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La grotte de Tante Arie

Tous les enfants de notre monde occidental connaissent le père Noël et le Saint Nicolas. Dans le pays de Montbéliard et sa périphérie, ces deux personnages sont remplacés par un personnage dénommé Tante Arie. Cette femme tantôt présentée comme une fée, tantôt comme une sorcière, est à l'origine de nombreuses légendes.

la grotte de la Combe Noire
Le porche de la grotte de la Combe Noire

Tante Arie est représentée sous les traits d'une vieille femme aux cheveux blancs, mais au visage jeune. Elle est habillée à la mode paysanne avec le bonnet des Montbéliardaises, "le diairi", une jupe courte, "la frileuse", et des souliers à boucles. En hiver, elle se couvre d'une pèlerine pour se protéger du froid. Lors de ces déplacements, elle est toujours accompagnée d'un âne répondant au nom de Marion. Selon différentes sources, elle habiterait la "Roche de la Faire" (la fée) à Beurnévesin, "Sous la terre qui sonne" à Etobon, dans la grotte de la chaîne du Lomont ou dans la grotte de Millandre près de Boncourt. Mais son lieu de résidence préféré est la grotte de la Combe Noire à Blamont.

la falaise
La falaise de la Combe Noire

Chaque lieu possède sa légende. A Boncourt par exemple, Arie se métamorphose en vouivre pour se baigner dans les bassins d'eau claire. A Daucourt, elle peut se changer en serpent et disposerait d'un coffre rempli d'or. A Réchésy, Arie a des dents de fer, une couronne de diamants et des pattes d'oie et jette les enfants méchants dans la rivière. Pour beaucoup, les pans de sa chemise représentent des flocons de neige. Tante Arie se penche sur le lit des enfants endormis pour leurs recommander d'être sages. Les enfants qui l'écoutent ont droit à des cadeaux et les autres à des verges trempées dans du vinaigre.

la grotte de tante Arie

Les origines de Tante Arie ne sont pas connues. Selon certaines sources, Arie serait une druidesse, la dernière d'entre elles. Arie dériverait du latin "Aéria", la fée des airs. Dans la mythologie romaine, "Aéria" était l'épouse de Jupiter et présidait comme lui aux phénomènes atmosphériques. D'autres sources rapprochent Arie de la mythologie germanique. Elle est assimilée à Dame Berchta ou Fréa, l'épouse de Wotan. Comme elle, Tante Arie surveille les fileuses. A la plus appliquée, elle offre un mari vertueux et une bourse pleine d'or. L'origine de Tante Arie est plus probablement à rechercher auprès de la comtesse Henriette de Montfaucon–Montbéliard qui vivait au château d'Etobon au XVe siècle. Henriette était une femme qui maniait les armes comme un chevalier et protégeait ses sujets. Elle était également très généreuse avec ses sujets et fut très regrettée lors de sa mort en 1444. A tel point que le ciel la renvoya sur terre en la chargeant de veiller sur la contrée et de récompenser les enfants. Arie dérive de Henriette prononcée Ariette dans le patois local.

le porche d'entrée

Tante Arie visite les fours à pain et les maisons hospitalières. Elle veille à l'ordre, au travail et à l'économie. Si elle y trouve des habitants hospitaliers, travailleurs, ordonnés et économes, elle leur apporte des bienfaits. Elle a ainsi prêté son âne à une pauvre veuve qui venait de perdre le sien, elle termine l'ouvrage des brodeuses fatiguées ou cuisine des gâteaux pour les paysans aux champs. Elle a aussi recueilli dans sa grotte en plein hiver, un voyageur perdu et lui a servi un repas avant de le remettre sur le bon chemin. En lui offrant des dons, on s'assure de sa protection. Tante Arie apprécie beaucoup les dépôts de pain et de lait devant sa grotte. Une jeune femme désirant un mari sollicite son aide en lui offrant des fleurs ou une branche de gui. Cette tradition perdure à l'heure actuelle comme en témoignent les photos.

l'entrée

C'est au XIXe siècle que Tante Arie devient une distributrice de cadeaux pour les enfants le jour de Noël d'après Charles Roy (Us et coutumes de l'ancien pays de Montbéliard 1886). A Noël, les familles préparaient pour chaque enfant un petit autel supportant autant de cierges que l'âge de l'enfant. Cet autel était garni de bonbons et de gâteaux, un peu à l'image du sapin de Noël. Devant l'autel étaient placés les sabots dans lesquels Tante Arie laisse son présent, ainsi qu'un peu de foin pour l'âne Marion. Tante Arie parcourt le pays le soir du 24 décembre avec son âne chargé de cadeaux (biscuits de sa fabrication, noix, fruits, craquelins, etc..). L'âne de Tante Arie porte autour du cou une clochette dont le tintement fait sombrer dans le sommeil les enfants qui luttent pour rester éveillés. De ce fait, les enfants ne la voient jamais. Mais les beaux cadeaux ne sont que pour les enfants sages, pour les autres elle dépose à côté de quelques présents, des bonnets d'âne et des verges trempées de vinaigre en guise d'avertissements. Cette histoire est la transcription du conte de St Nicolas et du père Noël tel qu'ils sont connus en Alsace et en Allemagne.

