La presqu'ile située dans l'embouchure de la Rance, en face de la ville de Dinard, supporte des fortifications depuis le début de notre ère. Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, les Allemands y créèrent une des plus importantes fortifications du mur de l'Atlantique. Elle est sans équivalent sur le mur de l'Atlantique.
Le lieu servit de capitale à la tribu gauloise des Coriosolites à partir de 80 av. J.-C.. Elle fut incendiée par les Romains en 10 apr. J.-C., ce qui provoqua son abandon au profit de la cité de Corseul. Les Romains y implantèrent en 270 ou 280 une nouvelle forteresse. Celle-ci possédait un rempart de 3 à 4 m de hauteur et d'une circonférence de 1400 m flanqué de tours carrées. En 340, cette forteresse devint à nouveau le chef-lieu de la civitas des Coriosolites. Elle accueillit en 380 la "principia", le quartier général de la garnison chargé de la surveillance du littoral. Les Romains l'abandonnèrent au cours du Ve siècle. En 575, Tudunal entreprit le redressement de la cité et en fit la principale défense contre l'invasion des Francs en Bretagne.
L'ancien casernement du fort français
La cour du fort
Après l'attaque ratée de Saint-Malo par une coalition anglo-hollandaise en 1693, deux batteries de canons furent implantées sur le promontoire. Entre 1759 et 1762, le chevalier Mazin, ingénieur du roi, y érigea un fort bastionné. Celui-ci était constitué de deux bastions au nord-est et au sud-est (côté terre) et de deux demi-bastions au nord et au sud (côté mer) avec au centre de la courtine ouest une batterie semi-circulaire. L'entrée était disposée dans la courtine sud, entre le bastion sud-est et le demi-bastion sud. Du côté terre, le fort était enserré par un fossé sec dont la contrescarpe possédait un chemin couvert précédant un glacis en pente. Le parapet de ce chemin couvert était percé par des embrasures de mousqueterie. Le fort possédait dix salles souterraines servant de casernement, deux corps de garde, une prison, trois magasins, un magasin à poudre, un magasin aux vivres et une citerne. La garnison était de 400 hommes commandés par 20 officiers. L'armement se composait de six canons de 36 livres de balles, de huit canons de 24 livres de balles, de quatre canons de 18 livres de balles et de dix canons de 12 livres de balles. Une petite batterie installée sur la pointe au sud couvrait l'anse de Solidor.
La courtine est, le bastion nord-est et le fossé sec
Le demi-bastion sud et l'entrée du fort
Le bastion nord-est
Le demi bastion sud
En 1785, l'armement du fort fut remplacé par seize canons et quatorze mortiers. L'armement fut en 1841 réduit à deux canons de 30 livres de balles et deux obusiers de 22 cm. En 1890, l'armement se composa de quatre canons de 95 mm installés dans la cour du fort et par une batterie de canons de 47 TR (tir rapide) installés à l'extérieur du fort.
L'entrée du fort (côté interne)
La courtine sud-ouest
Fenetre dans le mur d'enceinte sud
L'ancien casernement
En juin 1940, l'armée allemande occupa le fort. En 1942, la Schutzstaffel Wehrgeologen Kompanie (compagnie de géologue de l'armée) procéda à une étude géologique du promontoire. En janvier 1943, l'organisation Todt débuta les travaux de construction de la forteresse du mur de l'Atlantique. Deux mille ouvriers travaillant 24 h sur 24 h creusèrent 1350 m de galerie dans le rocher à 30 m sous terre et érigèrent trente-deux blockhaus de différents types. Un des blockhaus porte, inscrite dans le béton, la date du 9/6/43 et un autre l'inscription "P.J.GE 9/7/1943". La troupe s'y installa en décembre 1943. La construction se poursuivit jusqu'en juin 1944. La forteresse reçut le nom de code Ra230 Zitadelle (citadelle).
