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Le mémorial de Bruneval
(Opération Biting)

Le mémorial de Bruneval commémore l'opération Biting exécutée par les alliés durant la nuit du 27 au 28 février 1942. Ce raid était destiné à la capture d'un radar allemand afin d'en étudier l'avance technologique pour concevoir des contre-mesures.

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Sur la falaise de Bruneval près de la ferme de Theuville, le professeur Gosset, chirurgien à la clinique Saint-Antoine à Paris, fit construire, entre 1925 et 1929, par l'architecte Corruble le manoir de la Falaise. Le site fut choisi par l'armée allemande durant l'hiver 1940/1941 pour y installer des batteries antiaériennes (Flak), près du phare, et une piste pour la Luftwaffe, à l'est de la ferme. En 1941 furent installés au sud du phare d'Antifer deux radars Freya de détection lointaine. Un radar Würzburg Riese de guidage de la Flak fut installé à côté du manoir de la Falaise qui fut transformé en station de recueil d'information et de commandement. Le site était protégé par des bunkers desservis par une centaine d'hommes. Une section d'infanterie était stationnée au nord de Bruneval. Fin 1941, le service de renseignement de la Royal Air Force (RAF) apprit l'utilisation par les Allemands d'un nouveau type de radar très précis. La reconnaissance aérienne identifia ce nouveau radar au sud de La Poterie-Cap d'Antifer. Cette identification fut confirmée par le réseau de résistance dirigé par Gilbert Renault dit Colonel Rémy.

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Radar Wurzburg Riese (© Wikipédia)

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Radar Freya (© Wikipédia)

Le 8 janvier 1942, le vice-amiral Louis Mountbatten estima que détruire le radar était insuffisant. Il voulait une opération permettant de s'emparer des pièces du radar pour que l'équipe de scientifiques dirigée par le spécialiste des radars anglais Réginald V. Jones puisse étudier le niveau technique atteint par les Allemands pour trouver des contre-mesures. Il enclencha alors l'opération Biting (morsure) combinant les forces de la RAF, de la Royal Navy, des parachutistes et des commandos. Cent dix-neuf commandos, sous les ordres du major John Dutton Frost, formant la compagnie C du 2e bataillon parachutiste, subirent durant plusieurs semaines un entrainement intensif. L'objectif, photographié, fut reproduit en maquette pour que les parachutistes apprennent par cœur les détails du terrain. L'entrainement se déroula à Salisbury Plain dans le Wiltshire puis à Inverraray en Écosse. La major Frost forma cinq sections de 40 hommes avec nom de code Nelson, Jellicoe, Hardy, Drake et Rodney. Il était prévu que la section Nelson s'emparerait de la valleuse de Bruneval afin de sécuriser l'accès à la mer, que les sections Jellicoe, Hardy et Drake s'empareraient des deux stations radars et du manoir de la Falaise et que la section Rodney resterait en réserve entre la zone de rassemblement et le manoir. Les parachutistes seront transportés par la 51e escadrille de la RAF commandée par Percy Charles Pickard et Nigel Norman. Le retour se ferait par la mer avec des vedettes australiennes sous les ordres du commandant F. N. Cook. Parmi les vedettes, quatre étaient armés par les Forces Navales Françaises Libres. L'opération étant prévue pour le 27 février 1942, un dernier exercice fut effectué le 23 février. Il se solda par un échec, car les vedettes s'échouèrent sur un banc de sable.

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Un tobrouk

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Emplacement de Flak au Cap Antifer

Le 27 février 1942 en fin d'après-midi par une mer calme, les vedettes se mirent en route, escortée par deux contre-torpilleurs. À 20 h 30, douze avions Amstrong Whitworth Whitley ayant à leur bord les 119 commandos décollèrent de Thruxton. Le major Frost estima que le "moral était magnifique". À 0 h 20, les commandos sautèrent au-dessus du hameau de Theuville et atterrirent non loin du centre de La Poterie-Cap d'Antifer. Ils se regroupèrent au point de rassemblement à 200 m à l'est de la ferme de Theuville. Les vedettes mouillèrent au même moment au large en s'efforçant de ne pas être découvertes. Une patrouille maritime allemande s'en approcha à moins de 1,5 km, mais repartit sans les avoir vus. Une des vedettes détruisit un projecteur qui balayait la mer depuis le rivage. Pendant que le major Frost et ses hommes se rendirent maitres du manoir de la Falaise, le lieutenant Vernon et son groupe détruisirent les radars. Le flying sergent Cox les avait préalablement dépouillés de leurs éléments essentiels. Ces éléments furent chargés sur des remorques de transport. La section Nelson attaqua les positions allemandes de la valleuse de Bruneval. Tandis que l'ensemble des hommes se replia vers la plage, ils furent pris sous le feu d'une mitrailleuse allemande non détruite. Le major Frost ordonna alors un retour vers le manoir le temps que les sections Rodney et Nelson sécurisent la plage. À 2 h 15, les commandos de retour sur la plage tirèrent une fusée éclairante blanche, signal pour les vedettes de venir les chercher. Six vedettes se présentèrent simultanément créant une confusion et un désordre dans l'embarquement, car lors des exercices les vedettes se présentaient deux par deux. À 2 h 35 tous les commandos embarquèrent malgré le feu nourri des Allemands arrivés sur les lieux. Le retour en Angleterre prit 14 heures. Les alliés eurent à déplorer deux morts, sept blessés et six prisonniers. Du côté allemand, il y eut cinq morts, deux blessés, deux prisonniers et trois disparus.

