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Les batteries Graf Spee
et des Rospects

La batterie de Keringar, de son nom allemand Graf Spee, fut la plus importante batterie d'artillerie construite par les Allemands pour protéger la base sous-marine de Brest. Ces canons de 280 mm pouvaient engager tout navire ennemi au large de la pointe Saint-Mathieu.

Le poste de direction de tir Graf Spee

La batterie de nom de code RE303 fut construite entre juillet 1940 et aout 1944 sur un plateau dominant, mais défilé des vues de la mer. Sur une superficie de 22 hectares, furent installé, dans des encuvements en béton, quatre canons Krupp type 1904 SKL/40 de 280 mm. Ces canons tiraient soit un projectile court de 240 kg à une distance maximale de 21 000 m, soit un projectile de marine de 283 kg à une distance maximale de 27 800 m. La cadence de tir était de 2 coups par minute. Chaque encuvement possédait un grand blockhaus à munitions enterrées protégé par une dalle en béton épaisse de 1,70 m. Les blockhaus et les encuvements étaient reliés entre eux par une voie ferrée étroite (60 cm). Les canons disposés dans des encuvements étant très vulnérables aux bombardements, les Allemands décidèrent de les placer dans des blockhaus. Seul le blockhaus de la pièce n° 3 put être réalisé avant la libération, pour les autres, les travaux furent à peine commencés. Ce blockhaus fut construit sur l'encuvement et présente une masse de 10 000 m³. Il est accompagné de deux blockhaus à munitions camouflés en maison.

Plan de la batterie Graf Spee

Sur le site furent construit, entre autres, par les Allemands, trois blockhaus de type M151 (970 m³ de béton) chacun destiné au casernement d'un officier, de trois sous-officiers et de vingt-quatre hommes, un blockhaus de type R622 SK (625 m³ de béton) destiné à abriter vingt hommes, un blockhaus de type R639 (1960 m³ de béton) servant d'infirmerie d'une capacité de 40 lits, un blockhaus de type R646 (330 m³ de béton) abritant un puits et une citerne d'eau, deux blockhaus de type R621 (356 m³ de béton) destiné à abriter dix hommes, trois blockhaus de type L409 (525 m³ de béton) avec un encuvement pour un canon 37 Flak, quatre blockhaus de type SK (sonderkonstruktion) munition lager destinée à abriter les munitions, quatre abris en tôle métro, un blockhaus de type SK abritant le poste radio et un blockhaus de type VF pour canon Flak.

Pour la défense contre les attaques terrestres, la batterie possédait douze tobrouks à mitrailleuse, trois lance-grenades de 50 mm, deux canons antichars de 25 mm PAK112 et un réseau de mines antipersonnel. La défense antiaérienne était assurée, au minimum, par dix canons de 75 mm, modèle 32/36 G, sur roues, disposés dans des encuvements, regroupés pour cinq d'entre eux au nord-est du site, de deux canons de 37 CAD SKM35, de deux canons Flakvierling 38 (quatre tubes de 20 mm) et deux canons Flak 28 de 20 mm. Ces canons étaient commandés par un poste de direction de tir spécifique et disposaient de deux soutes à munitions. Le site était complété par le camp de Prat Mélou, situé à une centaine de mètres au nord, où se trouvaient des baraquements légers destinés au casernement de 300 à 400 hommes. La garnison de la batterie se composait de 250 artilleurs et de 400 hommes affectés à la défense.

Mortier

La batterie était commandée depuis un imposant poste de direction de tir (PDT) implanté entre la batterie Graf Spee et la batterie des Rospects situé en bord de mer. Ce poste de direction de tir assurait les commandements des deux batteries. Le poste de direction de tir est une construction spéciale combinant un blockhaus de type S414SK et un blockhaus de type M151. Le blockhaus M151 (970 m³ de béton) servait de casernement aux personnels assurant la défense du site. Il était totalement souterrain. Le blockhaus S414SK (1000 m³ de béton) est un observatoire dont les quatre niveaux abritaient les télémètres de mesure, les tables de calcul des coordonnées des cibles et le casernement des techniciens. Les deux blockhaus sont reliés entre eux par une galerie souterraine. Les murs et les dalles de ces blockhaus étaient construits avec une protection de type A correspondant à une épaisseur de 3,50 m de béton.

