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L'oppidum celte occupe l'extrémité de la colline du Britzgyberg, dominant ainsi de plus de cent mètres la vallée de l'Ill. A cet endroit, un gué constituait une voie de passage naturelle entre le monde méditerranéen et l'Europe centrale. A l'époque, les commerçants remontaient la vallée du Rhône, de la Saône, du Doubs pour passer la vallée de l'Ill vers le Rhin.
La chapelle St Brice au sommet du Britzgyberg
Cet oppidum correspond à un éperon barré. Il occupe une superficie de 5,2 hectares. De forme trapézoïdale, cet éperon est constitué de deux terrasses superposées orientées nord-est / sud-ouest. Il a une longueur de 300 m pour une largeur maximale de 200 m côté nord. Les flancs de la colline, côtés sud, est et ouest ont un pendage de 45° formant ainsi une défense naturelle. Du côté nord, un rempart de 8 à 10 m de large, haut à l'heure actuelle de 1,50 m à 2 m sépare l'oppidum du reste du plateau. Ce rempart est doublé, côté extérieur, d'un fossé qui est un aménagement d'un ravin naturel. Une interruption du fossé et du rempart dans l'angle nord-est correspond probablement à la voie d'accès à l'oppidum depuis le plateau. La terrasse inférieure, située 4 m sous la terrasse supérieure, a une largeur de 50 m. Elle n'est présente que sur le flanc sud-est et se rétrécit complètement côté nord-ouest. Dans l'angle sud-ouest, un aménagement d'une brèche en tenaille pourrait correspondre à une porte d'accès vers la vallée.
Plan réalisé d'après les documents de monsieur K. Gutmann
Le site est connu depuis les années 1850, où des trouvailles de monnaies romaines le font interpréter comme un camp retranché de l'armée romaine. La première personne à s'intéresser au site est monsieur Gutmann qui y effectua des recherches en 1904. Il reconnait le tracé du fossé défensif, deux citernes (l'une à l'est et l'autre à l'ouest) et mentionne un fond de cabane. Celle-ci, de forme ronde, avait un diamètre de 4 m et une profondeur de 3 m. Son remplissage était constitué de pierres. Les tessons extraits de ce remplissage ont été datés de l'époque hallstattienne (750 – 475 av. J.-C.). Il considéra donc le site comme un refuge pré et protohistorique.
Vue sur les vestiges du rempart barrant le plateau
Les fouilles modernes du site ont été entreprises par monsieur Schweitzer dans les années 1970. Elles n'ont cependant permis qu'une reconnaissance limitée du site. De nouvelles fouilles ont été entreprises en 2007 par l'université de Strasbourg. Les résultats des premières fouilles ont permis de situer l'occupation du site entre la fin du Hallstatt moyen (620 av. J.-C.) et le début de la Tène (430 av. J.-C.).
Vue sur le fossé précédent le rempart
Cinq périodes d'occupation ont ainsi été déterminées. La première, datée de 620 av. J.-C., a fait l'objet d'un ouvrage défensif consistant en un fossé à profil trapézoïdal de 2,50 m de large et profond de 1,70 m. Celui-ci était creusé dans la roche en bordure de la terrasse supérieure et était complété d'une palissade. Cette structure a été reconnue sur le flanc nord-ouest du site. Des structures d'habitations avec des murs en pierre sèche et des sols en calcaire concassé et argile ont été retrouvées.
Le fossé au niveau de sa jonction avec la terrasse inférieure
Durant la deuxième période, datée de 600 à 570 av. J.-C., un nouveau dispositif défensif vient remplacer le premier, probablement détruit par un incendie. Ce dispositif est constitué d'une tranchée de 1,50 m de profondeur et de 80 cm de large dans laquelle étaient insérés des troncs de 30 cm de diamètre pour former un mur.
Essai de reconstitution de la palissade de la 2e période
La troisième période, 550 à 530 av. J.-C., correspond à une période de paix et de prospérité. Aucun élément défensif important n'a été retrouvé. Les structures retrouvées correspondent à des habitations et à des aménagements artisanaux. Les habitations sont des cabanes quadrangulaires construites en torchis dont les fondations sont faites d'excavations remplies de sable ou de semelles en pierres sèches.
La quatrième période, 550 à 470 av. J.-C., voit un retour des dispositifs de défense. La palissade en bois est remplacée par un rempart en pierres au niveau de la terrasse supérieure. Le côté extérieur et le côté intérieur sont constitués d'un mur fait par empilement de blocs soutenu à intervalles réguliers par des poteaux verticaux. La partie interne du rempart est constituée de murets disposés perpendiculairement aux parements derrière les poteaux. L'espace entre les murets est rempli de pierraille. Le rempart est doublé d'un fossé à la basse de la terrasse supérieure et d'un deuxième mur. Des terrasses empierrées pouvant correspondre à des bases de tours ont également été reconnues.
