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Le fort de Villey-le-Sec

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Le fossé du Réduit du fort de Villey-le-Sec

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Les dessus du Réduit du fort de Villey-le-Sec

L'actuelle vallée de la Moselle forme un passage nord-sud et l'ancienne vallée de la Moselle forme un passage est-ouest au travers de la barrière naturelle des Côtes de Meuse. Ces deux voies de communication se croisent au niveau de la cité de Toul, ce qui lui conféra depuis l'époque gallo-romaine un rôle stratégique. La cité fut donc dès le IIIsiècle muni de fortifications. Vauban l'intégra à partir de 1698 dans le réseau de fortification de l'est du royaume de France. Il conçut une enceinte à neuf pans, percée de trois portes. Le manque de budget ne permit cependant pas l’achèvement de la construction des contrescarpes et les demi-lunes. Au milieu du XIXsiècle, les fortifications de Vauban furent complétées par des casemates à l’épreuve des bombes les plus puissantes de l'époque. Après la défaite de 1871, le général Séré de Rivière fut chargé de fortifier la nouvelle frontière est de la France. Le système qu'il conçut s’appuyait sur quatre places fortes ou camp retranché : Verdun, Toul, Épinal et Belfort. Le camp retranché de Toul était constitué d'une quinzaine de forts, redoutes et ouvrages. Les premiers ouvrages élevés en 1874 constituaient un polygone autour de Toul dont les sommets étaient constitués par le fort du Saint-Michel, la redoute de Dommartin, le fort du Tillot, le fort de Domgermain, la redoute de la Justice et le fort d'Écrouves. Par la suite, la ligne de défense fut complétée au sud par le fort de Blénod et au nord par le fort de Lucey puis le fort du Bruley. Sur le côté est, le fort de Villey-le-Sec constituait un saillant, relié à Dommartin par la redoute de Chaudeney. On renforça encore le dispositif en 1887 par le fort de Gondreville. Puis, à partir de 1888, le périmètre défensif fut étendu vers le nord-est par la construction de petits ouvrages à profil triangulaire, l'ouvrage de Bouvron, l'ouvrage de Francheville, l'ouvrage du Ropage, l'ouvrage est du Vieux-Canton et l'ouvrage de Villey-Saint-Étienne. Sur les fronts est et sud furent construit des ouvrages avancés, l'ouvrage de Fontenoy, l'ouvrage du Haut-des-Champs et l'ouvrage du Fays. On construit également à cette époque l'ouvrage de Bicqueley, l'ouvrage de Gye et l'ouvrage de Charmes. En 1899, on ajouta dans le nord-est l'ouvrage de la Cloche, l'ouvrage du Mordant et le fort du Vieux-Canton, le fort de Trondes, le fort du Chanot et le fort du Tillot. En même temps tous les forts et ouvrages furent renforcés, sauf la redoute de Dommartin, pour faire face à la crise de l'obus-torpille. Un nouveau programme de fortifications, étudié en 1900 puis complété en 1908, comprit, en plus des renforcements, la construction de divers abris, batteries cuirassées, batteries à ciel ouvert, routes, réseaux de barbelés, etc., ainsi que des déboisements. La ligne de défense constituée par les forts devint une zone principale de défense. À l'avant de cette ligne un certain nombre de positions de défense furent organisées sur des points d'appui naturels. Deux forts d’arrêt au-dessus de Frouard et de Pont-Saint-Vincent, contrôlaient les entrées de la boucle de la Moselle et les voies de communication qui l’empruntent. Près de 42 000 hommes seront affectés à la défense de cette place forte, une des plus grandes du monde.

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Le Réduit du fort de Villey-le-Sec

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L'observatoire de la tourelle 75R05 de la Batterie nord
de Villey-le-Sec

Les études pour la construction du fort de Villey-le-Sec débutèrent le 5 décembre 1873. Ce fort devait assurer le contrôle du secteur sud-est de Toul, du débouché de la forêt de Haye, de l’enfilade de la boucle de la Moselle et assurer la défense des forts de Gondreville et du Chanot. Il s’avéra que le meilleur emplacement pour ce fort était le village de Villey-le-Sec. La démolition du village ayant l'inconvénient de retarder énormément la construction du fort et d'en augmenter les coûts, il fut décidé dans un premier temps de construire la redoute de Chaudenay à 1 km à l’arrière du village. Les travaux furent rapidement abandonnés, car l'emplacement ne bénéficiait pas de bonnes vues sur les objectifs prévus. Le Génie proposa alors de construire un fort autour du village. Celui-ci sera constitué d'un Réduit (ultime zone de défense du fort), placé au-dessus du village, d'une Batterie nord et d'une Batterie sud, placées en avant du village, et d'un Redan est (batterie d'artillerie) disposé entre les Batteries nord et sud.

