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Les cromlechs de l'île d'Er Lannic
et le cairn de Gavrinis

Les cromlechs d'Er Lannic

L'îlot d'Er Lannic est situé dans le golfe du Morbihan, à environ 500 m au sud de Gavrinis. Sur cet îlot sont disposés deux "cromlechs" (cercle de pierre). Ces deux hémicycles ont une forme en fer à cheval. Seule la partie supérieure de l'hémicycle nord est visible, le reste étant submergé par les eaux du golfe. Au moment de la construction de ces cromlechs, l'îlot d'Er Lannic formait une colline au pied de laquelle coulait une rivière. Nous avons ici une preuve de l'élévation du niveau de la mer depuis ces 10000 dernières années. Il y a 25000 ans, le niveau des mers était 120 m plus bas qu'aujourd'hui. Les deux hémicycles sont tangents l'un par rapport à l'autre.

Er Lannic
Vue de l'îlot d'Er Lannic depuis le cairn de Gavrinis en 1985

L'hémicycle nord a une forme quadrangulaire évasée ouverte au sud. Il est orienté vers le sud-est dans l'axe du solstice d'hiver. Les relevés topographiques effectués en 1992 ont démontré qu'il était constitué de 65 menhirs de 1,20 m à 4,40 m de hauteur. Ces menhirs sont disposés de manière accolée les uns aux autres. L'hémicycle sud, immergé, a une forme circulaire d'environ 60 m de diamètre avec une ouverture à l'est. Il est aligné sur le lever du soleil. Il est constitué de 30 menhirs ayant une hauteur quasi constante de 4 m. Les deux menhirs d'extrémités sont plus imposants avec un de 8,20 m de hauteur. Ils sont disposés avec des espaces réguliers entre eux. D'autres blocs ont été retrouvés autour de ces deux hémicycles. En tout, il a été dénombré 119 menhirs sur ce site.

le cromlech nord
Le cromlech nord en 1996

autre vue du cromlech
Le cromlech en 1985

Les différentes fouilles effectuées sur ce site notamment par G. de Closmadeuc en 1866, de R. Merlet en 1919, de Zacharie Le Rouzic entre 1923 et 1926 et les relevés de 1992 ont permis de découvrir que quatre menhirs portaient des gravures. Deux menhirs portent des représentations de haches, un menhir porte une série de cupules pouvant représenter la constellation de la Grande Ourse (selon Zacharie Le Rouzic) et un menhir porte une gravure composée de quatre traits verticaux et parallèles.

Les différents éléments archéologiques trouvés lors des fouilles laissent envisager une occupation du site aux alentours de 4000 av. J.-C. avec une édification des hémicycle vers 3500 av. J.-C. Les différences de construction laissent également penser que l'hémicycle sud a été construit après l'hémicycle nord. Les découvertes effectuées lors des fouilles suggèrent que le site a été utilisé comme atelier de taille et de polissage de haches puis converti en lieu sépulcral et en sanctuaire à moins que la fabrication des haches fût considérée comme un acte sacré.

le cromlech en 1985
Le cromlech en 1985

autre vue du cromlech en 1985
Le cromlech en 1985

Le cairn de Gavrinis

Le cairn de Gavrinis est situé au sud de l'île aux chèvres, face au village de Larmor-Baden. Il borde le principal chenal du golfe qui constitue aussi l'ancien estuaire de la rivière de Vannes, aujourd'hui complètement submergé. Bien que connue depuis le Moyen-âge, la première description du cairn a été effectuée en 1825 par le chanoine Mahé. Il décrit au sommet du cairn un cratère au fond duquel une ouverture permettait d'accéder à une cavité. En 1829, monsieur Cauzique, propriétaire de l'ile, la fait défricher afin d'y établir une propriété agricole. Durant ces travaux, il dégage le cairn et en 1832, il fait vider la chambre du dolmen. En 1835, Prosper Mérimée visite le dolmen en s'y glissant par l'ouverture au fond du cratère, car le couloir n'était pas encore dégagé. En 1880, l'ile devient la propriété de monsieur De Closmadeuc, archéologue réputé, qui entreprend des fouilles dans le dolmen afin de découvrir un éventuel couloir caché sous le dallage. Il fera également pratiquer une tranchée de 12 m de longueur dans le cairn pour rechercher d'autres dolmens. Entre 1925 et 1927, Zacharie Le Rouzic réalise quelques travaux de restauration. De 1979 et 1984, une grande campagne de fouille et de restauration sous la direction de Charles-Tanguy Leroux, restitue le monument dans un état proche de celui d'origine.

