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La grotte préhistorique de Gigny

La grotte de Gigny a accueilli une occupation humaine au cours du paléolithique moyen. Les fouilles, effectuées de 1966 à 1977 par Marcel Vuillemey, ont contribué à en faire un site de référence pour la préhistoire française, voire même européenne.

l'entrée de la grotte

La grotte s'ouvre au pied des falaises entourant un petit cirque sur le flanc est de la vallée du Suran. Le Suran est une petite rivière, affluant de l'Ain. Elle coule au fond d'une vallée orientée nord-sud sur le plateau de Lons-le-Saunier. Ce plateau a été formé par le glacier qui recouvrait le Jura lors de la glaciation de Riss (650000 à 120000 ans). Lors de la glaciation de Würm (60000 à 18000 ans), le glacier s'arrêta à une dizaine de kilomètres à l'est de la vallée du Suran. Cette vallée a été creusée par le glacier et par ses eaux de fonte.

vue depuis le belvedere
La vallée du Suran vue depuis le belvédère du Fays

Le porche de la grotte domine le fond de la vallée d'environ 100 m. Avant les fouilles, le porche avait une largeur de 5 m et une hauteur de 3,50 m. Depuis ce porche, une galerie s'enfonce d'une centaine de mètres dans la roche quasiment en ligne droite selon une orientation presque ouest-est. La largeur de cette galerie varie de 5 à 10 m. Elle débouche sur une vaste salle orientée nord-ouest/sud-est. Cette salle a une longueur d'environ 45 m pour une largeur de 10 m. Une grande partie de cette salle présente une avancée vers l'avant de la grotte. Sur le côté gauche (en regardant le fond de la grotte) de la grande salle s'ouvre un étroit passage donnant sur un petit diverticule de 2 m sur 1 m et haut de 1 m. La formation de la grotte est due à l'action de l'eau qui a dissout le calcaire. La galerie ainsi creusée a ensuite subi l'effritement de son plafond et des parois sous l'action alternée du gel et du dégel durant les glaciations. Cette action combinée à l'action du CO2 contenue dans l'eau durant les périodes chaudes, provoque le remplissage du sol de la grotte tout en l'agrandissant vers le haut et en largeur.

le plan de la grotte

le porche
La galerie après le porche d'entrée

À la fin du XVIIIe siècle, le guano de chauve-souris fut récolté dans la grande salle de la grotte pour servir d'engrais. Lors de cette exploitation, des ossements humains furent découverts avec notamment un crâne recouvert de calcite. Au XIXe siècle, plusieurs squelettes furent découverts, mais aucune localisation n'est connue et les datations fournies pour ces ossements sont totalement erronées. La grotte a servi d'abris durant la guerre de Trente Ans tout comme lors de la guerre qui aboutit à l'annexion de la Franche-Comté par la France en 1678. Un mur de fortification fut retrouvé lors des fouilles. Il n'est donc pas possible de savoir si les ossements datent de cette époque ou s'ils sont plus anciens. À la fin du XIXe siècle, l'archéologue Émile Chantre en étudiant des sépultures attribuées au néolithique, pressentit l'existence d'éléments plus anciens. Les niveaux protohistoriques encore en place furent détruits en 1955. Les objets recueillis à cette occasion n'ont jamais fait l'objet d'études.

salle 2-1
L'avancée de la salle principale (à gauche la galerie d'accès)

salle 1-3
Le fond de la grotte

De 1966 à 1977, le porche de la grotte a fait l'objet d'une vaste fouille de la part de Marcel Vuillemey. Vingt-huit niveaux archéologiques, allant du protohistorique à l'acheuléen et représentant 11 m de remplissage, furent reconnus. Les 28 niveaux ont pu être regroupés en quatre périodes. Les niveaux I à III sont d'époque historique et protohistorique. Les niveaux IV à VI correspondent au paléolithique supérieur (12000 à 25000 ans BP). Les niveaux VII à XX sont datés de la glaciation de Würm (28000 à 90000 ans BP) et les niveaux XXI à XXVIII sont de l'interglaciaire Riss Würm. Le niveau XXI est daté de 145000 ans BP. Le niveau XXVIII est situé à la fin de la glaciation de Riss. L'étude du remplissage a permis de déterminer que la sédimentation n'a pas été continue. Elle a été entrecoupée de phases de ravinements. De même, un recul important de la falaise a pu être constaté. Les différentes datations ont été réalisées par la méthode du C14 jusqu'à 28000 ans, par la méthode uranium-thorium ou la méthode de résonance de spin électronique (ESR) pour les dates plus anciennes.

la galerie
La galerie d'accès

galerie 3
La galerie au débouché sur la salle principale

L'étude des pollens et des spores retrouvées dans les différents niveaux a permis la reconstitution de la végétation des différentes époques. Le remplissage régulier de la grotte, allant de la fin du Riss à la fin du Würm, a permis la consolidation de la paléoclimatologie du moustérien en France et a validé des hypothèses. Durant les phases climatiques tempérées, les forêts se sont développées et durant les périodes froides, les steppes se sont étendues. La faune retrouvée dans les différents niveaux correspond à vingt-trois espèces de mammifères différentes auxquelles il faut ajouter les seize espèces de rongeurs. Les vestiges sont presque exclusivement représentés par des dents et par quelques os. Parmi ces espèces se trouvent le mammouth, le renne, le mégacéros, l'ours des cavernes, l'ours brun, le bison, le bœuf musqué, le cheval, le bouquetin, le chamois, le loup, le renard, le lièvre ou la belette.