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L'entrée du Réduit

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Le fossé ouest du Réduit

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Le fossé nord du Réduit

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Le fossé ouest du Réduit

Les travaux du dernier village fortifié de France débutèrent le 26 juillet 1875 et durèrent jusqu'en 1879. La construction du fort, confié à l'entreprise Morel, coûta la somme de 3 826 800 francs-or (10 676 772 €) ce qui en fit le plus cher de France. L'accès au village se faisait au travers de quatre postes de contrôle et l'accès aux fortifications était bien entendu interdit au villageois qui était étroitement surveillé par les militaires. Le fort était conçu pour abriter soixante-deux pièces d'artillerie et une garnison de 1 300 hommes. Cette garnison augmenta sensiblement la population du village qui connut un véritable essor économique qui dura une quarantaine d'années. De nombreux bistrots furent ouverts par les habitants du village. Le fort reçu le nom de fort Trévisse. En 1885, l'effectif du fort était de 33 officiers, de 48 sous-officiers et de 1 052 soldats.

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Plan du fort de Villey-le-Sec en 1914

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Les dessus du Réduit

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Sortie d'infanterie sur les dessus du Réduit

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Le coffre double de contrescarpe du saillant II du Réduit

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La voie de 60

Le Réduit présente un plan carré de 180 m de côté centré sur une tourelle Mougin. Le Réduit est entouré d'un fossé d'une dizaine de mètres de large et d'une profondeur d'environ six mètres. L'entrée se fait en fond de fossé au saillant I. La défense des fossés était assurée par des caponnières simples situées au saillant II et au saillant IV et par une caponnière double au saillant III. Comme le fossé était relié au niveau du saillant II avec le fossé de la Batterie nord, un coffre détaché à l'avant du saillant II assurait la protection de ce fossé de liaison. Au centre du Réduit étaient disposés en croix quatre casernements. Chacun se composait d'une cour en puits de lumière parallèle au front et de part et d'autre de cette cour de six chambrées. Ces chambrées étaient complétées par un certain nombre de locaux annexes servant de magasins. Les cours des casernements étaient reliées entre elles par une galerie circulaire. Entre les casernements étaient disposées les galeries d'accès aux caponnières et à l'entrée du réduit. Au niveau de l'entrée étaient regroupés, en plus du corps de garde, la cuisine (deux cuisinières de quatre marmites de 100 l), la boulangerie (deux fours de 300 rations) et les magasins à vivres. De part et d'autre de la galerie reliant le casernement à la caponnière double du saillant III étaient placés deux magasins à poudre modèle 1874 (capacité 136 t de poudre) et les magasins de l'artillerie. Dans le Réduit se trouvait également une infirmerie de 35 places et une écurie pour six chevaux. L'alimentation en eau se faisait par des citernes de 1 500 m³ alimentés par une source de type Ruby.

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Plan du Réduit en 1914

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Le casernement du Réduit

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Le casernement du Réduit

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Une chambrée du casernement du Réduit

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Une chambrée du casernement du Réduit

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Un couloir entre deux cours du casernement du Réduit

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Un escalier de liaison dans le casernement du Réduit

