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L'abbaye d'Abondance

Le cloître de l'ancienne abbaye d'Abondance est décoré par une série de fresques réalisées au XV^e siècle représentant la vie de la Vierge Marie dans un décor savoyard. Bien que certaines soient très abîmées par le temps, ces fresques livrent un instantané de la vie montagnarde de l'époque.

Louis de Feternes, seigneur de la vallée d'Abondance, fit en 1043 à l'abbaye de Saint-Maurice d'Agaume (Saint-Maurice dans le Valais en Suisse) la donation d'un territoire situé à la Chapelle d'Abondance. Des chanoines augustins sous la direction de l'abbé Arluin y fondèrent, en 1108, un prieuré. Une légende, erronée, indique que ce prieuré aurait été fondé par Saint-Colomban en 610 lors de son voyage d'Irlande à Rome. En 1138, sous la direction de l'abbé Rodolphe de Voserien, le prieuré se déplaça au village d'Abondance et devint une abbaye. À partir de cette implantation, les chanoines se dispersèrent et fondèrent des abbayes filles comme celle de Sixt-Fer-à-Cheval en Faucigny, en 1144, celle d'Entremont dans le Genevois, en 1154, ou celles de Moutier-Grandval et Goaille dans le Jura. Ils fondèrent également de nombreux prieurés. Le pape Alexandre IV les félicita en 1155 pour leur travail. L'abbaye d'Abondance se libéra de la tutelle de l'abbaye de Saint-Maurice en 1158. Au XII^e siècle, l'abbaye fut, entre autres, dirigée par deux abbés qui furent nommés bienheureux par le Vatican, Ponce de Faucigny (le fondateur de l'abbaye de Sixt-Fer-à-Cheval) et Jean d'Abondance.

En 1275 débuta la construction de l'abbatiale avec un chœur entouré d'un déambulatoire desservant sept chapelles rayonnantes. Le XIII^e siècle fut une période de grande prospérité pour l'abbaye. Elle avait droit de justice à Saint-Gingolph et possédait des immeubles à Évian, à Amphion et à Genève. L'abbaye exerçait sa juridiction sur une dizaine de paroisses et sur vingt-deux monastères. L'abbaye fut même chargée de reformer l'abbaye de Saint-Maurice d'Agaume.

Durant l'abbatiat de Jean III, entre 1330 et 1354, le cloître roman fut remplacé par un cloître gothique. Un incendie détériora l'abbatiale en 1400. Lors du règne d’Amédée VIII de Savoie, l'abbaye passa, en 1432, sous le régime de la commende. Le dernier abbé élu fut Guillaume de Lugrin (1411-1432) qui fut remplacé par François Ducrest (1432-1459). C'est à cette période que furent réalisées les fresques du cloître. Ces fresques qui représentent la vie de Marie dans un décor de la Savoie médiévale sont attribuées à un atelier piémontais proche de Giacomo Jaquerio.

Comme la majorité des abbayes sous régime de la commende, l'abbaye d'Abondance entama une lente décadence. Les revenus étaient en grande partie ponctionnés par les abbés nommés par le duc de Savoie ou le roi. Se succédèrent ainsi en tant d'abbés François Ducrest (1432-1459), Amblard de Viry (1460-1472), A. de Langin (1473-1480), Jean-Louis de Savoie (1480-1482), François de Savoie (1482-1490), tout deux évêques de Genève, et César Borgia (1490-1498). Ce dernier ne vint d'ailleurs jamais à Abondance. La nef et le clocher de l'abbatiale et une partie des bâtiments de l'abbaye furent gravement endommagés par un incendie en 1446. Le peu de revenus laissé à l'abbaye par les abbés commanditaires fit que la reconstruction ne s'acheva qu'en 1481. À cette date, les revenus de l'abbaye furent évalués à 1 700 florins par an.

François de Sales, alors évêque de Genève, visita l'abbaye en 1606. Ayant constaté que les chanoines ne suivaient plus aucune règle monastique, il demanda au pape Paul V de les remplacer par des moines cisterciens feuillants. Ceci provoqua un renouveau de l'influence de l'abbaye. Un rehaussement d'une partie des voûtes de l'abbatiale et la réfection du clocher furent effectués en 1612. Mais un nouvel incendie en détruisit la toiture en 1633 ou en 1635. La nef de l'abbatiale fut entièrement reconstruite en 1643. Elle fut alors amputée des collatéraux et du narthex. Un nouveau clocher surmonté d'un toit en forme de bulbe fut construit au-dessus de la nef en 1685. Un incendie détruisit en 1728 la partie nord du cloître et le clocher. Un nouveau clocher fut alors reconstruit à l'emplacement actuel.

À la fin du XVII^e siècle, les moines connurent des conflits avec les habitants de la vallée et avec les autorités religieuses. Puis au cours du XVIII^e siècle, les moines causèrent de nombreux scandales comme prendre des compagnes et avoir des enfants, porter des armes et fréquenter des cabarets. L’évêque de Genève demanda alors à Charles Emmanuel III de Sardaigne de solliciter auprès du pape la suppression de l'abbaye. Ce qui fut fait par Clément XIII en 1761. Bien que vendu en 1795 comme bien national, les bâtiments furent laissés à l'abandon et le cloître servit de dépotoir.

En 1836, la famille Sallavuard racheta les bâtiments et se servit du cloître comme écurie. Devenue église paroissiale, l'abbatiale reçut en 1845 des décors peints en trompe-l’œil. Réalisés par Casimir Vicario, ces décors représentent dans le chœur les douze apôtres et dans le transept les onze vertus. Après la redécouverte des fresques du cloître en 1862, celles-ci furent classées aux Monuments historiques en 1875. Marcel Rouillard fut chargé par les Monuments historiques en 1889 d'en faire le relevé. Il n'en reste actuellement que seize sur les vingt existants à l'origine. Entre 1898 et 1904, le côté occidental de la nef de l'abbatiale fut prolongé de deux travées et une nouvelle façade fut érigée. La commune d’Abondance acquit les bâtiments de l'abbaye en 1905. Une partie est actuellement occupée par un musée et l'autre par les services de la mairie. En 1910, une première restauration des fresques du cloître fut entreprise par le peintre Yperman.

Ces photographies ont été réalisées en février 2024.

Y ACCÉDER:

L'abbaye d'Abondance se trouve au centre du village d'Abondance. L'abbatiale est librement accessible, mais la visite du cloître et du musée installé dans les anciens bâtiments de l'abbaye est payante.

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Cette page a été mise en ligne le 02 avril 2024

Cette page a été mise à jour le 02 avril 2024