Reconstitution du rempart en pierre
Le rempart de la 4e période
La cinquième période, 470 à 430 av. J.-C., fait suite à la destruction du site par un incendie. Les fortifications sont réaménagées par réfection du rempart et par le remplacement du deuxième mur par une palissade. Après un nouvel incendie général, le site est définitivement abandonné.
Les découvertes archéologiques ont permis de déterminer que le site était un important centre artisanal et commercial. Les nombreuses découvertes de navettes, peignes à carder, aiguilles, fusaïoles, bobines, etc. permettent d'affirmer que le travail textile était très développé. De même, les scories de fer, déchets de coulées de bronze, reste de moules, creusets, marteaux sphériques, burins confirment une importante industrie métallurgique. De nombreux ratés de cuisson et des aménagements de fours de potiers attestent d'une importante industrie de poterie. Une importante activité pastorale a également été mise en évidence. Les ossements d'animaux découverts démontrent une prédominance de l'élevage sur la chasse pour l'alimentation de la population.
Une des tranchées des fouilles de 1970
La découverte de tessons attiques à figures noire (de production grecque ou crétoise) et d'amphores massaliotes (de l'antique Marseille) démontre l'importance de cet oppidum comme centre commercial entre les pays méditerranéens et l'Europe centrale. Les tessons retrouvés ont notamment permis de reconstituer trois coupes (identique à nos coupes à fruits). L'une d'entre elles est ornée d'une frise montrant un athlète tenant deux poids en face d'un personnage drapé dans un himation. La frise est complétée par la partie inférieure d'un cheval (centaure ou pégase ?). Cette coupe a été datée de 510 – 500 av. J.-C. Une vingtaine de céramiques d'importation ont été découvertes lors des fouilles. De nombreuses fibules avec des incrustations en corail viennent également conforter l'importance des échanges avec le monde méditerranéen.
L'emplacement des fouilles de 1970
L'oppidum du Britzgyberg a été qualifié de site princier. L'importance du dispositif de défense (surtout à partir de la fin du VIe siècle), l'abondance des vestiges métalliques et artisanaux témoignent d'une population importante. Une dynastie de princes celtes a mis à profit la situation géographique du site, dominant un gué de l'Ill, pour en faire un centre économique à la croisée du monde celte centre européen et le monde des rivages méditerranéens.
Les fouilles effectuées en 2007 ont permis la mise à jour de fondation de 1,80 m de profondeur d'une grande palissade, à l'extrémité sud de la terrasse supérieure qui pourrait avoir délimité un domaine de prestige.
Les fondations mises à jour lors des fouilles de 2007.
La campagne de fouilles de 2007 a été complétée par de nouvelles campagnes en 2008 et en 2009. Ces campagnes d'une quinzaine de jours ont permis la confirmation des résultats de 2007. En 2009, ont été mis à jour trois trous de poteaux de 2 m de profondeur. Ces trous d'un diamètre de 1,50 m laissent supposer qu'ils servaient de fondation à des poteaux exceptionnels. Ces poteaux sont situés à l'extérieur de la palissade découverte en 2007. Pour l'instant, ils ne sont pas datés. Nous ne savons donc pas s'ils sont antérieurs, postérieurs ou contemporains de cette palissade. Nous ne connaissons même pas le rôle de ces poteaux.
Je me risquerais cependant à formuler une hypothèse. De tels trous de poteaux sont connus dans d'autres lieux et à d'autres époques. Ces poteaux monumentaux pourraient avoir été des totems, des sortes de menhirs en bois élevé à la gloire d'un homme ou d'un dieu. Ils pourraient être un signe de la puissance de la tribu vivant ici.
Les fouilles de 2009
Le 1er trou de poteau
Le 2e trou de poteau
Ces photographies ont été réalisées en septembre 2007 et en septembre 2009.
Y ACCÉDER:
A Illfurth, prendre la direction du cimetière militaire allemand. Garez votre véhicule au niveau du croisement de chemin en bordure de forêt et continuez à pied en suivant le balisage "Chapelle St Brice" qui vous mènera au sommet du Britzgyberg. Les vestiges sont dissimulés dans la végétation au sud , à l'ouest et au nord de la Chapelle.
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.
Cette page a été mise en ligne le 18 février 2008
Cette page a été mise à jour le 22 février 2015