L'installation de la tourelle Mougin modèle 1876 débuta en 1880. Elle fut prête à tirer en 1882. Le souffle généré par le premier tir pulvérisa l'ensemble des vitres du village. Les tirs suivants furent donc annoncés au clairon et obligation fut faite aux villageois d'ouvrir alors leurs fenêtres. La tourelle Mougin a été conçue par le commandant Mougin. Elle devait résister à au moins mille coups du plus puissant canon de l'époque qui était de calibre 155. La tourelle est constituée d'une structure circulaire soutenant deux canons de 155L (long) sur affût Saint-Chamond. Cette structure est coiffée d'un dôme en fonte dure constitué de cinq voussoirs de 21 t chacun et surmonté d'une calotte de 12 t, soit un total de 117 t. Dans un des voussoirs étaient percées les embrasures des deux canons qui dépassaient de 15 cm. Seul ce dôme dépassait du sol. L'ensemble de la tourelle, pesant 160 t, repose sur 16 galets circulant sur un rail scellé dans le sol. La tourelle est centrée par un pivot de 300 cm de diamètre. Ce pivot est un vérin hydraulique qui, sous une pression de 200 bar, soulage les galets des 9/10e du poids de la tourelle, facilitant ainsi sa rotation. La rotation de la tourelle est assurée par une chaine entrainée par un treuil manuel. Par la suite, le treuil fut complété par une machine à vapeur. La rotation de la tourelle sert au pointage, mais surtout à la protection des embrasures, point vulnérable de la tourelle. La rotation est constante durant les combats à raison d'un tour par minute ou d'un tour toutes les trois minutes. La mise à feu des canons est assurée par un contact électrique lorsqu'ils passent dans l'axe de tir choisi. Les deux canons sont indépendants et peuvent tirer dans des directions différentes. Le chargement et le pointage sont effectués durant la rotation. La tourelle est desservie par onze hommes situés dans la partie mobile et par trois hommes actionnant le treuil. D'autres personnes assurent l'approvisionnement en obus. Le diamètre intérieur de la tourelle est de 5 m et sa hauteur interne est de 3,45 m. Son diamètre extérieur est de 6,20 m. L'épaisseur des voussoirs est de 60 cm. Les canons ont une portée de 8 km avec un pointage maximum de 20°. La cadence de tir pouvait atteindre une salve (deux coups) toutes les deux minutes. La tourelle avait un coût de 205 000 francs-or auquel il fallait rajouter les 60 000 francs-or pour la maçonnerie. Cette tourelle a été construite à 25 exemplaires.

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La tourelle Mougin du Réduit

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La tourelle Mougin (canons de 155)

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La tourelle Mougin (galets de roulement)

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La tourelle Mougin

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L'escalier d'accès à la tourelle Mougin

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Le RDC de la tourelle Mougin

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Escalier interne de la sortie d'infanterie dans le Réduit

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Schéma d'une tourelle Mougin

En 1878, l'armement du Réduit se composait de cinq canons de 155L, de quatre canons de 138, et de quatre canons de 95. Ces canons de type "De Bange" étaient installés sur des plateformes à l'air libre disposées sur les dessus du fort. La défense des fossés était assurée par cinq canons à balles et par cinq canons de 5. En 1880, cet armement se composait de trois canons de 155L, de quatre canons de 120L, de trois canons de 95 et de huit mortiers de 22 ou de 15. La défense des fossés était assurée par cinq canons à balles et par cinq canons de 7. Après la crise de l'obus-torpille, fut construite, en 1880, au centre du front IV-I, une caserne en béton spécial de 107 places. Cette même année, le Réduit fut raccordé au réseau de voie ferrée de 60 dit voie stratégique. Il fut également raccordé au réseau télégraphique électrique. L'armement du Réduit se composait en 1890 en plus de la tourelle Mougin de quatre canons de 120L, de trois canons de 95 et de huit mortiers de 22 ou de 15. La défense des fossés était assurée par cinq canons-revolver et par cinq canons de 12 culasse.

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Couloir du casernement de guerre du Réduit

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Couloir du casernement de guerre du Réduit

Le canon-revolver est constitué de cinq tubes entourant un axe central. Ces cinq tubes étaient mis en rotation à l'aide d'une manivelle. Un mécanisme assurait, à chaque tour de manivelle, la rotation des tubes, le chargement d'un tube avec un obus, le déchargement de la douille du tube qui venait de tirer et le tir du tube chargé au tour précédent. Les obus chargés sont disposés dans un distributeur situé au-dessus de l'affût. La cadence de tir théorique était de 60 coups par minute, en réalité il était limité règlementairement à 30 coups par minute. Les cinq tubes sont rayés à des pas différents afin de disperser les mitrailles des boites à balles (projectiles utilisés). Ceci permettait, sans bouger le canon, de balayer toute la largeur du fossé en cinq coups.

