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Au fond de ce petit vallon que l'on nomme druidique, nous attend une curiosité créée par l'homme à une époque inconnue. Nous trouvons là, abandonnée à flanc de coteau, une cuve octogonale taillée dans un bloc de grès. Cette pierre d'un diamètre extérieur de 3,70 m a été évidée pour former un bassin circulaire de 3 m de diamètre et de 45 cm de profondeur.
Le cuveau des Fées
Des fouilles, effectuées en 2000, ont démontré qu'elle a été taillée sur place puis abandonnée. En effet, lors de la taille, les carriers se sont aperçus qu'au fond de la cuve existait une strate de grès tendre qui a provoqué une cassure rendant l'utilisation de ce bloc, en tant que cuve, impropre. Aucun mobilier ayant été découvert à proximité de la cuve, il n'a pas été possible de dater sa réalisation. Cependant, la propreté de la carrière et la technique utilisée évoquent une réalisation durant le XVIe ou le XVIIe siècle, mais rien n'est prouvé. On ignore la destination de cette cuve. Elle aurait pu servir à aménager une source (il y en a plusieurs dans le vallon), servir de fontaine sur la place d'un village ou de piscine baptismale (l'octogone étant le symbole des baptistères paléochrétien). La guerre de Trente Ans, qui a dévasté la région, a également effacé toutes traces de cette réalisation.
L'imagination populaire a cependant pallié ce manque d'information. La légende nous dit que cette cuve a été réalisée par les fées. La nuit, les fées utiliseraient le cuveau pour y laver leur voile blanc. Le cuveau est aussi devenu une pierre à bébés. Tous les enfants des environs seraient nés ici et les fées, avant de les apporter aux mamans, baigneraient les bébés dans le cuveau. Le sentier menant au Cuveau des Fées est d'ailleurs nommé "Sentier de la Dame Blanche".
Dans le vallon, avant le Cuveau des Fées se trouvent la chapelle Saint Martin et à côté, la grotte Saint Martin. La chapelle moderne est la èime reconstruction d'une chapelle primitive. L'histoire a retenu que la fille du duc Gondouin, Salaberge, fit construire au VIIe, une chapelle à cet endroit. Mais une chapelle a dû exister ici depuis le VIe siècle construit par des disciples de Saint Colomban qui évangélisa les Vosges. Le vocable de Saint Martin rappelle d'ailleurs les débuts de la christianisation. Le vallon a été christianisé pour s'approprier un lieu de culte païen. Les Leuques, peuple celte qui occupait ce territoire, avaient certainement créé un lieu de culte dans ce vallon où le Madon prend sa source.
La chapelle Saint Martin
La grotte Saint Martin
A côté de la chapelle se trouve un abri sous roche utilisé depuis des temps immémoriaux. Le porche naturel, profond d'une dizaine de mètres, a été prolongé par une galerie de 33,60 m de longueur creusée de main d'homme. Cette galerie présente de nombreux aménagements. Les recherches ont mis en évidence quatre niches destinées à recevoir des lampes, treize trous carrées de 2,50 cm de côté et surtout quatre puits carrés dont la profondeur varie de 75 cm pour le puits 3 à 5,40 m pour le puits 1. Ces puits ont la même largeur que la galerie.
La galerie de la grotte
Le puits n°1
L'usage de ces puits reste un mystère. Ils pourraient avoir servi de glacière, les hommes stockant la glace en hiver pour l'utiliser en été. Cependant l'absence d'évacuation de l'eau de fonte de la glace au fond des puits, ne correspond pas à ce genre d'utilisation. L'hypothèse de puits de mine a également été avancée. Les verriers du XIVe siècle les auraient creusés afin d'exploiter le manganèse (qui sert à rendre la pâte de verre transparente) ou les oxydes de fer (colorant). Les fouilles effectuées n'ont cependant trouvé que d'infimes traces de manganèse ou de fer ne permettant pas de confirmer cette hypothèse. L'utilisation de la grotte en abri refuge est une autre possibilité. La grotte est assez grande pour abriter des dizaines de personnes. Les puits 1, 2 et 4, atteignant la nappe phréatique, assurent une alimentation en eau intarissable. Le puits 3 restant au sec pouvait être un silo. Mais les puits occupent toute la largeur de la galerie rendant ainsi le passage difficile et un puits pour l'eau aurait été amplement suffisant. De plus en cas d'attaque, la grotte deviendrait un véritable piège. Il nous reste l'hypothèse d'un lieu de culte. Les Leuques, en plus du culte des sources (amplement répandu chez les Celtes), auraient vénéré le dieu Sucellus dont le compagnon est un bœuf. A la gauche du porche, sont d'ailleurs creusées des mangeoires dans la roche. En aval de la grotte existe aussi la fontaine du bœuf où l'eau jaillit entre les cornes d'une tête de bœuf. Ce culte a été supplanté, à la conquête romaine, par le culte de Mithra. Ce culte est lié au taureau et était pratiqué dans les grottes ou des sous-sols.