salle 2-4
Le fond de l'avancée de la salle principale

De nombreux restes de poissons ont été retrouvés. Cinquante pour cent de ces restes proviennent de brochets, le reste se répartit entre la lotte, la truite et le gardon. La présence de ces restes dans des niveaux contenant du matériel lithique moustérien indique qu'ils proviennent probablement de la pêche. Ont également été retrouvés les restes de 70 espèces d'oiseaux, dont beaucoup de rapaces. Parmi ces espèces, figure un mergule nain, petit pingouin de 20 cm de hauteur. Actuellement, le mergule nain vit dans les toundras de l'atlantique nord. En hiver, il mène une vie errante sur l'Atlantique. Il ne pénètre à l'intérieur des terres que dans des conditions anormales et très exceptionnelles.

salle 2-5
L'accès au diverticule

L'importance archéologique de la grotte est constituée par les deux industries lithiques reconnues. La plus ancienne, l'acheuléen, est daté de 145000 ans BP. Le niveau XXI a livré une trentaine de pièces, dont quatre bifaces. C'est les seules pièces de cette période trouvée en stratigraphie dans le Jura. Ils représentent les plus anciens témoignages de la présence humaine dans le Jura. Ces outils ont été façonnés par un prénéandertalien.

le porche
L'entrée de la grotte avec le niveau du sol avant les fouilles

La deuxième industrie est celle du moustérien, celle des néandertaliens. Elle a été retrouvée dans le niveau XX (environ 90000 ans BP) riche en racloirs, dans le niveau XIX (90000 ans BP) contenant du moustérien typique, dans le niveau XVI (32000 ans BP) contenant du moustérien de facies denticulés avec des pointes Levallois, dans le niveau XV (31500 ans BP) à moustérien typique et dans le niveau VIII (29000 ans BP) riche en racloirs. Une certaine unité de style a été reconnue dans cette industrie sans aucune influence extérieure. Les outils ont été réalisés en chaille (calcaire silicifié gris bleu) ou en silex local. Très peu de déchets de taille ont été retrouvés, ce qui donne à penser que la grotte a été utilisée pour des campements de chasse saisonniers situés loin des habitats permanents où furent taillés les outils abandonnés dans la grotte de Gigny.

l'entrée vue depuis la galerie
L'entrée vue depuis l'intérieur de la galerie

En 2003, un jeune paléontologue a découvert, dans la grotte, une mâchoire d'ours des cavernes. Le poids de cet ours a été estimé à 250 kg. Les objets découverts dans la grotte sont exposés au musée d'archéologie de Lons-le-Saunier. La fouille a été remblayée et aucun objet préhistorique ne peut plus y être découvert. Le niveau actuel du porche est bien inférieur à celui d'avant les fouilles qui correspond au niveau du sol de la galerie de la grotte.

la grotte

Actuellement, la grotte abrite une colonie de 300 chiroptères et une dizaine de petits rhinolophes autrement dit des chauves-souris. Celles-ci hibernent de novembre à mars. Elles sont sensibles à la lumière et surtout aux flashs. De ce fait, évitez de braquer vos lampes vers le plafond. Les chauves-souris sont cependant totalement inoffensives. Elles sont insectivores ou frugivores. Mais l'envol d'une colonie aussi importante est impressionnant et dans le noir, peut créer des émotions. La grotte n'est pas aménagée pour les visites et le sol est parsemé de trous. Veuillez donc vous assurer en permanence où vous posez les pieds.

salle 2-3
Dans la salle principale avec une chauve-souris en vol

Après la grotte, allez jeter un coup d'œil au paysage depuis le belvédère.

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Un fond de cabane sur le sentier menant au belvédère (peut-être néolithique ?)

Ces photographies ont été réalisées en juillet 2010.

 

Y ACCÉDER:

Sous nos contrées tempérées, les chauves-souris, mammifères menacés et protégés, ont plusieurs périodes des vulnérabilités.

En hiver, elles voient leurs proies (insectes) disparaître et entrent donc progressivement en léthargie, si bien qu'elles sont alors très fragiles. Chaque visite dans une grotte peut causer un dérangement, pouvant aller jusqu'à la mort de l'animal. La période critique s'étend du 1er novembre au 15 mars.

En juin et juillet, les femelles se regroupent pour mettre bas leur unique petit et l'année. Des dérangements de la colonie peuvent alors conduire à l'échec de la reproduction.

Durant le transit d'automne et de printemps, d'importantes colonies peuvent s'abriter dans les grottes. Il convient d'en éviter l'affolement en quittant rapidement les lieux sans bruit et sans éclairer les chauves-souris.

À Gigny, prendre le chemin du belvédère du Fays. À la clairière, prendre le sentier du belvédère, puis le sentier partant à gauche qui descend dans la falaise (balisage trait jaune)

Coordonnées GPS
46 N 28' 10"
05 E 28' 36"
Altitude 465 m

 



Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

Si vous constatez des modifications ou des erreurs, n'hésitez pas à m'en faire part.

 

Cette page a été mise en ligne le 19 septembre 2010

Cette page a été mise à jour le 23 avril 2016