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Un canon-revolver

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Un canon de 12 culasse (au 1er plan) et un canon-revolver dans le coffre de contrescarpe double du Réduit

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Le canon-revolver

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Une des chambres de tir du coffre double de contrescarpe du Réduit

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Couloir d'entrée de la caserne de guerre du Réduit

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Une chambrée dans la caserne de guerre du Réduit

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Une chambrée dans la caserne de guerre du Réduit

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L'infirmerie du Réduit

Afin d'éclairer les fossés et les abords, le Réduit fut équipé en 1898 d'un projecteur de 90 cm alimenté par un groupe électrogène mobile. Un réseau de fil de fer barbelé et des grilles de défense entourèrent le Réduit, les Batteries nord et sud ainsi que le Redan est à partir de 1901. À partir de 1903, le Réduit fut profondément transformé. L'entrée fut reconstruite en béton et complétée par un nouveau casernement bétonné (casernement à l'épreuve) de 40 m sur 20 m offrant 186 places couchés. En 1905, les caponnières furent remplacées par des coffres de contrescarpe et les magasins à poudre furent remplacés par des magasins à munitions bétonnés. Trois observatoires cuirassés furent installés. Un projet de 1908 prévoyait l'installation à proximité du Réduit de deux tourelles d'artillerie 155R07 puis, une fois qu'elles seraient en service, d'abaisser la tourelle Mougin pour mieux la cacher au vu de l’ennemi. Ce projet fut remanié en 1910 pour remplacer les tourelles de 155R07 par des tourelles 155C08 moins coûteuses. Il fut également prévu l'installation de deux tourelles de mitrailleuses au Réduit. En 1910, le Réduit fut équipé d'une usine électrique dotée de trois groupes électrogènes. La boulangerie fut remplacée par une boulangerie à l'épreuve munie d'un four de 300 rations.

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L'usine électrique du Réduit

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La boulangerie du Réduit

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Un des magasins à munitions du Réduit

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Un des magasins à munitions du Réduit

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Le poste de télégraphie du Réduit

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Couloir de la caserne de guerre du Réduit

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Couloir de la caserne de guerre du Réduit

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La cuisine du Réduit

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Sortie d'infanterie sur les dessus du Réduit

L'armement du Réduit se composait en 1910 de la tourelle Mougin (deux canons de 155L), de deux canons de 120L, de deux mortiers de 15 et de huit mitrailleuses. La défense des fossés était toujours assurée par cinq canons-revolver et par cinq canons de 12 culasse. La construction de la batterie cuirassée de 155C08 débuta à 200 m à l'ouest de l'entrée du Réduit en 1912. La déclaration de la guerre en 1914 stoppa net les travaux. Seul le bétonnage de la batterie était achevé, les cuirassements et l'armement ne furent pas encore en place. À la déclaration de la guerre en 1914 le Réduit était armé de la tourelle Mougin (deux canons de 155L avec 1 000 obus par canon), de deux canons de 90 avec 600 coups par canon, de deux mortiers de 15 avec 300 coups par mortier et de huit mitrailleuses avec 172 800 cartouches. La défense des fossés était toujours assurée par cinq canons-revolver (1 800 coups par pièce) et par cinq canons de 12 culasse (150 coups par pièce). À cette période, le casernement à l'épreuve offrait 410 places couchées et le casernement normal en offrait 366 places couchées. Le magasin à cartouches avait une capacité de 1 058 000 cartouches.