Le porche de la grotte
Les mangeoires dans le porche
Le culte pratiqué à cet endroit devait être puissant, car les autorités chrétiennes ont déployé beaucoup d'efforts pour christianiser les lieux. La construction de la chapelle devant la grotte, occupé très tôt par des ermites chrétiens, est accompagnée par la christianisation des sources. Ainsi naissent la source Sainte Claire destinée aux soins des yeux et la source Sainte-Barbe dédiée aux maladies de la peau. Les chanoinesses de Remiremont, propriétaire des lieux au Moyen-âge, organisaient le lundi de Pentecôte de grandes processions dans le vallon. Les armoiries de l'abbaye de Remiremont figurent d'ailleurs sur la fontaine du bœuf. La source Sainte Claire fait toujours l'objet d'un pèlerinage au mois d'août.
La fontaine du bœuf
La tête de bœuf de la fontaine
D'autres traces d'occupation de ces lieux sont visibles au site du Châtelet. Le Châtelet est un oppidum celte réaménagé par les Romains. Le site a laissé ensuite la place à un petit château médiéval. L'oppidum celtique occupait le promontoire rocheux et était protégé, du côté accessible, par deux remparts en terre successifs munis d'une porte en chicane. Ces remparts ont ensuite été remplacés par des murs dont de nombreux blocs taillés ont été retrouvés. Ces blocs étaient munis de dispositifs d'assemblage par des tenons en bois en forme de queue d'aronde. Le site gallo-romain a laissé la place à une motte castrale avec un donjon en bois. Cette motte occupait le sommet du promontoire. Ce sommet a été coupé en deux par une tranchée réalisée lors d'une fouille ancienne. Des fouilles plus récentes ont dégagé trois fosses légèrement en contre bas du sommet. Une des fosses s'est relevée être un puits filtrant (sable) servant de réserve d'eau. Une autre fosse était probablement un four à chaux alors que la fonction de la troisième reste inconnue.
Le site du Châtelet
Les fosses du Châtelet
Sous le site du Châtelet, vous pouvez admirer la Pierre aux Chevaux. Cette roche n'a rien à voir avec le fier animal bien qu'il soit possible de voir gravé sur la pierre un fer à cheval. Cette roche qui surplombe l'entrée du vallon était dénommée le "Chef du Val". Ce nom a été déformé, au long du temps en "Chefval" et est devenu "Chevau". Sur cette roche, vous pouvez admirer deux superbes gravures rupestres, représentant des marelles ou jeu de dames.
La Pierre aux Chevaux
La marelle de la Pierre aux Chevaux
Le long du vallon, vous pouvez également voir plusieurs carrières ayant servi à extraire des meules. Ces carrières étaient considérées au XIXe siècle comme des temples gaulois. Ceci, combiné au Cuveau des Fées que l'on croyait être une pierre à sacrifice, est à l'origine du nom de Vallon Druidique. Une des carrières de meules a fait l'objet de fouilles en 1998. La découverte de deux monnaies ducales et d'un médaillon en argent contenant une image a permis aux archéologues de dater l'exploitation du XVIIe siècle. L'exploitation de la carrière était réalisée par tranche à flanc de coteau. Les déchets de la tranche exploitée rebouchaient la tranchée précédente. Les meules d'un diamètre moyen de 145 cm étaient extraites en creusant une tranchée au pic délimitant le pourtour. Les meules étaient ensuite détachées avec des coins enfoncés à la masse. Les meules pouvaient également être façonnées à partir de gros blocs dont on coupait les angles pour en faire un cylindre que l'on débitait ensuite en tranches. Les meules brutes étaient ensuite rodées dans des tourneries pour leur donner un aspect parfaitement cylindrique. Les archéologues estiment la production de cette carrière entre 200 et 400 meules. L'abandon de cette carrière est dû à la présence de micro failles rendant le grès impropre à la fabrication de meules, à moins que ce ne soit la guerre de Trente Ans qui y mit fin.
La carrière de meules
Un pourtour de meule
Le front de taille
Ces photographies ont été réalisées en août 2007.
Y ACCÉDER:
Le Vallon Druidique est situé à côté du village Le Void d'Escles qui se trouve sur la D460 entre Epinal et Darney. L'entrée du vallon est située dans la boucle que fait la D460 en contournant Le Void d'Escles. Suivez la route forestière jusqu'au virage en épingle à cheveux où est situé un parking. De là, suivez le sentier remontant le Madon sur sa rive droite vers la grotte et la chapelle Saint Martin. De la chapelle, un sentier circulaire (30 mn) mène vers le Cuveau des Fées et la source du Madon.
Depuis le parking, le sentier remontant la rive gauche du Madon mène en 2 mn vers la source du Bœuf.
Pour accéder à la carrière des meules, suivez à pied le chemin forestier continuant sur la rive gauche du Madon. Au 1er embranchement, prenez le chemin à droite qui descend. En suivant le balisage, ce chemin puis un sentier vous mèneront vers la Pierre aux Chevaux et le site du Châtelet.
Depuis le Vallon Druidique, vous pouvez rejoindre le village de Vioménil. Dans ce village se trouve la source de la Saône, affluant du Rhône.
La source de la Saône
Coordonnées GPS du Cuveau des Fées
48 N 06' 06"
06 E 12' 09"
Altitude 508 m
Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.
Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.
Cette page a été mise en ligne le 09 octobre 2007
Cette page a été mise à jour le 23 février 2015