Les blockhaus Z16, Z23 et Z17
Les blockhaus Z16, Z23 et Z17
La cloche blindée du blockhaus Z7
Le blockhaus Z18
Le complexe comprend :
deux blockhaus de type R112a, nom de code Z1 et Z3, (660 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'une caponnière de défense, d'un magasin à munition et d'une cloche blindée 35P8 pour deux mitrailleuses. La cloche blindée possède six embrasures de tir et un périscope d'observation.
La cloche blindée du blockhaus Z10
La cloche blindée du blockhaus Z10
Plan blockhaus R112
Deux blockhaus de type R112a, nom de code Z11 et Z12, (660 m3 de béton) avec une cloche blindée 20P7 pour deux mitrailleuses.
Deux blockhaus de type R114a neu, nom de code Z7 et Z10, (1700 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'un sas d'entrée, d'une caponnière de défense, d'un magasin à munition et d'une cloche blindée 20P7 pour deux mitrailleuses. Les murs et le toit ont une épaisseur de 3,50 m. Son équipage était de neuf hommes.
La cloche blindée du blockhaus Z11
La cloche blindée du blockhaus Z11
Un blockhaus de type R506, nom de code Z2, (778 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'un magasin à munition et d'une chambre de tir pour canon Pak47.
Deux blockhaus de type R625, nom de code Z4 et Z5, (770 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'un sas d'entrée, d'une caponnière de défense, d'un magasin à munition, d'une chambre de tir pour canon Pak40 et d'un tobrouk de guet.
Plan blockhaus R625
Deux blockhaus de type R611, nom de code Z20 et Z21, (1330 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'un sas d'entrée, d'une caponnière de défense, de deux magasins à munition, d'une chambre de tir pour canon de 105 et d'un tobrouk de guet.
Plan blockhaus R611
Un blockhaus de type R667, nom de code Z25, (165 m3 de béton) constitué d'une chambre de tir pour canon 50KWK L60.
Plan blockhaus R667
Un blockhaus de type R504, nom de code Z8, (537 m3 de béton) constitué de deux chambres pour la troupe, d'un sas d'entrée et d'un garage pour canon 37 Pak.
Cinq blockhaus de type R105b ou d, nom de code Z9, Z13, Z14 et Z17, (564 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'un sas d'entrée, d'une caponnière de défense et d'une chambre de tir pour mitrailleuses. Les blockhaus Z13 et Z14 ne sont pas reliés au souterrain.
Dans le blockhaus Z16
Poste de mitrailleuse du blockhaus Z16
Dans le blockhaus Z16
Un blockhaus de type R105d doublé d'un blockhaus pour mitrailleuse type Stand SK, nom de code Z18, (564 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'un sas d'entrée, d'une caponnière de défense, de deux chambres de tir pour mitrailleuses et d'une cloche d'observation 486P2.
Un blockhaus de type R105c, nom de code Z19, pour mitrailleuses avec une cloche d'observation 486P2.
Plan blockhaus R105
Un blockhaus regroupant un type R105b, un type R105d et un tobrouk SK, nom de code Z16, avec une cloche d'observation 486P2.
Le blockhaus Z18
La cloche blindée du blockhaus Z19
Un blockhaus de type L410a, nom de code Z23, (885 m3 de béton) constitué de deux chambres pour la troupe, de deux sas d'entrée, d'une caponnière de défense, d'une chambre pour les officiers, d'une chambre pour la ventilation, d'un magasin à munition et d'une cuve pour canon antiaérien FLAK armée d'un canon 40 Bofors.
Les blockhaus Z16, Z23 et Z17
Les restes du canon 40 Bofors
Une des cuves pour canon FLAK
Plan blockhaus L410
Un blockhaus de type R621 doublé par un type R501, nom de code Z6, (356 m3 de béton) constitué chacun d'une chambre pour la troupe avec un sas d'entrée. Le R621 possède en plus un tobrouk de guet.
Un blockhaus de type R633, nom de code Z24, (845 m3 de béton) constitué d'une chambre pour la troupe, d'un sas d'entrée, d'une caponnière de défense, d'un magasin à munition, d'une chambre pour la ventilation, une cloche pour mortier M19 de 50 mm et un tobrouk de guet.