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La batterie 155C08

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Le puits d'une des tourelles de 155C08

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Un des cuirassements de la tourelle 155C08

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Le puits de la tourelle 155C08

La Batterie nord (construction 1875-1879) présente un plan en "V" constitué de deux branches de 160 m de longueur et large de 60 m. Elle est entourée d'un fossé défendu par une caponnière simple au saillant I et par une caponnière double au saillant III. Au niveau du saillant I, le fossé se prolonge pour rejoindre celui du réduit. Au saillant IV, le fossé se poursuit vers le Redan est. L'entrée de la batterie, située au creux du "V", est munie d'un pont-levis. Cette entrée, protégée par un corps de garde, donne sur la galerie d'accès à la caponnière double. Sur la gauche de cette galerie est accolé le magasin à munitions. À mi-chemin de cette galerie se trouve une casemate de tir indirect. Celle-ci ne fut cependant jamais armée. Sur la branche gauche du "V" étaient implantées trois traverses-abris délimitant quatre plateformes de tir. Sur la branche droite du "V" se trouvaient quatre traverses-abris avec cinq plateformes de tir. En 1878, l'armement de la batterie nord se composait de cinq canons de 155L et de quatre canons de 138. La défense des fossés était assurée par quatre canons à balles et deux canons de 4. En 1880, l'armement de la Batterie nord se composait de six canons de 155L et de deux canons de 120 L. La défense des fossés était assurée par six canons à balles et deux canons de 7.

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Plan de la Batterie nord en 1914

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L'entrée de la Batterie nord

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L'entrée de la Batterie nord

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Le fossé de la Batterie nord

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Le fossé de la Batterie nord

En 1888, la quatrième traverse-abri de la branche droite du "V" fut remplacée par une caserne en béton spécial (à l'épreuve) constitué de trois chambrées et d'un petit local pour les officiers. Elle avait une capacité de 104 places couchées. En 1890, l'armement de la Batterie nord se composait uniquement de quatre canons de 155 L. La défense des fossés était assurée par six canons-revolver et deux canons de 12 culasse. En 1905/1906 la casemate à tir indirect fut remplacée par une tourelle de mitrailleuses. La tourelle de mitrailleuses est armée de deux mitrailleuses Hotchkiss de 8 mm. C'est une tourelle à éclipses et pèse 25 t. Elle est surmontée d'une calotte d'une épaisseur de 120 mm. Par contre, les parois de la tourelle n'avaient que 20 mm d'épaisseur. La tourelle éclipsée pouvait résister à un impact d'un obus de 155 mm, mais en position de tir elle ne pouvait résister qu'à des impacts de balle de fusil. Sa mise en batterie s'effectue à l'aide d'un balancier et d'un contrepoids. La tourelle étant parfaitement équilibrée, sa manœuvre ne nécessite qu'un seul homme.

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La tourelle de mitrailleuse de la Batterie nord

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La tourelle de mitrailleuse de la Batterie nord

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Entrée de la tourelle de 75R05 de la Batterie nord

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Escalier d'accès à la tourelle de 75R05 de la Batterie nord

En 1906/1907 le magasin à munitions et les traverses-abris de la branche gauche du "V" furent supprimés. Une tourelle d'artillerie 75R05 fut installée au niveau du saillant II. La tourelle de 75R05 est une tourelle à éclipses armée de deux canons de 75 raccourcis. Ceux-ci ont une portée de 4 900 m et une cadence de tir de onze coups par minute par canon. La tourelle est constituée d'un fût, dont la paroi à une épaisseur de 150 mm, recouverts d'une calotte de 300 mm d'épaisseur. Elle comprend trois étages dont l'étage supérieur est la chambre de tir. L'étage intermédiaire comprend le poste de commandement et quatre armoires pour le stockage de 725 obus. C'est à cet étage que s'effectue la rotation de la tourelle. L'étage inférieur comprend le balancier et le contrepoids de la tourelle. La montée et la descente de la tourelle s'effectuent à l'aide de deux hommes. Un ventilateur manuel destiné à l'évacuation des fumées de tir est également installé à cet étage. L'ensemble de la tourelle est desservi par quinze hommes répartis sur les trois étages. La tourelle de 75R05 fut complétée sur son arrière par un observatoire cuirassé et un autre fut construit près de l'entrée de la batterie. La tourelle de 75R05 de la Batterie nord est parfaitement restaurée et est fonctionnelle. Un tir à blanc est même réalisé lors des visites guidées du fort.