dans la grotte
A l'intérieur de la grotte

Une autre histoire de Noël est attachée à la grotte de la Combe Noire. Un vieil homme aurait vécu en ermite dans une baraque à proximité de la grotte. Sur la fin de sa vie, cet homme voulut rejoindre le monde des vivants après l'avoir rejeté durant de nombreuses années. Il passa donc des journées à confectionner à partir de vieilles branches, de racines et de quelques chiffons, des figurines et des poupées. Il alla déposer ces objets sur le seuil des maisons pendant que les habitants assistaient à la messe de minuit dans la chapelle du château de Blamont. La neige ayant recouvert les traces de ces pas, les habitants découvrirent les présents tombés du ciel à la lueur de leurs lanternes. Ce n'est que plusieurs jours plus tard que fut élucidé le mystère de la nuit de Noël. L'ermite fut retrouvé mort dans la grotte de Tante Arie où il s'était réfugié après l'effondrement de sa baraque sous le poids de la neige. Il était entouré de quelques figurines en cours de fabrication.

la falaise

Dans les villages entourant, la Combe Noire se raconte la mésaventure arrivée au père Raviot. Par un matin de printemps, le père Raviot et Antoine, son valet, labourait son champ avec sa charrue que tiraient deux bœufs. En traçant les sillons, le père Raviot pensait aux gâteaux que préparait sa femme pour le dimanche. Il y pensait si fort que l'eau lui venait à la bouche et qu'il en sentait l'odeur. Mais il ne rêvait pas, il sentait bien une odeur de gâteaux et il finit par demander à Antoine s'il ne sentait rien. "Si maître" lui répondit Antoine "et même que l'odeur vient de là bas". Ils laissèrent la charrue et s'approchèrent de la roche d'où s'échappaient des volutes de fumée. Aucun doute, Tante Arie était en train de confectionner les gâteaux qu'elle offrait pour Noël. Le père Raviot s'écria "Ah bonne Tante Arie, si vous vouliez nous offrir un seul de vos gâteaux, vous nous feriez tellement plaisir. Nous nous sommes levés de bon matin et nous avons grand faim!" Comme rien ne changea, ils reprirent leur travail. Au bout de quelques minutes, Antoine s'écria "Je vois quelque chose sur la pierre !" Les deux travailleurs découvrirent donc sur la roche drapée d'une belle nappe, un gâteau cuit et doré à point. Ils ne se firent pas prier pour le dévorer. Étant rassasiés, ils se remirent à leur charrue. Mais celle-ci se mit à grincer et à se plaindre. Ces roues gémirent "Rends ce que tu dois !" Le père Raviot s'exclama "Antoine n'as-tu rien pris ?" "Non maître" répondit celui-ci. Continuant le travail, la charrue se lamenta de plus en plus fort "Rends ce que tu dois ! Rends ce que tu dois !" et une roue finit par se dévisser. "Ah ! garnement tu dois mentir, vas tu avouer ce que tu as commis !" s'écria le père Raviot. Antoine terrorisé, finit par dire "Maître, j'ai caché dans ma poche le petit couteau en argent qui était sur la roche et qui nous a servi à partager le gâteau". " Va vite le remettre où tu l'as pris !" le sermonnas le père Raviot. Après avoir rendu le couteau, les choses reprirent leurs cours et le père Raviot et Antoine purent finir de labourer le champ sans encombre. Source: Musée du jouet de Moirans-en-Montagne.

l'inscription
L'inscription figurant dans la grotte

La grotte de la Tante Arie est une petite cavité s'ouvrant dans la paroi rocheuse de la Combe Noire. Elle s'ouvre par un porche rond de 2 m de diamètre et a une profondeur de 6 m. Au fond sur la gauche, un passage donne sur une petite salle de 1 m de largeur, de 2 m de longueur et de 1 m de hauteur. A l'entrée de la grotte figurent deux inscriptions. Sur la droite, on peut lire sous le symbole du Christ sur la croix l'inscription en allemand "Eine Feste Burg ist unser Gott" ("C'est un rempart que notre dieu", cantique de Martin Luther composé entre 1527 et 1529 ou "Notre Dieu est une solide forteresse", cantate de Johann Sébastian Bach composé en 1724) et sur la gauche la date de 1855. A gauche de la grotte, dans une petite cavité se trouve une vieille cafetière contenant quelques fleurs perpétuant la tradition des offrandes à Tante Arie.

la petite cavité
La petite cavité du fond

Ces photographies ont été réalisées en mai 2008.

 

Y ACCÉDER:

De Pierrefontaine-les-Blamont, prendre la direction de Villars-les-Blamont. A la sortie du village, garez-vous dans le chemin partant sur la droite. Revenez à pied vers le village et descendez au niveau du virage dans le pré formant le haut de la combe (passage prévu dans la clôture). Descendez jusqu'au fond du pré d'où part le sentier serpentant le long de la falaise vers la grotte.

Coordonnées GPS
47 N 22' 40"
06 E 51' 05"
Altitude 496 m

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.

 

 

Cette page a été mise en ligne le 28 juin 2008

Cette page a été mise à jour le 24 avril 2019