Un blockhaus de type R636 de direction de tir, nom de code Z22, (960 m3 de béton) constitué de six chambres, d'un sas d'entrée et d'une caponnière de défense. Son équipage était de onze hommes.
L'entrée du poste de direction de tir R636
L'entrée du poste de direction de tir
Poste de transmission du
poste de direction de tir
Le chauffage du poste de direction de tir
Chambre de troupe du poste de direction de tir
Chambre de troupe du poste de direction de tir
Le télémetre du poste de direction de tir
Plan du blockhaus L636
L'armement de la forteresse se composait de deux canons de 75 "Pak40", de deux canons de 105 "L.e.F.H 16", d'un canon de "50 KWK", d'un canon de 47 "Pak geK. M.MG", d'un canon antichar de 37 mm, de huit mitrailleuses "MG42", de treize lance-flammes "W42" et d'un mortier automatique lance-grenades M19. Le canon de 75 "PAK40" avait un calibre de 75 mm et un poids de 1425 kg. L'obus avait une vitesse initiale de 980 m/s et pouvait pénétrer un blindage de 154 mm à 500 m de distance. Le canon de 105 "L.e.F.H 16" avait un calibre de 105 mm pour un poids de 1490 kg. Sa portée était de 11 000 m. L'obus avait une vitesse initiale de 505 m/s et le canon avait une cadence de tir de 4 à 5 coups par minute.
Les blockhaus Z13 et Z14
Le poste de direction de tir Z22
Le blockhaus Z14
Le blockhaus Z18
Sous la forteresse se trouvait un souterrain constitué d'une galerie principale rectiligne desservant trois casernements, une usine électrique équipée de trois groupes électrogènes et la plupart des blockhaus. Cette installation souterraine ne fut que partiellement achevée en 1944. La plus grande partie des galeries est restée brute. Les parties achevées ont consommé un volume de 30 000 m3 de béton. La galerie principale est équipée d'une voie ferrée de 60 cm. Le casernement pouvait accueillir 400 hommes.
Le 4 aout 1944, les troupes américaines investissent la ville de Saint-Malo forçant le colonel allemand, Andreas Von Auloch, commandant la ville à se réfugier dans la forteresse d'Alet. Le 9 aout 1944, les troupes américaines encerclent la forteresse. En plus des bombardiers, les Américains de la 83e DIUS, épaulée par les Français des FFI, utilisent des canons de 203 et de 240 pour bombarder les blockhaus allemands. Les Américains tentent un premier assaut terrestre le 11 aout, mais sont repoussés avec de fortes pertes par les Allemands. Le 14 aout, les Américains tirent 4103 obus sur les différents blockhaus. Ils procèdent méthodiquement pour neutraliser une à une les cloches blindées des blockhaus à l'aide de canons antichars. Un nouvel assaut, le 15 aout, est repoussé par les Allemands. Ce n'est que le 17 aout que les Allemands capitulent devant l'assaut des Américains. Après la guerre, le fort est laissé à l'abandon. Entre 1977 et 1980, les galeries souterraines furent utilisées en champignonnière produisant une dizaine de tonnes de champignons par an. Le site fut ensuite racheté par la ville de Saint-Malo. Actuellement, une partie des blockhaus a été réhabilitée et transformée en musée.
Impact des obus américains sur la cloche blindée Z7
Impact des obus américains sur la cloche blindée Z7
Impact des obus américains sur la cloche blindée Z11
Impact des obus américains sur la cloche blindée Z11
Canon antiaérien FLAK de 88 allemand
Le blockhaus Z13
Ces photographies ont été réalisées en octobre 2022.
Y ACCÉDER:
Le fort d'Alet ou d'Aleth est situé rue de la cité à Saint-Servan-sur-Mer. Il est accessible en traversant le camping municipal. Les extérieurs sont librement visitable. Des visites guidées permettent l'accès à certains des blockhaus.
Les souterrains ne sont pas visitable.
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont donnés sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accès au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
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Cette page a été mise en ligne le 20 novembre 2022
Cette page a été mise à jour le 20 novembre 2022