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La tourelle de 75R05 de la Batterie nord

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La tourelle de 75R05 de la Batterie nord

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Partie inférieure de la tourelle de 75R05

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Le balancier de la tourelle de 75R05

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Tourelle de 75R05

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Les canons de la tourelle de 75R05

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Magasin à obus de la tourelle de 75R05

À la déclaration de la guerre en 1914, la Batterie nord était armé de la tourelle 75R05 (deux canons de 75 avec 1 000 obus par canon), de deux canons de 120L avec 700 coups par canon, de la tourelle de mitrailleuses avec 57 600 cartouches et de deux mitrailleuses avec 43 200 cartouches. La défense des fossés était toujours assurée par quatre canons-revolver (1 800 coups par pièce) et par un canon de 12 culasse (150 coups par pièce).

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Traverse-abri et caserne de guerre de la Batterie nord

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Entrée de la caserne de guerre de la Batterie nord

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La caponnière double de la Batterie nord

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La caponnière double de la Batterie nord

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Canon 12 culasse dans la caponnière double de la Batterie nord

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La caponnière double de la Batterie nord

La Batterie sud, le plus grand des ouvrages annexes, renforce l'armement du Réduit en direction de la vallée de la Moselle. Elle présente également un plan en "V" constitué de deux branches de longueur différentes. Elle est entourée d'un fossé défendu par des caponnières simples au saillant II et V et un étonnant coffre double de contrescarpe en pierre de taille au saillant IV. Au niveau du saillant VI, le fossé se prolonge pour rejoindre celui du Réduit. Au saillant II, le fossé se poursuit vers le Redan est. Le fossé de gorge, où se trouve l'entrée, n'est défendu que par des créneaux de fusillade aménagés dans les murs de l'escarpe. L'entrée de la batterie, située au creux du "V", se fait par une rampe descendant dans le fossé et par une rampe montante depuis ce même fossé. Cette rampe montante est munie d'un ha-ha (trappe) couverte d'un pont à effacement latéral. Cette entrée, protégée par un corps de garde, donne sur la cour où se trouve un casernement en maçonnerie de 180 places couchées. À l’arrière de ce casernement se trouvent le magasin à poudre et deux casemates à tir indirect. L'une donne sur le front entre les saillants III et IV et l'autre donne sur le front entre les saillants IV et V. Ces casemates furent désarmées après 1897. Sur la branche gauche du "V" étaient implantées deux traverses-abris délimitant trois plateformes de tir. Sur la branche droite du "V" se trouvaient trois traverses-abris avec quatre plateformes de tir. En 1878, l'armement de la Batterie sud se composait de deux mortiers de 220 (casemate à tir indirect), de deux canons de 155L et de cinq canons de 138. La défense des fossés était assurée par quatre canons à balles et quatre canons de 4. En 1880, l'armement de la Batterie sud se composait de deux mortiers de 220 (casemate à tir indirect), de six canons de 155L et de deux canons de 120 L. La défense des fossés était assurée par quatre canons à balles et quatre canons de 7.

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Plan de la Batterie sud en 1914

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Entrée de la Batterie sud

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Entrée de la Batterie sud

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Casernement de la Batterie sud

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Corps de garde de la Batterie sud

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Traverse-abri de la Batterie sud

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Batterie sud

En 1880 fut construite le long du fossé, entre l'entrée et le saillant VI, une caserne en béton (à l'épreuve) de 104 places couchées. L'armement de la Batterie sud fut réduit en 1890 pour ne plus se composer que de deux mortiers, de deux canons de 155L et de deux canons de 120 L. La défense des fossés était alors assurée par quatre canons-revolver et quatre canons de 12 culasse. Un projet de modernisation fut étudié en 1908. Il fut alors prévu l'installation d'une tourelle d'artillerie 75R05 et la construction d'une deuxième caserne à l'épreuve, de deux guérites blindées et de deux observatoires cuirassés. Ce projet ne fut cependant pas réalisé. En 1914, l'armement de la Batterie sud ne comprenait plus que deux mortiers de 15 avec 300 coups par pièce et six mitrailleuses avec 86 400 cartouches. La défense des fossés était toujours assurée par quatre canons-revolver (1 800 coups par pièce) et par quatre canons de 12 culasse (150 coups par pièce).