Le plan du poste de direction de tir

Pour sa protection le poste de direction de tir était entouré de tobrouks à mitrailleuse et d'un blockhaus de type FL242 (600 m³ de béton) constitué d'un encuvement pour canon antiaérien Flak, d'une soute à munitions, d'un abri pour les sept servants du canon et d'un tobrouk pour mitrailleuse.

La construction de la batterie française des Rospects fut décidée par le programme général de défenses des côtes du 1^er aout 1922 pour remplacer la batterie de la pointe Saint-Mathieu. Le programme de 1926 envisageait d'y installer quatre canons de 340 mm, mais lors de sa mise en service en 1929, il s'agissait d'une batterie semi-fixe armée de quatre canons de 164,7 mm, modèle 1923 sur affut C, installés dans des encuvements avec soutes à munitions. Les encuvements étaient espacés de 100 m. Un poste de direction de tir était implanté à Créac'h Meur, à 3,5 km à l'est à 40 m au-dessus de la mer. Ce poste de direction de tir était équipé de deux projecteurs. La batterie était complétée par une section éclairante munie de deux canons de 75 mm, modèle 1897. Ces canons furent remplacés par un projecteur en 1939.

Le 17 juin 1940, la Marine nationale saborda les canons avant l'arrivée des troupes allemandes. Fin juillet 1940, l'amiral Von Arnauld de la Periere y fit installer quatre canons de 150 mm SKC/28 provenant de la batterie Holtzendorff sur l'ile de Borkum dans l'embouchure de l'Ems en Allemagne. Ces canons avaient une portée de 28 km et une cadence de tir de 8 coups par minute. La batterie, nom de code RE305, fut profondément transformée à partir d'avril 1942 par le Marine Bau Bataillon 360. Quatre blockhaus pour abriter les canons furent construits. Sur le site furent également construits un blockhaus de type M151 (970 m³ de béton) destiné au casernement d'un officier, de trois sous-officiers et de vingt-quatre hommes, quatre blockhaus de type R622 (629 m³ de béton) destiné à abriter vingt hommes, un blockhaus de type M145 (1380 m³ de béton) servant de soute à munitions, un blockhaus de type M150 (1050 m³ de béton) servant de poste de direction de tir, un abri enterré en tôle métro derrière le canon n° 3 et un poste de commandement implanté en arrière des canons n° 2 et n° 3. Le poste de direction de tir français implanté à Créac'h Meur fut également affecté à cette batterie.

Un blockhaus de type M182 abritant un projecteur de 150 mm (le seul de ce type sur l'ensemble du Mur de l'Atlantique) fut installé sur la falaise. Il était desservi par un effectif de quinze hommes. Le projecteur possédait également un blockhaus de type R682 abritant le groupe électrogène.

La défense terrestre de cette batterie, d'un effectif de 105 artilleurs, était assurée par dix tobrouks à mitrailleuse et par deux canons antichars de 25 mm PAK. La défense antiaérienne était confiée à la batterie Arnika, située à l'ouest, et à la batterie Erika, située à l'est. La batterie Arnika était armée de trois canons de 75 mm, modèle 22-24, installés sur des blockhaus de type FL243a et d'un canon Flakvierling 38 (quatre tubes de 20 mm). Son effectif était de 35 hommes. La batterie Erika était armée de cinq canons de 75 mm, modèle 22-24, installés sur des blockhaus. Elle possédait également un poste de direction de tir dans un blockhaus de type VF et deux projecteurs de 60 cm. Son effectif était de 60 hommes.

La Kriegsmarine installa à cet endroit la station de détection RE319. À 500 m à l'ouest du canon n° 1 fut implanté sur une cuve maçonnée un radar Seetakt FuMO2 accompagné d'un blockhaus de type V256 pour abriter le groupe électrogène. S'y trouvaient également un radar FuMO303 et un radar FuMO51 Mammut. Ces radars étaient protégés par trois canons Flak30 de 20 mm. À 300 m à l'est du canon n° 4 fut implanté sur un blockhaus de type V229 un radar Wurzburg See Riese FuMO214. Pour des informations plus complètes sur les stations radars allemandes, cliquez ici. La station radio de Trémeur complétait le site. Cette station d'un effectif de 70 hommes possédait dix pylônes radio de 20 m de hauteur. Elle était défendue par un canon Flakvierling 38 (quatre tubes de 20 mm) et un canon Flak 28 de 20 mm.

