les ouvriers au travail et embaucha d'autres hommes pour doubler les équipes et tenir les délais. La construction avança vite, Babey contrôlant avec minutie chaque assemblage. Il ne put cependant pas poser la clé de voute, car une nuit l'édifice s'effondra de nouveau.
Notre homme, acharné, reprit la construction. Craignant une malveillance, il mit en place des rondes de surveillance patrouillant toutes les nuits. Malgré toutes les précautions, une nuit le pont s'effondra pour la troisième fois, quelques jours avant son achèvement. Les ouvriers découragés, quittèrent le chantier, laissant Babey seul à contempler le désastre. Le pont devait être livré dans huit jours, Babey se sentait humilié et déshonoré. Accablé par le sort, il s'écria "pour terminer, je donnerais tout, même mon âme au Diable !" Satan qui observait caché à proximité, surgit à ces côtés. "Tu m'as appelé ?" Babey, surpris, resta muet de stupeur. Le Diable lui dit alors "à trois fois tu t'es acharné à construire un pont que j'ai démoli. Ne cherche pas à poursuivre tes travaux sans mon consentement. Je peux par contre achever ton pont tout de suite si tu acceptes mes conditions." Babey qui ne pouvait se résoudre à perdre sa réputation demanda quelles étaient ces conditions. "Tu m'as déjà proposé ton âme, en plus j'exige celle du premier homme qui empruntera le pont", répondit Satan. "Je ne peux consentir à ceci", dit Babey. "Eh bien, soit !" Et Satan commença à s'éloigner. Il n'alla pas bien loin, Babey ne put se résoudre à perdre la face en n'achevant pas son chantier. Il accepta les conditions et signa le contrat présenté par Satan. Si tôt signé, les pierres reprirent par enchantement leur place et le pont fut achevé en un clin d'œil.
Le passage de la rivière sous le pont
Sous le pont
Tourmenté par le pacte signé, rongé par le remords, Babey erra autour de son pont et rentra fort tard en sa demeure de Ste-Anne. Refusant toute nourriture, il alla se coucher. Pris d'une forte fièvre, il se mit à délirer, à hurler et à invoquer le Diable. Sa femme apeurée et croyant sa fin proche demanda aux voisins de chercher le prêtre à Crouzet. Dès l'aube, celui-ci se mit en route emportant le ciboire avec les hosties. Empruntant le vieux sentier passant au fond du ravin, le prêtre en levant les yeux vit le pont achevé. Se sachant attendu par un mourant, il décida de prendre au plus court. Rebroussant chemin, il s'engagea sur le pont. Au milieu du pont, le Diable se jeta sur lui, car il était le premier à traverser le pont. Le vieux prêtre reconnu de suite Satan et confiant en sa foi, il brandit le ciboire et cria "Retire-toi Satan". Ébloui par l'éclat de Dieu jaillissant du ciboire, Satan sauta du pont et disparu dans le gouffre en forme d'entonnoir. Le prêtre fort de sa victoire se rendit chez Babey qu'il réconforta et rassura.
Le
lit de la rivière
Une autre version, rapportée par Charles Thuriet en 1891, relate le fait que le Diable détruisait chaque nuit les travaux exécutés durant la journée. Satan finit par promettre au maitre d'ouvrage d'arrêter ces méfaits en échange de la première âme à traverser le pont. Le maitre d'ouvrage, pris de remords, tomba très malade et les ouvriers, craignant pour sa vie, appelèrent le curé de Crouzet. Celui-ci fut donc le premier à emprunter le pont tout juste terminé. Le curé portait avec lui le Bon Dieu ce qui épouvanta le Diable qui attendait au milieu du pont. Son épouvante fut tellement grande qu'il sauta du pont dans un gouffre sans fond en laissant imprimé sur la clé de voûte son effigie.
L'effigie du
Diable
Ces photographies ont été réalisées en juin 2011.
Y ACCÉDER:
De Nans-sous-Ste-Anne, empruntez la D103 vers Crouzet-Migette. Dans le village, suivre le fléchage "Pont du Diable". Un parking est situé juste avant le pont. Un escalier situé sur le côté gauche de la route avant le pont permet d'accéder au bord du ruisseau.
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.
Cette page a été mise en ligne le 16 juillet 2011
Cette page a été mise à jour le 15 février 2015