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L'ile de Gavrinis en 1985

La partie centrale du monument est un dolmen à couloir. Le couloir a une longueur de 11,80 m, une largeur de 1,50 m et une hauteur de 2 m. La chambre à une forme rectangulaire de 2,70 m sur 2,30 m. Elle a une hauteur de 1,70 m. Le couloir est constitué de 23 orthostates (12 côté nord et 11 côté sud) et de 9 dalles de couvertures. La chambre est formée de six orthostates et d'une dalle de couverture. Le sol est entièrement pavé à l'aide de dalles plates de grande dimension. Une pierre de seuil marque l'entrée du couloir et une autre le passage entre le couloir et la chambre. Le dolmen est orienté vers le sud-est. Les fouilles récentes ont montré que les orthostates sont disposés dans une tranchée de 40 cm de profondeur taillés dans le rocher formant le sous-sol de l'ile. Le dallage du couloir et de la chambre (une seule dalle couvrant toute la surface) repose sur un remblai de 65 à 100 cm d'épaisseur constitué de pierrailles et de sable.

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L'entrée du dolmen en 1985

Le dolmen est recouvert d'un cairn presque circulaire (60 x 54 m), d'une hauteur de 8 m. La partie arrière du cairn est en pente douce. À cet endroit, le cairn en pierre est recouvert d'une couche de terre. La façade, dans laquelle s'ouvre le couloir du dolmen par un magnifique trilithe, est orientée vers le sud-est. Cette partie est totalement dégagée et forme un parement en pierre sèche architecturé en gradins et en écailles autour de l'entrée du dolmen. Le cairn est constitué d'un noyau central enserrant le dolmen. La façade de ce noyau central a, au sommet, une largeur de 4 m. Les écailles sont au nombre de trois sur le côté sud et de deux sur le côté nord. L'inflexion vers l'arrière du cairn est en angle vif côté sud et de forme arrondie côté nord. L'inclinaison verticale du parement est de l'ordre de 60° à 70° et a été réalisée avec un très grand soin. La réalisation des parements contraste avec l'intérieur du cairn constitué d'un amoncellement de pierres de dimension varié et colmaté par de la terre sableuse. La façade a une longueur de 28 m. Le volume de pierre utilisé pour la construction du cairn a été estimé à 5000 m3 correspondant à un empierrement d'une surface équivalente à trois à quatre fois celle de l'ile. Les archéologues ont estimé que sa construction a nécessité environ 100 000 journées de travail (près de trois ans pour une centaine de personnes).

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Le cairn de Gavrinis en 1985

Les dernières fouilles ont permis de dégager la dalle de couverture de la chambre. Cette dalle de 3,70 m de longueur sur 3,10 m de largeur a une épaisseur de 80 cm. Elle a un poids estimé à 17 tonnes. La face supérieure de cette dalle a révélé la présence de gravures représentant une hache-charrue, longue de 2,80 m, et un bovidé de 2 m de long. Une partie de la hache-charrue est manquante et sous le bovidé apparaissent le dos et les cornes d'un deuxième animal, ce qui prouve que le débitage de la dalle a eu lieu après la réalisation des gravures. Les recherches effectuées ont permis de déterminer que la dalle de couverture de la "Table des Marchands" à Locmariaquer, sur laquelle se trouve la gravure d'un bovidé, s'accorde avec cette dalle. De même, la dalle de couverture du dolmen situé dans le tertre d'Er Vinglé à Locmariaquer s'accorde avec l'autre côté de la dalle de couverture de Gavrinis. Ces trois éléments constituaient un menhir, d'une hauteur de 14 m. Celui-ci faisait partie d'un alignement mis en évidence à côté d'un dolmen de la "Table des Marchands" dont le seul élément restant est le "Grand Menhir Brisé" de Locmariaquer. Un autre de ces grands menhirs formant cet alignement a été utilisé pour former la dalle de couverture du dolmen de Mané-Rutual. Cette dalle, longue de 12 m, est ornée d'une immense figure en "écusson".