La batterie Graf Spee ne subit aucun bombardement avant juillet 1944. La batterie ainsi que les autres batteries allemandes de la région furent prises, le 25 aout 1944, sous le feu des canons de 381 mm du cuirassé anglais HMS Warspite en position au large de Ploudalméziau. Le fort de Toulbroc'h reçut 32 obus, le fort Montbarey reçut 26 obus, le fort de Keranroux en reçut 51, la batterie de Keringar en reçut 57 et la batterie des Rospect en reçut 47. Vers 17 h, l'origine du bombardement fut enfin reconnue et la riposte de la batterie lourde de Keringar obligea le Warspite à la retraite.

Lors des combats pour la libération de Brest, la batterie de Keringar devint un objectif prioritaire. Pour contrer l'avance des troupes américaines en aout 1944, les trois canons se trouvant dans des encuvements (le n° 3 sous blockhaus ne le permettant pas) furent retournés vers la terre pour tirer sur les troupes US. L'état-major US confia alors aux 2^e et 5^e Rangers, qui s'étaient illustrés en prenant le 6 juin 1944 la position allemande de la Pointe du Hoc, la mission de prendre la position. Mille trois cents GI's appuyés par trois mille résistants entamèrent la difficile progression vers la batterie. Durant la bataille, les Américains envoyèrent, en plus des bombardements aériens, plus de 1100 obus de gros calibre. Le canon n° 1 fut mis hors service par un coup direct sur sa bouche. Le n° 2 et le n° 4 le furent par une bombe aérienne qui déforma le masque du canon et la plateforme. Le n° 3, qui reçut une bombe de 250 kg sur son blockhaus, fut sabordé par ses servants lors de la reddition de la batterie. Les violents combats durèrent jusqu'à la reddition du Obersluetnant Martin Furst commandant le poste de direction de tir, le 9 septembre 1944. La prise des batteries Graf Spee et des Rospects couta la vie à 62 Américains, à 22 résistants, à 300 Allemands et à 60 civils.

Après la 2^e Guerre mondiale, la batterie des Rospects et le poste de direction de tir Graf Spee furent utilisés par la Marine nationale jusqu'en 1997. En 2003 y fut effectuée une opération de déminage puis l'ensemble fut acquis en 2005 par la commune de Plougonvelin qui mura et remblaya les blockhaus. La commune installa en 2015 devant la batterie des Rospects deux canons antiaériens (DCA) français de 75 mm et de 90 mm provenant du polygone de tir de la marine de Gâvres. Ces canons furent transférés en 2012 après restauration au Musée Mémoires 39-45 qui s'implanta dans le poste de direction de tir Graf Spee en mai 2017 après dix-sept mois de travaux.

Ces photographies ont été réalisées en juin 2023.

Y ACCÉDER:

Le musée Mémoires 39-45est implanté dans le poste de direction de tir Graf Spee. Il se trouve le long de la D85 reliant Plougonvelin à la pointe Saint-Mathieu. Le musée est ouvert tous les jours.

Les vestiges de la batterie des Rospects sont le long de la grève au bout du chemin partant en face du musée. Les blockhaus ne sont pas visitable. Le blockhaus du projecteur (bunker de la casquette) se trouve le long du sentier côtier allant de la batterie des Rospects à la pointe Saint-Mathieu.

Les blockhaus de la batterie Graf Spee disparaissent sous la végétation à l'est du hameau de Lochrist. Le blockhaus ayant abrité le canon n° 3 sert d'écurie à une ferme équestre. Les blockhaus ne sont pas visitable.

Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont donnés sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accès au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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Cette page a été mise en ligne le 20 aout 2023

Cette page a été mise à jour le 20 aout 2023