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Caponnière de la Batterie sud

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Caponnière de la Batterie sud

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Fossé est de la Batterie sud

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Le fossé devant la caserne de guerre de la Batterie sud

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La caserne de guerre de la Batterie sud

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La caserne de guerre de la Batterie sud

Le Redan est se composait en 1878 que de deux traverses-abris disposées à l’arrière d'un fossé en terre coulante. Les plateformes de tir desservies par ces traverses-abris étaient armées d'un canon de 138 et de huit canons de 95. En 1880, l'armement se composait de cinq canons de 120L et de quatre canons de 95. En 1888, les traverses-abris furent remplacées par un casernement en béton spécial de trois chambrées offrant 68 places couchées. L'armement fut réduit en 1890 à quatre canons de 120 L.

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Le casernement en béton spécial du Redan est

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Le casernement en béton spécial du Redan est

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Une des chambrées du casernement du Redan est

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Une des chambrées du casernement du Redan est

En 1905 fut installée à l’arrière du casernement une tourelle d'artillerie 75R05 complété par un magasin à munition en béton armé. Deux observatoires cuirassés furent construits de part et d'autre de la tourelle. Cette modernisation coûta 169 000 francs-or. En 1910, l'armement se composait des deux canons de 75 de la tourelle, de quatre canons de 120L, de deux mortiers de 15 et de quatre mitrailleuses.

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La tourelle de 75R05 du Redan est en position de tir

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La tourelle de 75R05 du Redan est en position de tir

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La tourelle de 75R05 du Redan est en position de tir

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Vue interne de la tourelle de 75R05 du Redan est

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Partie inférieure de la tourelle 75R05

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Armoire à munitions de la tourelle 75R05

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Le balancier et le contrepoids de la tourelle

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Partie inférieure de la tourelle 75R05

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Magasin à munitions de la tourelle 75R05

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Le couloir d'accès à la tourelle 75R05 du Redan est

En 1914 le Redan est était armé de la tourelle 75R05 (deux canons de 75 avec 1 000 obus par canon), de deux canons de 120L avec 700 coups par canon, de deux canons de 90 avec 600 coups par canon, de deux mortiers de 15 avec 300 coups par mortier et de quatre mitrailleuses avec 86 400 cartouches.

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L'observatoire du Redan est

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L'observatoire du Redan est

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Observatoire cuirassé du Redan est

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Observatoire simple au Redan est

À la déclaration de la guerre en 1914 le fort était occupé par 250 hommes du 169Régiment d'infanterie commandé par 5 officiers, par 170 hommes du 6Régiment d'artillerie à pied (RAP) commandé par deux officiers et par 23 hommes du Génie. Les trois batteries annexes étaient occupées par 271 artilleurs du 6e RAP. En 1915 les travaux reprirent à la batterie cuirassée de 155R08 juste avant la parution, le 5 août, du décret autorisant le désarmement des forts. Les travaux furent donc, et cette fois définitivement, stoppés. Le fort de Villey-le-Sec fut, comme tous les forts, désarmé en 1915. Les canons et autres mitrailleuses, sauf ceux des tourelles, et toutes les munitions furent envoyés au front. Ne fut laissée au fort que la poudre strictement nécessaire pour sa destruction en cas d'avance significative de l'ennemi. Le fort ne connut cependant pas l'épreuve du feu. Proche de Verdun, on pouvait y voir de nuit les lueurs des bombardements, il servit de casernement aux régiments montant au champ de bataille. En 1917, l'armée, ayant tiré les leçons des forts de Verdun, réarma les forts. Les issues et les entrées furent dotées de chicanes en sacs de sable et rondins de bois et munies de mitrailleuses et de lance-grenades. Les tourelles 75R05, la tourelle Mougin, les tourelles de mitrailleuses, les canons-revolvers et les canons de 12 culasses reçurent chacun une dotation de munitions. Les coffres de contrescarpes furent également dotés de mitrailleuses destinées à remplacer un éventuel canon défectueux. Une batterie antiaérienne équipée de deux canons de 75 fut également installée au fort.