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La façade du cairn en 1985

La fouille de l'esplanade située devant la façade du cairn a mis en évidence la présence d'une lentille pierreuse formant un petit perron devant l'entrée du dolmen. Sur le côté sud de l'esplanade fut retrouvée une couche de cendre de 2 m de large et longue de près de 20 m. Elle se situe entre 3 et 6 m en avant de la façade. Cette trainée cendreuse se prolongeait côté nord par huit masses de charbons de bois identifié comme étant des pieux en bois. Au-dessus de ces restes calcinés fut déversée une masse importante de gros blocs de pierre dont les vides interstitiels étaient remplis de manière imparfaite avec du sable. Au-dessus se trouvait une chape superficielle de terre. Les pierres en contact direct avec les cendres étaient rubéfiées indiquant qu'elles ont été déversées sur des braises. Sous cet amas de pierres a été retrouvé un groupe de trois haches polies et deux amas de tessons correspondant à de la céramique écrasé sur place. Nous pouvons en déduire que la façade du monument était pourvue d'une construction en bois qui fut incendiée puis recouverte de pierres et de terre condamnant ainsi l'accès au dolmen. La datation au C14 d'une des masses de charbon de bois a donné une fourchette de 3480 à 2950 av. J.-C.. Aucun élément n'a cependant permis de dater la construction du monument. Son utilisation semble toutefois avoir été de courte durée, car aucune trace de remaniement ou d'agrandissement (évènement indissociable d'une longue période d'utilisation) n'a été découverte. Nous savons que le monument a été condamné de manière brutale par l'incendie des structures en bois puis recouvert d'une chape en sable pour en faire un monticule anonyme vers 3000 av. J.-C.. Le couloir a également été comblé de manière volontaire comme en témoigne la difficulté qu'éprouvèrent les hommes de G. de Closmadeuc en 1884 à en évacuer le contenu très compact. Le site a cependant continué d'attirer les hommes notamment par sa position de belvédère à l'entrée du golfe. Une hallebarde en bronze et des vestiges gallo-romains (tessons de poteries, monnaies) ont été retrouvés sur le cairn.

plan
Les numéros correspondent aux orthostates ornés (Plan sans échelle)

La particularité de Gavrinis ne réside pas dans l'architecture du dolmen, mais dans son exceptionnelle décoration. Tous les orthostates, sauf les no 7 et 11 (dalles en quartz), ont été dégrossis et régularisés par martèlement avant d'être gravés à l'aide de galets à facettes en quartz (dreikanters). Plusieurs centaines de ces galets percutées ont été retrouvées abandonnées sur l'esplanade. Vingt-trois orthostates sur 29 ont été couverts de gravures ce qui représente près de 60 m2 de figures. Aucun autre mégalithe ne possède une telle foison de gravures.

Passer la souris sur les photographies pour faire apparaitre les gravures

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La chambre du dolmen

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Une vue sur le couloir et la chambre du dolmen

Le thème principal est celui de "l'écusson" représentation de l'idole des mégalithes ou déesse des mégalithes. Elle prend à Gavrinis la forme d'un écusson constitué d'arcs de cercle concentrique rayonnant autour d'un trait central. Certains écussons possèdent de plus un rostre dans leur partie supérieure pouvant représenter la tête surmontant un corps massif comme visible dans la partie centrale de l'orthostate no 9. Beaucoup de ces écussons possèdent également une chevelure rayonnante représentée par des traits à l'extrémité recourbée (des crosses ?). Le thème des crosses est bien identifiable sur l'orthostate no 14 qui peut être assimilé à la dalle de chevet de la "Table des Marchands" à Locmariaquer.

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L'orthostate n° 8

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L'orthostate n° 9

La représentation des haches est également importante et très réaliste. Leur forme triangulaire fortement prononcée les rapproche des "haches d'apparat" découvertes dans les grands tumulus de la région. À Gavrinis, elles sont présentes de manière isolée ou regroupée par deux ou quatre (orthostate no 10), voire en grande série comme les dix-huit de l'orthostate no 21. Sur cette dalle, elles surmontent une déesse en écusson.

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L'orthostate n° 10

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L'orthostate n° 21

Les lignes en zigzags et en méandres sont abondantes. Certaines de ces lignes sont interprétées comme la représentation de serpents (un des symboles du monde souterrain). Cela ne fait aucun doute sur le haut de l'orthostate no 4 et sur le bas de l'orthostate no 8. Sur celle-ci sont gravés trois serpents dont la tête (renflement) est bien marquée. Sur l'orthostate no 24, la représentation d'un arc évolué et de flèches est parfaitement identifiable.