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La plage et les falaises de Bruneval

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Emplacement de Flak au Cap Antifer

Le matériel récupéré et l'interrogatoire des prisonniers permirent aux Britanniques de s'assurer que la technologie des radars allemands n'était pas aussi avancée qu'ils le craignaient. Il permit la mise au point d'un moyen de brouillage consistant à saturer le radar par le largage de lamelles d'aluminium par avion. Ce brouillage dénommé "Window" fut testé le 24 juillet 1943 lors de l'opération Gomorah, le bombardement de Hambourg. Le 3 mars 1942, Winston Churchill auditionna le major Frost et les officiers du commando. Dix-neuf médailles leur furent décernées, dont la Military Cross pour le major Frost, la Distinguished Service Cross pour le commandant Cook et la Military Medal pour le flying sergent Cox.

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Du côté allemand, le raid provoqua l'admiration du chef des forces aéroportées, le général Kurt Student. Après l'inspection du site, Rommel ordonna l'évacuation du village de Bruneval. Mais selon les Anglais, les Allemands ne comprirent pas l'objectif réel du raid. Le général Von der Heydte déclara cependant après la guerre qu'il avait bien compris l'objectif des Anglais, mais comme il souhaitait l'effondrement du nazisme, il l'avait tenu sous silence.

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Support de radar Wurzburg Riese

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La Luftwaffe ne jugea pas le site comme étant compromis et le reconstruisit en l'agrandissant. Le site dénommé "Auerhahn" reçut, au Cap d'Antifer, un radar Würzburg Riese FuSE65, un radar Freya FuSE80 (remplacé par un FuMG450) et un radar Wassermann L FuMG41. À la ferme de Theuville fut implanté un radar Wassermann S FuMG42. Au niveau du phare d'Antifer furent implantés un radar Würzburg Riese FuSE65, un radar Freya FuSE80 (remplacé par la suite par un FuMG401), un radar de détection de navire Würzburg See Riese FuMO215 et un radar FuMO2 Calais B. Les radars Würzburg étaient installés sur des socles en béton type V229 et les radars Wassermann sur des bunkers type L480 (1460 m3 de béton) ou L486 (1300 m3 de béton). Le centre de traitement des données était installé dans un grand bunker à deux étages L479 Anton d'un volume de béton de 2610 m3. Le site était protégé par de nombreux bunkers de canons antiaériens Flak de 37 mm type L409A (635 m3 de béton), L410 (700 m3 de béton), L410A (885 m3 de béton) et L419 alimenté par des soutes à munitions type L413 (370 m3 de béton). Des bunkers type L411 (600 m3 de béton) abritaient des projecteurs de 60 cm de diamètre. De nombreux abris pour les hommes type 502 (deux sections, 629 m3 de béton), 621 (une section, 356 m3 de béton) et 622 (deux sections, 629 m3 de béton) sont présents sur le site. Le site était entouré d'un réseau de fils barbelés et d'un champ de mines.

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Support de radar Wurzburg Riese

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Ces photographies ont été réalisées en juillet 2018.

 

Y ACCÉDER:

Le mémorial de Bruneval se situe dans la valleuse de Bruneval au sud du Cap d'Antifer. L'accès est fléché depuis La Poterie-Cap d'Antifer, le long de la D111. Attention, l'usage du parking situé dans le hameau est obligatoire.

Les différents bunkers du site radar sont disséminés autour du phare d'Antifer. Certains sont d'accès difficile et d'autres sont situés sur des terrains privés. Les champs sont clôturés par des fils barbelés électrifiés.

 

Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont donnés sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accès au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.

 

 

Cette page a été mise en ligne le 20 octobre 2018

Cette page a été mise à jour le 20 octobre 2018