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Canon de marine de 47 utilisé dans les casemates de la ligne Maginot

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Mitrailleuse allemande MG08

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Canon de 75 d'une casemate de Bourges

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L'observatoire cuirassé de la batterie 155C08

Durant la 2Guerre mondiale, le fort fut occupé par l'armée allemande. Celle-ci procéda à un ferraillage modéré du fort (contrairement à d'autres ouvrages). Les cuirassements et les tourelles furent notamment épargnés. En septembre 1944, le fort de Villey-le-Sec était tenu par des parachutistes allemands. Les Américains de la 319e RI de la 80DIUS pénétrèrent dans le village le 5 septembre et des tirs violents furent échangés avec les Allemands. Les Américains se replièrent et, au soir, bombardèrent le fort et le village. Durant l'après-midi du 6 septembre, des Allemands en patrouille dans le village réclamèrent de l’alcool à des habitants terrés dans une cave. N'ayant pas obtenu satisfaction, ils fouillèrent la maison et ne trouvant pas ce qu'ils voulaient, emmenèrent des hommes au fort. Ceux-ci furent gardés dans un fossé de la batterie sud dans lequel les Allemands finirent par lancer des grenades. Lucien Mourize, son père Albert et Prosper Sayer furent tués sur le coup. Paul Gigleux fut achevé à la baïonnette et Louis Grandjean fut abattu pendant sa tentative de fuite. Joseph Mourize et Henri Decouteix réussirent malgré leurs blessures à s’enfuir. Le lendemain, les Allemands incendièrent des maisons et abattirent le clocher. Le maire, Auguste Humbert, s'indignant de cela fut emmené par deux soldats allemands. Son corps fut retrouvé dans le fossé qui longe le chemin de la Moselle après la libération du village par les Américains le 10 septembre.

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Une des cours du casernement du Réduit

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Le coffre double de contrescarpe du Réduit

Le fort resta ensuite à l'abandon jusqu'en 1969 ou il fut repris par l'association "La citadelle" qui en assure depuis la restauration et organise des visites de la Batterie nord et du Réduit. Durant la visite les visiteurs sont transférés de la Batterie nord au Réduit avec un train d'époque empruntant la voie de 60. L’association parvint également à récupérer les canons de la tourelle Mougin qui avaient été envoyés dans les années 1950 au fort du Barbonnet à Nice et à les réinstaller.

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Une des plateformes de tir de la Batterie nord

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La tourelle de mitrailleuse de la Batterie nord

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Canons allemands de 57 de défense des fossés de fort
entourant deux obus de 305 mm

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Galerie au RDC de la tourelle Mougin du Réduit

À l'ouest du Réduit, au Bois sous Roche, furent installées à partir de 1888 cinq batteries d'artillerie. Ces batteries étaient armées de quatre canons de 120L, de six canons de 155L, de quatre de 155C et de six canons de 90. Ces canons de type "De Bange" étaient installés sur des plateformes à l'air libre. Pour ravitailler ces batteries fut construit en 1910 un magasin de secteur. Celui-ci était constitué d'une chambre de stockage à l'épreuve profondément enfouie sous la colline et de plusieurs baraquements et magasins. Ce magasin était relié au réseau de voie ferrée de 60 du fort de Villey-le-Sec. Fin 1914 ou début 1915, un canon de marine de 164 fut installé au niveau de ces batteries. La chambre de stockage de ce magasin est fermée à la visite pour la préservation des chiroptères.

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Entrée de la chambre de stockage du magasin de secteur de Bois sous Roche

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Vestige de bâtiment du magasin de secteur de Bois sous Roche

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Vestige de bâtiment du magasin de secteur de Bois sous Roche

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Entrée de la chambre de stockage du magasin de secteur de Bois sous Roche

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Couloir d'accès de la chambre de stockage du magasin de secteur de Bois sous Roche

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Le puits près du magasin de secteur de Bois sous Roche

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Niche à munitions d'une des batteries de Bois sous Roche

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Niche à munitions d'une des batteries de Bois sous Roche

Ces photographies ont été réalisées en aout 2024.

 

Y ACCÉDER:

La visite du fort peut se faire sur demande auprès de l'association "La citadelle". Des visites sont organisées tous les dimanches et jours fériés à 15 h 00 du 1er mai au 30 septembre et tous les jours à 15 h 00 sauf le lundi du 14 juillet au 15 août.

Se renseigner sur le site du fort : https://www.villeylesec.fr

 

Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont donnés sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accès au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.

 

 

Cette page a été mise en ligne le 12 septembre 2024

Cette page a été mise à jour le 12 septembre 2024