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L'orthostate n° 22

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Les orthostates n° 13 et 14

L'orthostate no 18 présente en son centre une étrange cavité, surmonté de deux anneaux. Cette cavité, qui excite l'imagination, est d'origine naturelle. Elle correspond à la présence dans le granit d'un crapaud amphibolitique plus tendre que l'érosion marine de la dalle a fait disparaître laissant ainsi la cavité. Le mystère est de savoir si la dalle a été choisie pour cette particularité ou a été prise par défaut malgré cette cavité. Il s'avère néanmoins que les "anneaux" recouvrant la cavité ont été préservés (ou aménagé) intentionnellement lors du dégrossissage de la dalle. La partie inférieure de cette dalle porte également deux spirales. Deux autres ont été identifiés sur les orthostates no 11 et 25. Gavrinis est le seul dolmen français à avoir des gravures en forme de spirales. Ce motif est cependant courant dans les dolmens de la vallée de la Boyne en Irlande. Le dolmen de Newgrange possède également un orthostate orné de trois cupules alignées entouré de lignes en arceaux comparables à l'orthostate no 18 de Gavrinis. Des hypothèses sur l'emploi de couleurs pour souligner certaines gravures ont également été avancées par des archéologues. Si aucune preuve n'existe à Gavrinis, des peintures ont été confirmées dans certains dolmens ibériques.

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L'orthostate n° 18

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Détail de l'orthostate n° 18

Le décor de Gavrinis fait preuve d'une grande homogénéité. Il a été réalisé par un groupe restreint d'artistes travaillant probablement sous l'autorité d'un "maitre". Cependant, quelques gravures tranchent sur cette unité comme l'unique hache emmanchée, visible sur la pierre intercalaire située au-dessus de l'orthostate no 6, les chevrons figurant sur la tranche de l'orthostate no 20, sous le pavage, ou les chevrons et les losanges figurant sur les chants de la pierre de seuil de la chambre. Ces éléments démontrent que des dalles ornées ont été réutilisées pour la construction du monument. La fouille du cairn a permis la mise à jour de la face cachée de certains orthostates. Est ainsi apparue sur la face arrière de l'orthostate no 19 une grande figure, haute de 112 cm, représentant une hache emmanchée similaire à celle figurant sur le dolmen de Pen Hap sur l'ile aux Moines. L'orthostate no 15 porte une composition, sur une hauteur de plus d'un mètre, de deux haches emmanchées et d'une esquisse d'un écusson quadrangulaire.

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Les orthostates n° 14 et 15

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Les orthostates n° 16 et 17

La profusion de la décoration de Gavrinis ne trouve son équivalent que dans les monuments de Newgrange et de Knowth dans la vallée de la Boyne en Irlande. Il est scientifiquement établi que le dolmen de Newgrange est orienté de sorte que le soleil levant vient éclairer la chambre au solstice d'hiver. Gavrinis est également orienté de cette façon bien que le phénomène n'ait pas été démontré. Les différentes fouilles documentées ne faisant état d'aucune découverte d'objet dans un contexte funéraire au sein du dolmen et le colmatage du couloir, vidé en 1884, semblant dater de l'époque de la condamnation du monument, nous pouvons penser que le dolmen n'a pas été pillé ou dû moins que partiellement, depuis sa condamnation à l'époque néolithique. À partir de ces différents éléments, nous pouvons formuler l'hypothèse que Gavrinis, tout comme Newgrange, doit être considéré comme un temple plus qu'un site funéraire même destinée à une élite. La ou les divinités vénérées en son sein resteront pour nous un mystère.

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Les orthostates n° 19 et 20

 

D'autres informations et théories sur les mégalithes sont consultable sur la page "Les mégalithes".

Pour de plus amples informations sur l'art rupestre consultez la page consacrée à "L'art rupestre".

 

Y ACCÉDER:

L'îlot d'Er Lannic est une propriété privée et une réserve ornithologique. Il est interdit d'y accoster. Par contre, les cromlechs peuvent être vu à partir des vedettes assurant les excursions dans le golfe, à partir de Locmariaquer ou de Larmor Baden.

Gavrinis peut être visité à partir de Larmor Baden, d'où un service de navettes maritime assure la liaison avec l'île.

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.

 

Cette page a été mise en ligne le 26 mars 2003

Cette page a été mise à jour le 20 février 2015