L'autel des druides

Au-dessus du pèlerinage du Schauenberg, au sommet de la montagne, un affleurement de grès forme une petite falaise orientée est / nord-est. L'érosion a détaché de nombreux blocs de cet affleurement. Ces blocs gisent le long des flancs de la montagne. Trois d'entre eux se sont positionnés de manière bien singulière. Ils forment une table de pierre. Certains auteurs nous parlent d'un dolmen. Pour ma part, je trouve cet arrangement tout à fait naturel, dû à un heureux hasard. La petite dalle surmontant la dalle horizontale du "dolmen" ainsi que la dalle verticale disposée perpendiculairement à la chambre sont par contre les témoins d'un aménagement de cet ensemble.

Les peuples, probablement les Celtes, ayant vécu il y a très longtemps dans les environs, ont été interpelés par la disposition de ces blocs. Ils en ont certainement fait un lieu de culte. La plate-forme située à côté du "dolmen", faisant face à l'est, a dû servir à des cultes solaires comme en d'autres lieux des Vosges. Le "dolmen" est désigné par les gens du pays comme étant l'Autel des Druides. Cette dénomination fait référence aux prêtres des peuples celtes qui officiaient dans les forêts. Cette référence est-elle ancienne ou date-t-elle du XIX^e siècle où la celtomanie était en vogue ? Il est certain que dans ce lieu se déroulaient des cultes que l'Église romaine désignait au Moyen-âge comme païens. Les radiesthésistes reconnaissent le lieu comme étant une source d'énergie tellurique très importante. L'utilisation du lieu a dû persister au cours du temps nécessitant la création du pèlerinage marial et la légende de la "Pierre du Diable" pour l'éradiquer.

Le pèlerinage du Schauenberg a été fondé en 1441 lorsqu'un ermite du nom d'Udalric y élut domicile. La légende nous apprend qu'un chevalier, de retour de croisade, avait fait vœu de construire une chapelle pour remercier la Vierge de sa protection. Alors qu'il explorait la région à la recherche d'un lieu propice, une voix lui cria "Schau am Berg" (regarde la montagne). Il vit s'élever une flamme au flanc de la montagne. La Vierge lui avait indiqué l'emplacement où construire sa chapelle. Le pèlerinage prit forme en 1446 lorsque la comtesse de Hesse, atteinte d'un mal incurable, eut une vision. Elle devait apporter la statue de la Vierge ornant sa chapelle personnelle au Schauenberg. Ne pouvant se déplacer, elle envoya son fidèle serviteur. Au moment où celui-ci déposa la statue dans la chapelle, la comtesse fut guérie. Le serviteur ignorant cela voulut remporter la statue avec lui sur le chemin du retour. Cela lui fut cependant impossible. La statue était soudée à l'autel. L'église actuelle a été construite entre 1684 et 1704 par les Franciscains. À la révolution en 1793, l'église fut endommagée et vendue comme bien national. La statue de la Vierge fut cependant mise à l'abri par des fidèles. À partir de 1809, l'église est rebâtie et le pèlerinage rouvert.

Comme dans beaucoup de pèlerinage marial, le Diable n'est pas loin. Ici, il se manifeste en contrebas le long du chemin de croix. À cinq minutes à pied git, le long du chemin, un gros rocher qu'un arbre enlace de ses racines. C'est la Pierre du Diable, le Teufelstein. Cette pierre boucherait une des entrées de l'enfer. Le Diable voyant d'un mauvais œil cette chapelle si près de son antre décida de la détruire. Il empoigna un gros rocher et le lança sur la chapelle. Mais la Vierge veillait précieusement sur son pèlerinage et détourna le vol du rocher. Celui-ci après quelques rebonds s'immobilisa à cet endroit en bouchant l'entrée de l'enfer. Le rocher porte toujours l'empreinte des griffes que le Diable y imprima en l'empoignant. Une autre version conte qu'au moment où le Diable souleva le rocher celui-ci se ramollit comme une motte de beurre au soleil. Le Diable ne pouvant pas la lancer la reposa à cet endroit où elle se figea immédiatement en gardant l'empreinte des griffes du Diable.

la pierre du diable
Le Teufelstein

le teufelstein
La pierre du Diable

Une autre légende conte qu'en 1809 lorsque les habitants de Pfaffenheim voulurent rapporter la statue de la Vierge dans la chapelle, ils y trouvèrent le Diable confortablement installé. Mais devant la Vierge, il ne peut que prendre la fuite. Dans sa fuite, il frappa de ses griffes le rocher qui depuis porte les traces de la fureur du Diable.

Les empreintes des griffes du Diable

Une vue de près

En passant à Pfaffenheim, arrêtez-vous à l'église. Du côté est de celle-ci subsiste une partie de l'édifice roman. Sur la partie basse des murs apparaissent de bien étranges griffures. Le grès dont sont faits les murs a servi de polissoir. De nombreux polissoirs datant des temps préhistoriques sont connus en France. Ces pierres servaient à polir les haches de pierre. À Pfaffenheim, les pierres de l'église ont servi durant le Moyen-âge. Les viticulteurs et les paysans y frottaient leurs couteaux et leurs serpettes en rentrant de leurs travaux. Au fil des ans sont donc apparues ces profondes traces.

L'église de Pfaffenheim

le polissoir
Les traces laissées par le polissage des outils

L'accès au pèlerinage du Schauenberg est indiqué à partir du centre de Pfaffenheim. Laissez la voiture sur le parking et rendez-vous à la chapelle. Le sentier menant à l'Autel des Druides débute à droite juste avant les bâtiments (10 minutes en montée). Pour la Pierre du Diable, rendez-vous sur le parvis de la chapelle et descendez le chemin (5 minutes) à l'arrière de ce parvis (balisage du Club Vosgien).

Les indications pour accéder à ce lieu insolite sont données sans garantie. Elles correspondent au chemin emprunté lors de la réalisation des photographies. Elles peuvent ne plus être d'actualité. L'accés au lieu se fait sous votre seule responsabilité.

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